Gerulata, le site romain

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Nous voici plongé dans le monde de la Rome antique. Le castel militaire romain de Gerulata, qui était situé sur le bord nord de la province de Pannonie, à l’extrémité septentrionale de l’Empire romain était intégré dans le système de fortification du limes romain danubien.

Ce site de Gerulata était composé d’un important camp militaire auxiliaire et d’un village civil où se trouvaient artisans et commerçants.

A proximité du camp militaire de Gerulata se trouvait probablement un gué du Danube et un quai de débarquement, mais les parties du port sur la rivière n’ont pas encore été découvertes.

L’archéosite de Gerulata abrite aussi le Musée de l’antiquité romaine et est sous la gestion du Musée de la ville de Bratislava. Situé à 12 km du centre de Bratislava, dans la rue Gerulatska, dans l’ancienne commune de Rusovce qui, en 1972, est devenue une partie urbaine de la capitale Bratislava.

Depuis 1963, le site archéologique – castel (castellum) militaire romain de Gerulata – est classé Monument culturel national slovaque.

En 2012, le site antique de Gerulata est nominé, avec le vestige du camp militaire romain Kelemantia ou Celamantia d’Iža, près de la ville de Komárno en Slovaquie, dans le projet européen Limes Danubien les frontières de l’Empire Romain (avec la participation de 8 pays européens) pour le titre de patrimoine mondial culturel de l’UNESCO.

Introduction

Pendant près de quatre siècles, les Romains vont ériger, à leurs frontières, des moyens de défense afin de protéger leur vaste empire contre les attaques de leurs adversaires. Le mur d’Hadrien et le mur d’Antonin en Grande-Bretagne. En Europe continentale, la frontière entre l’Empire et les Barbares coïncidait avec le Rhin et le Danube.

Situé précisément sur le moyen Danube, dans la plaine danubienne, sur le bord nord de la province de Pannonie, à l’extrémité septentrionale de l’Empire romain, a moins de 30 km du site important de Carnuntum en Autriche. Le Castellum Gerulata était un de ces moyens de défense construit sur le limes danubien.

A proximité du camp militaire de Gerulata se trouvait probablement un gué du Danube et un quai de débarquement, mais les parties du port sur la rivière n’ont pas encore été découvertes.
Le nom de Gerulata a probablement été pris par les romains aux Celtes y habitant (mentionné aussi comme Gerolota, Gerolate, Gerularis, Gerulara, Gerulatorum).

Ce site d’architecture romaine est le mieux conservé de la Slovaquie. Presque toute l’agglomération antique de Gerulata se trouve sous la zone urbaine médiévale et moderne de la commune actuelle de Rusovce.

Gerulata dans le limes Romain du Danube moyen

Le territoire slovaque actuel, a été peuplé depuis le 1er siècle jusqu’au 4ème siècle par des tribus germaniques et celtiques. Les régions du nord du Danube, en Slovaquie occidentale aujourd’hui, situées dans le voisinage immédiat de l’Empire romain, étaient habitées par les Marcomans et les Quades, tribus germaniques. Sous le règne de Marc-Aurèle et de Valentinien Ier, les légionnaires romains pénétraient profondément jusqu’au Nord, dans la vallée du Váh centrale et dans la vallée du Hron. En 179-180, pendant les Guerres contre les Marcomans, les légionnaires romains hivernaient dans le camp de Laugaricio – aujourd’hui Trenčín. Un texte gravé dans la pierre sous le château de Trenčin le rappelle.

La frontière du Nord de l’Empire romain – de la province de Pannonie – a été formée par le Danube – comme une barrière naturelle fluviale. Le long du parcours du fleuve du Danube, les Romains ont progressivement construit un vaste système de fortifications, les Limes Romanus danubiens, une série de places fortes reliées par une voie de rocade suivant le cours du Danube, jusqu’à son embouchure.

L’incorporation du territoire slovaque à l’empire romain faisait partie du bassin du Danube et dans la commune actuelle de Rusovce, se trouvait l’un des points forts de la frontière romaine danubienne – le site de Gerulata, un important camp militaire auxiliaire ainsi qu’une partie civile avec un arrière-plan économique regroupant artisans et commerçants.

Le castellum de Gerulata est connu par les sources antiques romaines : ltinerarium Antonini Augusti (un guide de voyage, qui recense les villes de l’Empire romain) et Notitia dignitatum imperii romanum (un document administratif romain de l’extrême fin du 4e siècle et début du 5e siècle, où sous le chapitre XXXIV. Dux Pannoniae primae, est mentionné Equites sagittarii, Gerolate (Gerulata). Ce site est aussi mentionné dans la Tabula Peutingeriana, la carte de l’humaniste Conrad Peutinger (1465 – 1547), où l’on retrouve nommée Gerulata, ou Gerulatorum, comme la ville de la Basse Pannonie du 4e siècle après J-C.

L’établissement du camp romain de Gerulata a été mis sur pied pendant le gouvernement de la dynastie d’empereurs romains des Flaviens (de 69 à 96 apr. J-C) et faisait partie du système de défense romain des Limes Romanus du Danube.

La ligne du limes Romain du Danube moyen partait des camps de légionnaires de Carnuntum (Bad Deutch Altenburg et Petronell en Autriche), et se terminait à Ad Flexum (Moson-magyaróvár en Hongrie). Le castel militaire romain Gerulata se situe à environ 28 km de Carnuntum, capitale de la province de Pannonie Superior.

Quatre étapes de la construction du camp militaire romain de Gerulata, du 1e au 4e siècle, ont été identifiées

Première étape

Sous l’ère de la dynastie romaine des Flaviens, de 69 à 96, (surtout pendant un long règne de l’empereur Domitien, de 81 à 96 apr. J-C) jusqu’aux années 70 du 2e siècle.

C’est sous Domitien – Domitianus (81 – 96) que les troupes légionnaires de Carnuntum (légions X, XIV et XV) ont construits le castel militaire Gerulata. Vers la fin du 1er siècle, le site de Gerulata eu une garnison permanente. De cette époque, les restes des bâtiments, peut-être de caractère militaire, ont été préservés. On y a trouvé en effet des briques rouges et des tuiles de construction estampillées du nom des légions romaines qui ont occupés, quelque temps, la localité du camp romain de Gerulata. En 1964, une fortification composée de doubles fossés et de remparts réalisés en terre et en bois a été partiellement identifiée pendant les premières fouilles archéologiques à l’endroit appelé Bergl à Rusovce. Un autre fossé, long de 27 mètres et le coin du camp militaire exposé au sud, sont situés actuellement dans la rue Madarská, derrière l’église évangélique de Rusovce.

Deuxième étape

Vers 170, sous le gouvernement de la dynastie des Antonins et jusqu’à l’empereur Aurélien dans les années 90 du 3e siècle.

Au début du 2e siècle apr. J-C, dans le camp de légionnaires à Gerulata, s’installa la troupe d’élite de cavalerie, l’aile – A la Prima Cananefatum qui comptait environ 500 hommes et était dirigée par un préfet d’ordre équestre. Elle était constituée par les Cananefates, hommes de la tribu germanique vivant dans le delta du Rhin. Ces hommes formaient plusieurs unités auxiliaires dans l’armée romaine. Cette aide permettait d’acquérir, en fin de service, le prestigieux titre de citoyen romain.

L’aile militaire de cavalerie des Cananefates fut établie dans la province de Pannonie après son temps au campement romain de Lopodunum, aujourd’hui Ladenburg en Allemagne.

On trouve aussi la présence d’autres unités comme la IIe légion, la cohorte XVIIIe des volontaires, la Ve cohorte Lucensium Callaecorum, et la Première cohorte d’archers Aelia Sigittariorum.

La deuxième étape de la construction du camp en pierre n’est pas bien connue actuellement, mais sa surface de 150 à 170 mètres dépassait le premier camp romain qui a été construit en terre et en bois. La maçonnerie en pierre de la construction intérieure du camp créait un bâtiment à la fondation carrée avec l’épaisseur d’un mur de 45 à 60 cm. L’un des murs, avec une longueur allant jusque 25 mètres est exposé à l’extérieur du musée d’antiquité de Gerulata.
Plus tard, la partie nord-est du castel et du camp a été détruite par les crues du Danube, mais une partie du mur périphérique est visible au musée. Près du grenier paroissial, la partie de la ligne sud-ouest du mur défensif périphérique, construite en pierre, est large de 2,4 m et profonde de 3,2 m.

Le camp militaire, avec ses quatre portes et quatre tours d’angle, était entouré par les fossés défensifs et les remparts avec des palissades en bois, par les murs avec un système défensif dit « les fosses abattis ».

La porte principale – Porta praetoria était orientée vers l’est (vers l’ennemi), le réseau des voies inférieurs avec le système de canalisation se trouvait sous l’angle droit. La route principale – Via principalis se croisait avec la route – Via praetoria au centre du camp avant le quartier général.

Troisième étape

Elle commence à la fin du 3e siècle (les 30 dernières années du 3e siècle) et jusqu’au 375 ou 380, c’est une période pendant laquelle la reconstruction du camp romain de Gerulata était très fréquente, elle est représentée par le Castel militaire à la fondation presque carrée entouré par un mur d’enceinte en pierre. Le camp militaire était d’une surface de 200 m². Selon une supposition, le mur n° 11 (en direction du nord-ouest) qui est exposé dans l’aire du musée, bordait le port fluvial. Une preuve appréciable archéologique, exposée au musée, est un vestige d’une porte au commencement de la Via Carnuntiana – alors la voie romane reliant le camp de Gerulata avec le camp de Carnuntum (en Autriche).
Dans les 30 dernières années du 4e siècle, sous l’empereur Valentinien, les travaux de fortifications du limes danubien sont conduits par l’officier romain Tempsonius Ursicinus, son nom a été découvert aussi sur les débris de briques estampillées à Gerulata.

Quatrième étape

Après 375 – 380, c’est la période de la construction d’un fort auxiliaire, le castellum, avec des tours (turris) de guet, pendant l’antiquité tardive. L’activité principale des travaux de reconstruction, a été de bâtir un castel au coin nord du camp militaire de Gerulata. La surface totale du castel militaire a été nettement réduite.

Les vestiges de l’architecture romaine sont présentés au Musée d’antiquité de Gerulata, grâce aux résultats des fouilles. Un bâtiment de coin de 29 à 30 mètres a été identifié, situé au nord du fort militaire romain du 4e siècle, et à l’intérieur 12 colonnes en pierre entourent l’atrium avec un puits en pierre ou un bassin situé asymétriquement en son centre. Les colonnes avaient un soubassement maçonné de 3 à 4 mètres, de même que les murs périphériques avec leur épaisseur de 240 cm composant le fort auxiliaire de Gerulata. Cela fait penser qu’il s’agissait d’une structure à trois étages.
Pour la construction de cette fortification, des pierres sculptées (pierres tombales, stèles, etc. aujourd’hui exposées dans le lapidaire du musée) ont été utilisées secondairement.

La zone civile – le vicus

Il semble que sur le site de Gerulata, l’agglomération civile, le vicus, avait dans son épanouissement, une population que l’on peut estimer à environ 3000 habitants.

Le vicus entourait le camp militaire de trois côtés. Le quatrième côté « decumate » était situé vers la rivière.

Fin du site antique de Gerulata

Il semble, que le site de Gerulata, l’ancien camp militaire (castellum) et la partie civile (vicus) ont été abandonnés par ses habitants après la chute de la puissance romaine et à la suite d’invasion barbares. Les fédérâtes romains Goths se sont installés dans l’aire de Gerulata (le cimetière lombardien découvert a livré plus de 166 tombes datant du 5e au 6e siècle), puis le site sera occupé par les Slaves au 7e siècle. Ils vont s’y installer et repeupler ce site et lui donner un nouveau nom : Rusovce.

Les Fouilles

L’ancien site de Gerulata comprenait, selon les découvertes :

– le Castel militaire romain et le camp militaire ;
– les tours de guet et de signalisation ;
– le quai sur le Danube ;
– les hameaux romains civils (Vicus) ;
– les nécropoles romaines situées extra pommerium – aux bords des routes en limite des agglomérations ;
– les fermes agricoles ;
– les maisons de campagne luxueuses du type la Villa Rustica, les vestiges étaient situés à Čuňovo, ils furent découverts pendant la construction de l’autoroute D2 (autoroute qui va de la frontière tchèque à Bratislava vers la Hongrie) au sud près de Rusovce ;
– le site de campagne antique et la villa rustiqua de l’époque des Sévères de 193 à 235 – qui font partie de l’ancien environnement agricole de Gerulata.

Les fouilles dans le temps

Les premiers sondages archéologiques à Rusovce commencèrent à la fin du 19e siècle, en 1888, sous Agost Sötter, archéologue hongrois. Quelques trouvailles sont exposées au musée hongrois à Mosonmagyaróvár.

Après 1947, les archéologues slovaques commencent fouiller à Rusovce.

Quand en 1961, sur le lieu dit Bergl, une petite colline derrière l’église de Sainte Magdalena à Rusovce, pendant des travaux de construction, on découvre, par hasard, les vestiges de l’aire du bourg avec un double fossé défensif romain. Ce site a été assuré par des fouilles préventives. Mais la trouvaille exceptionnelle d’une pierre épigraphique avec le nom en latin Gervlata (Gerulata), confirmait l’existence d’un camp militaire romain et donnait une impulsion pour la fondation d’un musée archéologique in situ. Ces vestiges d’antiquité reviennent alors sous le patrimoine archéologique slovaque.

Depuis 1964, des fouilles sont programmées à Rusovce sous Jan Dekan (de 1965 au 1972) et de 1976 au 1987 sous Ladislav Snopko.

En 1998 et en 2000, les fouilles permettent la découverte du coin du camp romain à l’orientation sud-est et la ligne du double fossé défensif dans un périmètre de 27 m de long sur la rue Maďarská à Rusovce. A l’intérieur de ce camp romain, les casernes et les baraques des hommes ont aussi été fouillées.

En 1965, à Rusovce, 3 cimetières de l’époque romaine ont été découverts ainsi que des tombeaux d’inhumation, et d’incarnation. Les tombes les plus anciennes datent de la seconde moitié du 1er siècle, la plus jeune de la fin du 4ème siècle.
Selon les résultats des fouilles archéologiques réalisées dans les années 1990 – 2002 à Rusovce, les vestiges du camp militaire romain de Gerulata et le noyau d’une agglomération résidentielle civile de l’époque romaine, se trouvaient pratiquement sur tout le territoire de l’actuelle commune de Rusovce.

Dans la partie du vicus, l’agglomération civil romaine, près de la voie romaine, allant vers Carnuntum, capitale de la province Pannonie Supérieure. Selon les dernières fouilles, là ont été trouvées des bâtiments en briques crues mais aussi des vestiges d’architectures en pierres avec les fragments de riches peintures murales intérieures, des canalisations et des pièces particulièrement bien conservées ayant été chauffées par hypocauste.

Pour l’instant 5 cimetières antiques situés extra pommerium – derrière les remparts, ont été retrouvés. On y trouve des tombeaux de type d’incinération, d’inhumation, et combinés. Les tombes les plus anciennes ont été retrouvées sur le cimetière n° II. Les tombeaux sont en forme de fosse simple, de cryptes en briques, de sarcophages, de cryptes en pierres. La combinaison d’inhumation et d’incinération des morts sur les nécropoles de Gerulata, est typique pour l’époque du Haut Empire Romain.

Une coexistence de la population romanisée et des Germains est documentée dans la nécropole n° III, actuellement sur la rue Kovacsova, en direction du sud du cimetière actuel de Rusovce.

En 2003, une nécropole de l’époque de l’invasion barbare a été fouillée dans le cadastre territorial, dans la localité de Pieskový hon, de Rusovce. Parmi les 166 tombeaux, probablement Lombards ou germains, on découvrit aussi des tombes de chiens et de chevaux.

Des noms latins

Quelques noms de citoyens romains et de militaires ont été découverts à Gerulata (34 noms sont publiés). Ils appartenaient à l’unité auxiliaire – Ala Prima Cannanefatium – constituée de la cavalerie et de l’archerie romaine :

Marius Firmus – praefectus alae – préfet d’aile
P.Gavius Balbus – préfet
L.Crepius Paulus – préfet
Aelius Tutor – stator de l’Ala Prima Cannanefatium
Marcus Antonius Iulianus – stator de l’Ala Prima Cannanefatium de Gordiannus
Maximus – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium
Titus Flavius Surillo – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium
Titus Magnis – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium de Sévère
Flavius Attius – buccinatore (trompettiste) musicien
Adiutor – nom sur la stèle d’un cavalier, tombé à l’âge de 42 ans. Il était au service des troupes auxiliaires pannoniennes participantes à la guerre contre les Maures dans la province romaine de la Maurétanie Césarienne sous Antonin le Pieux (règne de 138 à 161).

Le musée de l’antiquité romaine

Le musée de l’antiquité romaine Gerulata de Bratislava-Rusovce, présente les pièces les plus spectaculaires découvertes in situ lors des prospections et des fouilles systématiques qui y sont conduites depuis 1964.
Ces découvertes révèlent le passé romain de Gerulata. De l’imposante architecture antique, en passant par des objets de la vie quotidienne et des objets de la religion romaine et des cultes orientaux. Les fragments de statues et de reliefs romains, les chapiteaux et les fragments de colonnes, les fragments épigraphiques en pierre, les pierres tombales, les stèles, les autels votifs, les amphores, les lampes, les armes, les pièces de monnaies sont exposées dans le musée. On y retrouve, par exemple, un denier d’argent à la mémoire de la XIXe légion massacrée par les germains pendant la bataille de la forêt de Teutoburg en l’an 9 apr. J.-C.

Les artefacts archéologiques romains du 1er au 3e siècle apr. J-C, découverts à Gerulata

Le fragment du récipient aux serpents est considéré comme une preuve de l’existence d’un culte d’Orient du dieu perse de la lumière et du soleil, le dieu Mithra, dans le camp militaire romain Gerulata.

Les fragments des autels de la religion romaine : les autels de dédicace en latin de Jupiter Dolichenus, des fragments d’autel avec inscription votive.

Les autels dédiés au culte impérial de Salus Augusta – Salut d’Auguste, introduit après la mort d’Auguste en 14 apr. J-C. Le Sénat lui accorda l’apothéose et le plaça au rang des dieux. Les habitants dans les provinces rendaient un culte à la déesse Roma, désormais ils offrirent des sacrifices à Rome et à Auguste.

L’autel consacré à la triade divine de Jupiter, Junon et Minerve.

Le fragment d’autel de dédicace en latin de Silvanus, le dieu Silvain. Dans la mythologie romaine, il est le dieu tutélaire des forêts et des arbres, gouvernant les frontières entre le monde sauvage et celui des humains : Silvano Deo Sancto Viatori – Silvanus, dieu protecteur des voies.

Les fragments d’autel du culte d’Orient consacré à la déesse Cybèle. Culte de la Grande Mère des dieux, Matri Magnae Deum. (1)

La pierre tombale comportant un relief du dieu Attis, le dieu phrygien de la végétation dont le culte était inséparable de celui de Cybèle (2).

Un fragment d’autel du culte d’Isis, déesse de la fertilité d’origine égyptienne. (3)

Le motif des personnages mythiques Dédale et Icare.

Un relief monumental polychromé d’une pierre tombale – une pierre calcaire de 103 x 90 x 22 cm – datant de la fin du 1e siècle et du début du 2e siècle, découvert dans les ruines du site antique de Gerulata, représente le symbole mors immatura, mort d’un jeune ou le symbole d’un destin tragique.

Un récipient anthropoforme. Il s’agit d’un objet cultuel de Clotho ou de la parque Nona, en latin Neuna Fata, la fileuse de la destinée humaine, l’une des trois parques dans la religion romaine.

Les motifs d’animaux, représentés sur des reliefs : cheval, lion, taureau, aigle, dauphin, hippocampe et griffons (animaux mythologiques) ainsi que d’autres motifs végétaux comme l’acanthe, le lierre, la vigne, la pomme de pin, la grenade…

Notes

1 La déesse anatolienne Cybèle arrive à Rome vers 204 avant J-C.

2 le culte d’Attis était répandu à Rome au 3e siècle.

3 Les mystères d’Isis exercèrent une grande influence dans la Rome antique (l’empereur Caligula s’intéresse au culte d’Isis au 1ère siècle) : Isidi Magnae Matri Deum Sarapidi, Isis, la grande déesse des dieux et Sarapis.

Références

Rímske kamenné pamiatky Gerulata. Metské muzeum v Bratislave. Archeologický ústav SAV. Jaroslava Schmidtová, Jitka Jezná, Anita Kozubová, Venované pamiatke prof. PhDr. Radislava Hošeka, Csc. Bratislava – Nitra 2005

Rímsky Vojensý Tábor Gerulata, Bratilava Rusovce

Frontières de l’Empire Romain. David J Breeze, Sonja Jilek, Andreas Thiel. Published by Historic Scotland, UK and Deutsche Limes kommission, Germany Edinburgh – Esslingen – Wien 2005

Dunajský limes na Slovensu – Rímske antické pamiatky na strednom Dunaji. Rímsky vojensý kastel Gerulata v Bratislave-Rusovciach. Schmidtová J., Gáfriková O., Pinčíková Ľ. Pamiatkovy úrad Slovenskej republiky. www.pamiatky.sk

Carnuntum, c’était il y a 2000 ans. Archäologischer Park Carnuntum Betriebsges, mbH

Le Limes, les frontières de l’Empire romain. Bertrand Borie. Histoire Antique et Médiévale n° 65 janvier/février 2013. Editions FATON

PS : L’archéosite Gerulata abrite le Musée de l’antiquité et est sous la gestion du Musée de la ville de Bratislava (Bratislava City Museum) :

http://www.muzeum.bratislava.sk

http://www.muzeum.bratislava.sk/anticka-gerulata-rusovce/d-1019

Chaque année au début du mois septembre, dans le musée de l’antiquité de Gerulata, se déroule l’animation « Jeux romains » (Rímske hry) un spectacle qui, depuis 1999, est une représentation de la vie dans une ville romaine. Ce spectacle est assuré par des étudiants en arts dramatiques de Bratislava.

La chandeleur en Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Magie des chandelles, oracles, le 2 février, jour de la Chandeleur est une ancienne coutume qui était sensée protéger les maisons, les habitants et leur apporter de bonnes récoltes et le lendemain, jour de saint Blaise, est aussi important dans l’imaginaire des gens afin d’obtenir une bonne moisson.

En Slovaquie la fête de la Chandeleur, le 2 février, est appelée Hromnice.

Un peu d’histoire

La fête de la présentation de Jésus-Christ au Temple et de la Purification de la Vierge est célébrée dans l’Église catholique et orthodoxe le 2 février en 2017.
Cette fête est honorée en mémoire de la présentation de l’Enfant Jésus au Temple raconté dans l’Évangile de Luc (1) conformément à la loi juive qui prescrivait la purification de la mère et la présentation de l’enfant au Temple de Jérusalem 40 jours après la naissance.

Cette fête a pris sa dénomination populaire de « chandeleur » en raison des chandelles et cierges bénits portés en procession ce jour pour rappeler la prophétie du vieillard Siméon qui, lors, de la présentation du Jésus, avait annoncé qu’il serait « Lumière pour toutes les nations ».
Cette fête fut instituée par le pape Vigile au 6e siècle, pour christianiser la fête païenne de Proserpine (Perséphone chez les grecs), que les païens Romains célébraient avec des torches ardentes.

Selon les ethnographes, l’évolution de la fête chrétienne de Hromnice était peu compliquée, dans la tradition des vieux Slaves c’était la fête appelée stretenie – rencontre de l’hiver avec l’été. Chez les Slaves occidentaux la fête Hromnice était probablement la célébration du dieu Pérun/Péroun, dieu de tonnerre (hrom en slovaque) et de la foudre (blesk en slovaque) et dominateur du feu. Selon d’autres, c’était le jour de Veles/Volos – fête de l’ours dans le culte païen des Slaves orientaux.

La fête dans la Rome antique appelée Lupercalia, fêtée par les Romains qui célébraient la fondation de Rome, vers le 15 février, et en l’honneur du dieu Faunus, protecteur des troupeaux contre des loups. Les luperques – prêtres de ce dieu – sacrifiaient des boucs à leur dieu à une grotte au pied du mont Palatin. La peau de bouc coupée en lanières, étaient servie aux jeunes hommes pour le « fouettage des Romains ». Les jeunes hommes couraient autour du mont Palatin en frappant les spectateurs, en fouettant surtout les femmes avec les peaux de bouc. Les processions avec des torches ardentes et le fouettage avaient un sens purificatoire magique.

A l’époque chrétienne, c’est devenu la fête de la Purification de la Vierge et le rituel de bénédiction des chandelles.

Hromnice et les chandelles

La chandelle est, pour les superstitieux, un symbole de protection contre les orages ou, plus exactement, contre la foudre qui pouvait enflammer les bâtiments. N’oublions pas que la plupart des constructions dans les villages, les montagnes slovaques étaient complètement en bois et avaient, pour certaines régions (sud-est de la Slovaquie), des toits en chaume.

Le fait de brûler une chandelle durant l’orage était – est encore pour certains – donc sensé protéger les bâtiments.

Les gens croyaient aussi, croient encore, au miracle de la bénédiction des chandelles comme thérapie contre le mal de gorge de même qu’à la possibilité de passer de vie à trépas plus facilement ou plus exactement, sans souffrir (2).

Le repas de Hromnice

Pour la chandeleur, les villageois préparaient un repas traditionnel avec des pâtes fraîches – rezance – en slovaque, ce sont des nouilles rituelles très longues, ou encore avec des pâtes appelées šúľky ou slíže – composées de pommes de terre et de farine, et roulées sous la forme de la grosseur d’un doigt.

Dans la région de Liptov, il existe un usage établi pour le rituel pour la cuisson de ces pâtes en forme de rouleau pour le repas de la Chandeleur. Hélas, de nos jours ce rituel tant à disparaître alors que depuis le début du 19e siècle, les enfants chantaient et dansaient pendant la cuisson du repas sur la formule incantatoire suivante :

Varte mamko, len šúľance, nech sú tučné ako škorce. Bryndze hodne obetujte, a škvarky tiež nešanujte. Každému nadeľte misku, nech sa rovná ľan úžitku.

Texte en patois slovaque de la région de Liptov et que l’on peut traduire en français par :

Maman cuis les pâtes roulées pour qu’elles soient grosses comme un étourneau, saupoudre-les avec beaucoup de fromage de Bryndza et de rillons et n’économise pas ! Mets-en dans chaque bol, pour que le lin croisse pour son utilisation.

Ces mets sont préparés pour un rituel de magie destiné à obtenir des pousses très longues de lin et de chanvre, de même que les pâtes sont saupoudrées de Tvaroh – un fromage blanc – pour avoir un aspect blanc, ce rituel étant accompli afin d’obtenir des toiles biens blanches plus tard.

La coutume culinaire de préparer ce jour le repas de pâtes longues saupoudrées soit de pavot, soit de fromage de lait de brebis – bryndza ou de fromage de lait de vaches – tvaroh, était très répandue partout en Slovaquie. Cette coutume disparait cependant peu après la Seconde guerre mondiale, quand disparaît la fabrication domestique des toiles du lin et du chanvre.

Les prophéties agraires et les superstitions

A cette période, en Slovaquie, la neige est bien présente et les familles vont pratiquer la luge et glisser sur la neige fêtant ainsi la nature et la Chandeleur. Jadis, ce sport était aussi sensé apporter la garantie de très longues tiges du lin et du chanvre – des plantes industrielles pour le textile qui étaient fabriqué à la maison.

Une tradition ancienne dit que le 2 février permet aussi de pronostiquer la prospérité, ou non, de l’agriculture, pour les récoltes venant de la terre – blé, orge, avoine, pommes de terre, chou, pois, haricot, lentille, pavot… – et pour la récolte de plantes industrielles ayant comme utilité le textile – lin, chanvre…

Dans le village montagnard de Podkonice, dans le district de Banská Bystrica, on disait : Na Hromnice – koniec sanice : à Hromnice (à la Chandeleur) – c’est la fin de luger.
Autrefois, pendant ce jour, les villageois de Podkonice se réconfortaient avec des boissons alcoolisées dans une taverne. On disait que cela avait une vertu préventive contre les piqûres des mauvaises mouches d’été et de taons des pluies, insectes extrêmement importuns. Et celui qui ne boit pas, les mouches le piqueront toute l’année.
Le soir, les femmes-fileuses de Podkonice se réunissaient aussi dans une taverne du village afin de fêter, en buvant une boisson, la fin des travaux domestiques du filage du lin et du chanvre.

Dictons de la Chandeleur

Na Nový rok o slepačí krok, na Hromnice je o hodinu vice – L’enjambée du poulet du Nouvel an à la Chandeleur est égale à environ une heure de plus
Na Hromnice zima zadúva ulice – Lors de la Chandeleur l’hiver souffle la neige en tas dans les rues
Na Hromnice mráz, bude ešte päťdesiat ráz – S’il gèle à la Chandeleur, il gèlera encore cinquante fois (50 jours)
Na Hromnice – zimy polovice – A la Chandeleur, l’hiver est à son milieu

Le 3 février, jour de la Saint-Blaise

Fêté depuis le Moyen Age en Slovaquie, qui était alors Royaume de Hongrie, et depuis le 18ee siècle. Il s’agit d’une marche, autour du village, de l’instituteur accompagné par les écoliers et qui vont de porte en porte souhaiter bonne vie, bonne santé, aux villageois. Ceux-ci, pour les remercier, déposent dans un panier des aliments : farine, lentilles, haricots, pavot, lardons, beurre, œufs, fromage, fruits, saucisses … et un peu d’argent de poche.

On retrouvait aussi cette tradition à la saint Grégoire le 12 mars ainsi que le jour de saint Martin le 11 décembre et de saint Havel le 16 octobre.

Dans ces régions, au 18e siècle, le poste d’instituteur de village, souvent protestant au 18e siècle, pour ceux qui en avaient la vocation, permettait d’assurer un salaire et d’obtenir aussi quelques avantages « en nature » comme du bois de chauffage, du blé, de la bière, du lard … et de petites rentrées d’argent. Il faut dire qu’à l’époque, les enfants n’allaient à l’école qu’en hiver, depuis la mi-automne, car le printemps, l’été et une partie de l’automne, les enfants étaient aux champs avec la famille.

La grande Réforme des écoles de 1774, pendant l’empire austro-hongrois, imposée par Marie-Thérèse de Habsbourg (1717 – 1780)(3), allait changer ce principe éducatif des enfants en organisant les écoles et en rendant l’enseignement obligatoire pour les garçons mais aussi pour les filles. Cela amènera la disparition de cette coutumes, que l’on ne retrouve plus que dans quelques villages où les habitants ont gardés ou remis cette « promenade » qui fait aujourd’hui partie de la mémoire collective.

PS :

Deux églises à voir. La première se trouve au sein du petit village de Smrečany, près de Liptovský Mikuláš, là on peut y voir la très jolie église gothique (vers 1349) dédiée à l’origine à l’Očisťovania Panny Márie – de la Purification de la Vierge Marie de rite catholique-romain.
La deuxième, une église en bois du rite gréco-catholique (1760), se trouve dans le petit village de Kožany, près de Bardejov, et est dédiée à Stretnutia Pána so Simeonom – Présentation du Seigneur à Siméon.
http://www.drevenechramy.sk/drevene-chramy/bardejov-a-okolie/kozany/

Notes

1 Luc 2.22 : Et, quand les jours de leur purification furent accomplis, selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem, pour le présenter au Seigneur, –

2 Voir notre article L’Epiphanie en Slovaquie : http://vaheurope.eu/?p=545

3 Marie-Thérèse était archiduchesse d’Autriche, reine de Hongrie et de Bohême

Sources

Ľudová kultúra. Zuzana Beňušková. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009.

Les Fêtes de Dieu. La foi, l’histoire, les mythes. Guy Deleury. Ed. du Félin. 1994

Dictionnaire d’iconographie romane. Marc Thoumieu. Ed. Zodiaque

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

Rome antique. Les yeux de la découverte. Texte Susan Mckeevers. Les compacts Gallimard jeunesse. 2008

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976

L’architecture populaire en bois de Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

En Europe, la Slovaquie fait partie des pays ayant une très grande couverture forestière. Plus de 40% de son territoire est occupé par les forêts et elle possédait auparavant une zone encore plus étendue. Il est donc normal de retrouver de nombreux bâtiments en bois. Nous réserverons d’ailleurs des articles aux églises en bois de Slovaquie. Parmi ces églises, huit de la zone des Carpates sont désormais inscrites sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO depuis le 10 juillet 2008.

Les forêts de bois tendres d’Europe de l’Est font partie de la zone de végétation comprenant la forêt de résineux boréale qui traverse l’hémisphère nord mais diverses forêts de feuillus poussent aussi à des altitudes plus basses.

Cette richesse en bois différents est la cause de la vieille tradition de l’architecture en bois de ces régions. La construction en rondins s’étend de la Scandinavie vers l’ouest, va jusqu’à la Baltique au nord, jusqu’en Asie vers l’est et jusque la mer noire et l’ex-Yougoslavie au sud.

En Slovaquie, le bois a toujours été un matériau prédominant dans la construction, plus particulièrement à la campagne et, surtout, dans les montagnes et ce jusqu’au 19ème siècle quand va apparaître la brique crue d’abord puis la brique cuite et que va se populariser l’usage de la pierre, surtout dans les villes minières du sud de la Slovaquie centrale et de l’argile, dans les plaines du sud.

Les maisons, les fermes, les moulins et les églises étaient essentiellement construits en bois. Ces techniques traditionnelles de construction ont été abandonnées depuis. De nombreux édifices et bâtiments ont été détruits, ou ont brûlés lors d’incendie, et d’autres, abandonnés, se sont effondrés.

Technique de construction abandonnée ? Aujourd’hui, on peut remarquer que certains remettent au goût du jour ce noble matériau dans les montagnes slovaques.

Il faut aussi noter que le bois est le matériau qui accompagne l’homme tout au long de sa vie, littéralement du berceau à la tombe. Il peut donc paraître inévitable que le bois soit aussi un matériau utilisé couramment comme matériau de construction.

Mais revenons aux constructions en bois en Slovaquie pour s’apercevoir que les espèces d’arbres utilisées pour la construction, les plus communs y compris, sont les hêtres à feuilles caduques et les conifères, épicéa, mélèze.

On retrouve les maisons en bois de conception rustique plus particulièrement au nord de la Slovaquie. Là, sont construits en bois, des églises, les chapelles, des clochers, des bergeries, des greniers à céréales, des bâtiments agricoles, des moulins, des puits, des ponts… Dans ces différentes constructions, le bois prouve, par ses qualités, qu‘il apporte la meilleure solution aux divers problèmes présents dans la réalisation de ces édifices.

C’est lors de la visite des skanzens – musées de plein air, que l’on pourra le mieux appréhender l’architecture populaire. Cependant deux villages sont incontournables. Le premier est le village de Vlkolinec connu pour son ensemble d’habitations en bois, inscrit depuis 1993 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Le deuxième est le village de Čičmany où les maisons en bois sont ornées de motifs géométriques peints en blanc.

Les techniques de construction en bois en Europe centrale et de l’Est

Nous trouvons, comme techniques de base de l’architecture en bois – en russe srub – en slovaque zrub. La technique de base de l’architecture en bois appelé en slovaque – zrubenie – les constructions en rondins empilés, dont la difficulté majeur est l’assemblage des extrémités des rondins aux angles du bâtiment.

Dans le nord de la Russie, les rondins demeuraient sans traitement, à part l’écorçage. Plus au sud, en Slovaquie, en Roumanie ou en Ukraine, le bois était travaillé en madriers de section carrée. Pour ce travail, on utilisait uniquement la hache et l’herminette, on créait sur chaque pièce des entailles et on les empilait pour construire des murs.

Les madriers étaient découpés pour créer des percements et on y insérait les encadrements de porte ou les ébrasements de fenêtre.

La difficulté de réaliser des angles solides à conduit à la réalisation d’assemblages complexes. Un système d’assemblage à tenons et mortaises s’est répandu au 18e siècle, pour sa bonne stabilité, de Croatie en Ukraine.

La construction de la cabane ne possède pas de squelette, de colonnes verticales, comme les constructions en béton. Pour le bois, des troncs d’arbres entiers sont utilisés et les seuils qui constituent le périmètre de la maison sont aussi la base de la maison en rondins et dans les angles, les rondins de bois se croisent et s’encastrent pour former l’arête de la construction, les deux parois étant reliées à leurs extrémités par un assemblage ressemblant à un système de mortaises. La stabilité des bâtiments pendant l’assemblage dépend de la qualité des différents faisceaux.

Les maisons en bois classiques

On retrouve essentiellement deux types de maisons classiques. La première est la maison à deux niveaux. La deuxième, la plus courante, la maison à un niveau, ce que nous appelons aujourd’hui la maison de plain pied. Il est bien entendu que, pour tous les types de maison, lorsqu’elle est édifiée en montagne, ce type de construction était adapté à l’inclinaison du terrain.

Si dans les villes on trouve la porte d’entrée sur la façade principale côté rue, mais aussi parfois dans des cours, on peut remarquer que, généralement, pour les maisons de village, c’est un pignon qui donne sur la rue et l’entrée de la maison se fait latéralement par la cour où se trouvent également les dépendances.

La maison à deux niveaux

La maison de type classique était constituée de deux niveaux, avec souvent, un escalier extérieur. Au niveau supérieur on y trouvait le logement, souvent situé au-dessus des granges ou des étables. Cela permettait de gérer le travail de la ferme même en cas de neige ou de mauvaises conditions météorologiques et de profiter de la chaleur venant des étables ou des bergeries.

Ces plus grands bâtiments, avec étage, possédaient de petites chambres à l’étage disposées sous les versants de la toiture, un grenier et une cave

Dans certaine région, le plus souvent en montagne, le soubassement de la maison était réalisé en pierre afin de protéger le bois de l’humidité et de récupérer la pente du terrain.

Le bois des madriers était soit laissé « brut » soit enduit d’un plafonnage composé d’argile et peint ensuite avec de la chaux blanche ou teintée d’ocre ou de bleu.

Le chaulage à pour but essentiel de protéger le bois contre les insectes, les microbes et les bactéries. Quant à l’utilisation de peinture, les tons utilisés, ocre, bleu… outre l’aspect esthétique, elle avait aussi pour objectif de chasser les insectes, rampants comme volants (1).

Composition de la maison

Les éléments clés de la maison de plain pied étaient : la cuisine, le cellier, la pièce de séjour comprenant le lit.

Plan d’une maison traditionnelle de plain pied comportant : 1 l’entrée centrale avec perron ; 2 le cellier ou débarras ; 3 antichambre ; 4 l’izba, la chambre principale (pièce de séjour) et 4a le four maçonné.

A l’intérieur d’une maison en bois slovaque

En Slovaquie, la disposition de la maison avait un caractère d’utilité et de simplicité. Voyons cela un peu plus en détail.

La simplicité tout d’abord. Pour y vivre, les habitants avaient un logement comprenant une pièce, qui servait de cuisine dans le vestibule de l’entrée (antichambre) – 1 – ; une chambre et pièce de séjour – izba en slovaque – 4 – où se trouvait un four maçonné – 4a-.
Dans la cuisine – 3 -, on trouvait le poêle et la cheminée ou plus tard, le poêle et des meubles de bureau, bureau, lit, coffre à vêtement. Les pièces d’entreposage des aliments étaient situées à proximité – 2 -.

Comme éclairage, on a d’abord utilisé les lanternes et les bougies, plus tard les lampes à pétrole – kahance et ensuite l’électricité.

L’espace de vie principal était bien entendu centré dans la maison et devait faciliter la vie et le travail de ses habitants, comme la préparation des repas, le repos, l’accueil des visiteurs, les cérémonies…

La pièce principale (2), l’izba, était pourvue d’un lit, d’une table, de bancs, de chaises, d’étagères, d’armoire d’angle, d’objets décoratifs comme des articles en bois décorés de sculptures ou de peinture sur bois ainsi que les petits ustensiles de cuisine en bois comme le casier support pour les cuillères à soupe – lyžičník ; les récipients à épices; les planchettes à découper – lopár, le fouet mélangeur – habarka que l’on fait tourner en se frottant les mains, pilon, plat…

Lorsqu’il y avait un bébé, le berceau était à proximité du lit des parents, soit accroché au plafond, soit posé au sol.

On retrouve un endroit particulier dans l’izba, le coin sacré – svätý kút en slovaque. C’est le coin d’apparat ou d’honneur. Il se trouve à l’opposé du coin où se trouve le poêle, souvent c’est à cet endroit, près de la fenêtre, au sud, que l’on place la table et l’étagère des icônes où des peintures saintes, selon le rite, sur verre, sur toile, sur papier ou d’autres objets « sacrés » pour les habitants du lieu comme la toile brodée, la gerbe de la dernière moisson…

Dans la cuisine, on retrouvait bien entendu les différents ustensiles de cuisine comme des plats en terre cuite. On y trouvait les pots à lait en argile avec une anse – mliečnik, les divers pots à eau, cruche, pichet, bassine, casserole, conçus pour la cuisine, le stockage de lait et de levure. De même que les pots de grès ou en faïence, les pots à ventre avec poignées ou les pots à col étroit. On y trouvait aussi l’évier moulé pour stocker l’eau potable dans le froid pour le travail du terrain, des bols en faïence, en grès, ou encore des pots en étain, en cuivre, en porcelaine ou d’autres contenants métalliques à corps bulbeux, utilisés pour le stockage à court terme de boissons, de liquides et d’autres récipients dont le ballon était plus étroit (pour emporter lors de déplacement, de voyage) et des bouteilles en verre pour l’alcool. S’y trouvait encore la truhlica – le coffre ou la boîte en bois, le súdok – un tonnelet en bois ou en grès pour la choucroute.

La finition intérieure comportait des tableaux, des peintures sur verre à motif religieux, Madone, saints patrons… mais aussi des motifs à caractère populaire comme les motifs de Jánošík en rappel à la légende de Janošik, des chiffres en forme de fleurs…

Sur les étagères, on plaçait des poteries peintes, mais on déposait aussi la literie – les oreillers et la couverture avec des motifs tissés ou en tissus coloré ou imprimés bleu-indigo.

Et, bien entendu, une partie de la décoration des logements était composée de sculptures populaires en bois : jouets, personnages civils ou de personnages saints de Bethléem comme Madone, Pietà, saints bienfaiteurs…

A l’intérieur encore, les troncs étaient soit laissé « brut » soit, pour récupérer les « bosses », enduit d’un plafonnage composé d’argile et peint ensuite avec de la chaux blanche ou tout simplement enduit de chaux. La chaux était utilisée pour son effet antiseptique et aussi parce qu’elle laissait « respirer » la cloison et empêchait la condensation de la vapeur d’eau.
Mais, auparavant, afin de rendre étanche aux vents les interstices entre les troncs, ces espaces étaient complétés soit de mousse végétale, soit d’une latte coupée en triangle ou soit encore, le procédé le plus courant, d’une corde de chanvre tressée chassée dans l’interstice du joint.

Le sol

Le sol de la partie habitée consistait le plus souvent en un plancher en bois sur lequel un (ou plusieurs) tapis était posé.

Mais le sol était parfois en terre battue, lissée. Parfois, un tapis posé à même la terre améliorait le confort de cet intérieur d’habitation.

Les parties « non-habitables » de la maison comme le cellier, le débarras, l’atelier… étaient, la plupart du temps, en terre battue.

Le toit

Le plus ancien type de matériau de couverture fut l’écorce d’arbre, qui une fois déposée sur le toit de la maison, était complétée par des roches plates ou, parfois, par de la mousse végétale voire du gazon séché.
Plus tard, les hommes ont utilisé un revêtement plus durable et notamment les bardeaux de bois – šindeľ en slovaque, qui sont devenu une des caractéristiques de l’architecture en bois.

Dans certaines régions, on utilisait la paille, comme pour les maisons des Habáni – Anabaptistes à Velké Leváre ou encore des roseaux, en particulier dans le sud de la Slovaquie, dans la plaine du Danube.

L’eau pluviale qui ruisselle sur les versants n’est pas toujours canalisée par une gouttière au pied du versant de la toiture. Ce pied de versants débordent largement des murs, de cette façon l’eau est rejetée à distance des murs (c’est le principe de la gargouille dans la construction des cathédrales). C’est aussi pour cette raison que le soubassement de la maison est réalisé en pierre.

L’autre partie de la maison comportaient les bâtiments agricoles, la grange, le grenier à blé et/ou à pommes de terre, la fosse à grains de blé…

Dans le village de Martinček, près de la ville de Ružomberok, on peut voir sur la colline, en-dessous de l’église gothique Saint-Martin (3), 35 petites constructions étranges. En fait, ce sont de petits toits en bois, appelés dáška (des dášky) mot dérivé de l‘allemand dach – petit toit qui couvrent une fosse de 5 mètres de profondeur environ et qui servent, pour les habitants, au stockage de pommes de terre ou de légumes.

PS : vous pouvez découvrir ces constructions de maisons dans le village classé au Patrimoine de l’UNESCO de Vlkolinec mais aussi dans le village de Podbiel… auprès des remarquables églises en bois de Sväty Križ, Kežmarok, Hervartov, Ladomirová… et, bien entendu, dans les Musées de plein air – Skanzen où là vous pouvez aussi pénétrer à l’intérieur de certains bâtiments.

Notes

1 Certains bleus comme le « bleu de Prusse » ou le « Pastel des teinturiers » sont connus pour leur qualité d’action répulsive contre les insectes.

2 L’izba, la chambre « traditionnelle » prise dans le contexte de l’habitation est la pièce de vie,  c’est pour nous, notre « living room, notre pièce de séjour ».

3 Cette église dédiée à saint Martin comporte de très jolies fresques d’origine (13e – 14e siècle).

Cet article en pdf : Slovaquie, batiments en Bois

Sources

Perly ľudovej architektúry. Miroslav Sopoliga. DINO. 1996

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Le monde mythologique russe. Lise Gruel-Apert. Ed. Imago. 2014

Une histoire symbolique du Moyen Age occidental. Michel Pastoureau. Ed. du Seuil. 2004

Histoire de l’habitation humaine. Viollet-le-Duc. Ed. Pierre Mardaga. 1978

 

 

Découvrir la Slovaquie

Charles Bugan – Mgr Alice Hura

La Slovaquie – Slovenská republika – est une jeune république. Indépendante depuis le 1er janvier 1993 située au centre de l’Europe et est membre de l’Union Européenne depuis le 1er mai 2004. L’Euro est devenu la monnaie officielle depuis le 1er janvier 2009.

On peut dire que la Slovaquie est un pays mosaïque. Une mosaïque composée d’une nature, flore et faune, très diversifiée et composée de forêts, de prés, de vergers, de montagnes, de vignobles, de hameaux, de villages, de petites et grandes villes, de villes d’eau, de lacs naturels ou artificiels, de parcs naturels, de grottes, de musées en plein air appelés skanzen, de splendides églises en bois, de châteaux, d’églises romanes, gothiques… Tous ces éléments ont forgé ce petit pays de 49.036 km2 et de 5.432.438 habitants (1) où l’art populaire et la culture sont mis en valeur aux travers de différentes activités tout au long de l’année.

Géographiquement, la Slovaquie est au centre de l’Europe et est entourée par l’Autriche, la Tchéquie, la Pologne, l’Ukraine et la Hongrie.

Le Danube, venant de Vienne, passe au pied des ruines du château de Devin, près de Bratislava, qui surplombe le confluent de la Morava et du Danube. Le Danube va ensuite continuer son parcours vers la capitale de la Slovaquie, Bratislava, où il passera au pied du château de Bratislava, notamment habité, au milieu du 18e siècle, par l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche alors « roi de Hongrie » et aujourd’hui restauré ainsi qu’au pied de la cathédrale gothique Saint-Martin, avant de poursuivre son cours vers l’écluse et la centrale hydroélectrique de Gabčíkovo avant de quitter le territoire slovaque après la ville frontière hongroise d’Esztergom.

Les rivières les plus importantes sont le Váh d’une longueur de 403 km de long et le Hron ,298 km, qui prennent leur source dans les Tatras et qui se jettent dans le Danube.

Les montagnes, à l’Est de la Slovaquie, font partie du massif des Carpates. Le point culminant est le mont Gerlach – Gerlachovský štít – 2655 m situé dans les Hautes Tatras – Vysoké Tatry. Le parc national des Basses Tatras – Nízke Tatry – est le plus grand parc national de Slovaquie et le Parc du Paradis slovaque – Slovenský raj – protège la zone de Karst slovaque et compte l’une des plus grandes grottes glaciaires du monde. De plus, sur le territoire slovaque on compte 9 parcs nationaux et 16 zones territoriales protégées.

L’architecture populaire est mise en valeur dans plusieurs villages comme à Podbiel, Čičmany et surtout dans les skanzens, les musées en plein air qui permettent de découvrir le cadre de vie des habitants et les constructions en bois, matériau de constitution privilégié par la quantité importante des forêts d’une grande partie de la Slovaquie. En saison, de nombreuses activités folkloriques se déroulent dans ces musées en plein air.

De nombreux châteaux, souvent les ruines, côtoient les castels et manoirs. La liste est trop longue mais nous en citerons trois : le château romantique de Bojnice – Bojnický zámok, le château d’Orava – Oravský hrad et le manoir de Betliar qui sont des lieux incontournables.

Le vin et la bière font aussi partie du patrimoine slovaque. Dans les Petites Carpates près de Bratislava se perpétue une tradition viticole vieille de 700 ans, comme dans la région de Nitra, sans oublier le Tokaj slovaque dans la région de Zemplin ni la medovina.

Autre partie de la mosaïque, les églises romanes, gothiques et les églises en bois avec leurs caractéristiques suivant le rite pratiqué : greco-catholique, catholique romain, orthodoxe et les églises articulaires protestantes qui sont le reflet d’une partie du passé historique de ce pays.

Puisque nous évoquons le passé historique de la Slovaquie, nous terminons cette brève présentation du pays par un passé plus récent, la deuxième guerre mondiale. Dans la ville de Banská Bystrica se trouve le musée SNP – le Soulèvement national slovaque du 29 août 1944 auquel des partisans français ont participé (2) et les sites de Dukla près de la ville de Svidnik.

UNESCO

Sept sites sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial culturel et naturel de l’UNESCO :

1 Banská Štiavnica – ville historique avec des monuments techniques dans les environs (1993)
2 Château-fort de Spiš (Spišský hrad) et ses monuments culturels associés : de Spišská Kapitula et de Spišské Podhradie, l’église médiévale de Žehra, le site Dreveník, la ville historique de Levoča et les œuvres de Maître Paul de Levoča (1993)
3 Bardejov – réserve de conservation du centre historique de la ville (2000)
4 Vlkolínec – réserve d’architecture vernaculaire du village en bois près de Ružomberok (1993)
5 Grottes du Karst slovaque (1995)
6 Forêts primaires de hêtres des Carpates (2007)
7 Églises en bois de la zone des Carpates (2008)

Bref de quoi satisfaire la curiosité de plus d’un touriste.

Et tout cela sans parler de la gastronomie…

Voyager en Slovaquie

Se restaurer

Krčma, Hostinec, Koliba, sont des auberges qui proposent des repas traditionnels et qui sont ouvertes souvent tôt le matin et ferment tard (22h00). Quant aux Salaš – Bergeries ce sont des fermes-restaurants combinant l’élevage de brebis et la restauration – parfois le logement -. Ces bergeries proposent des produits de leur fabrication Halušky, Pirohy, Goulash de mouton…

Camping, logement chez le privé – Pension

A Liptovská Mara notamment, autour du lac du barrage, il existe plusieurs possibilités de camping de même que près du Paradis slovaque.

Le logement chez le privé – zimmer frei, sukromny – est assez répandu dans le pays.

Les pensions sont très fréquentes aussi.

La location de logement est un peu plus rare, mais il en existe de très beaux. Voyez, par exemple, sur le site www.panskydom.sk et cliquez sur « chalupa » dans Ubytovanie, vous découvrirez quelques photos. Ce logement peut accueillir de 6 à 10 personnes.

Sports d’hiver

Les stations des Hautes Tatras – Štrsbské Pleso, Starý Smokovec ; des Basses Tatras, Jasná ; des Fatras (Grandes et Petites) – Donovaly, Ski Park Ružomberok… disposent de toutes les infrastructures et sont très fréquentées.

Rafting et descente de rivières sont possibles

Infos pratiques

Magasins – musées

Fermeture des magasins le samedi à midi, sauf les grandes surfaces qui sont aussi ouvertes le dimanche (Kaufland, Tesco, Billa, Coop Jednota, CBA, Lidl…). De plus, ces magasins fonctionnent souvent de 6h00 à 22h00.

Le lundi est généralement le jour de fermeture des musées.

Sur la route

Alcool interdit pour les chauffeurs, tolérance zéro.

Il est obligatoire de rouler les phares allumés (feux de croisement).

Vignette obligatoire pour emprunter les autoroutes

Il s’agit maintenant d’une vignette électronique que l’on peut acquérir dans les stations-services. On vous demandera votre carnet d’immatriculation afin d’enregistrer votre immatriculation qui sera reprise sur le document papier, preuve du paiement, qui vous est remis. Il n’y a donc plus de vignette à coller sur le pare-brise.

Voir https://eznamka.sk/selfcare/purchase/

Prix de la vignette autoroutière en 2017

10 jours : 10 €

Un mois : 14 €

Un an : 50 €

PS : si vous souhaitez des renseignements n’hésitez pas à nous solliciter via notre adresse mail : www.vaheurope@gmail.com.

Nous vous garantissons une réponse dans les 48 heures

Notes

1 Chiffre au 17 janvier 2017 selon http://countrymeters.info/fr/Slovakia

2 Lire nos articles :

« Célestin Joubier, porté disparu » http://vaheurope.eu/?p=152

« Le monument de Strečno » http://vaheurope.eu/?p=255

« 29 août, jour du Soulèvement national slovaque SNP » : http://vaheurope.eu/?p=236

Photos : Alice Hura et Charles Bugan

Sitologie

http://slovakia.travel

http://www.muzeum.sk

http://www.muzeumsnp.sk

http://www.vhu.sk/dukla

http://www.drevenechramy.sk/drevene-chramy

http://www.tokaj.sk/

Sources

Ottova praktická encyklopédia Slovensko. Ottovo Nakladateľstvo. 2008

Slovaquie en bref. Ján Lacika. Ed Vydavateľstvo Príroda. 2005

L’Épiphanie en Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

En Slovaquie, comme dans plusieurs régions d’Europe centrale et orientale, à la période de Noël est affirmé un réel éclat de traditions masquées (1). On y rencontre des coutumes qui prennent la forme de jeux rituels, de spectacles bibliques, allant du passage de chanteurs de cantiques de Noël et de porteurs de Crèches de Bethléem ou de l’Étoile de Bethléem aux tournées des Rois mages à l’Épiphanie.

En Slovaquie, l’Épiphanie est appelée Traja králi ce qui signifie les Trois rois. C’est la fête du 6 janvier (2) qui tenait une grande place parmi les solennités de l’année chrétienne depuis l’époque médiévale.

Selon la tradition d’autrefois, les drames liturgiques représentant l’arrivée des Rois mages Gaspard, Melchior et Balthazar à Bethléem, guidés par l’étoile, venus d’Orient et qui apportaient à l’Enfant Jésus de riches présents, furent mis en scène tout d’abord dans les grandes églises des villes royales. Les rôles des personnages bibliques étaient joués par des instituteurs, des étudiants et des élèves.

En Slovaquie, la coutume de jouer la représentation théâtrale de la légende biblique, les mystères de Noël ou l’Adoration des Mages, en vogue depuis le milieu urbain médiéval s’est répandu au cours des siècles suivants dans le milieu rural. Là, le jeu biblique est alors devenu très populaire et s’est enrichi de nombreux chants populaires et de formes de souhaits en formules parlées. Souvent, la version était quelque peu modifiée localement, par exemple un texte était de plus courte durée, les rôles des personnages variaient, les épisodes de pièces différentes étaient combinés… Ils existent ainsi de nombreuses versions locales de jeux bibliques populaires des Trois Rois mages.

C’est probablement la légende Historia trium regum écrit en 1364 (3) par un moine de l’Ordre du Carmel Johannes Hildesheim (1310 – 1375), qui a créé le profilage de la fête des Rois mages dans les pays germaniques et donc aussi, indirectement, dans les régions slovaques habitées dans le passé par des communautés allemandes.

Selon l’ethnographe slovaque renommée Sonia Kovačevičová (1921-2009), le spectacle des Mystères de Noël a commencé à être joué dans les rues de la ville de Bratislava (anciennement Presbourg) en 1439. Auparavant, les Mystères de Noël étaient joués dans les églises de cette ville. Puis, d’autres villes vont suivre l’exemple et laisser jouer ce spectacle. A l’époque ce sont les villes royales libres de Bardejov, de Prešov, de Levoča, de Kežmarok

La coutume du cortège des Trois Rois mages dans les campagnes slovaques

Le cortège populaire des Trois Rois parfois appelé la Marche avec l’Étoile était, dans certaines régions slovaques, avec quelques différences toutefois, très répandu dans presque toute la Slovaquie mais surtout en Slovaquie centrale et orientale.

Anciennement, on fêtait l’Épiphanie par l’arrivée de trois jeunes hommes ou jeunes garçons déguisés en Rois mages. Ils allaient de maison en maison en récitant ou en chantant des poèmes qui paraphrasaient la légende du Nouveau Testament commémorant l’Adoration des mages à peine l’enfant Jésus né.
Pour ce cortège, les garçons portaient sur le corps une longue chemise blanche, sur la tête une haute couronne ornée d’une croix et ils tenaient à la main un bâton, parfois ils portaient un petit modèle en bois de la Crèche de Bethléem.

La soirée du jour des Trois Rois était l’occasion d’une fête pour la jeunesse slovaque, laquelle organisait un festin collectif.

La quête du cortège du clergé catholique

Encore aujourd’hui, pour l’Épiphanie en Slovaquie, il existe une tradition qui est « le cortège du curé avec les servants d’église ». Ils font du porte à porte auprès des demeures catholiques et vont bénir les maisons et écrire sur le dessus des portes des maisons trois lettres G – M – B. Il s’agit des initiales des rois mages Gaspard, Melchior et Balthazar. Ils ajoutent à ces trois lettres le millésime, ce qui donne pour cette année : G – M – B – 2017 (4)

En Slovaquie, le 6 janvier, le cortège des Trois rois mages visitant des maisons, les gens disaient « qu’ils contrôlaient l’inscription des initiales G – M – B sur les portes ». Là où ils ne trouvaient pas cette inscription ils apportaient, prétendument, tout bonheur à la famille !

Déjà au 16e siècle, l’Église protestante interdit les quêtes du clergé protestant à l’Épiphanie. Au premier tiers du 19e siècle, Jan Kollar (1793-1852), pasteur protestant, poète et collectionneur du folklore slovaque a publié de 1834 à 1835 une critique dans son œuvre Narodnie spievanky. Il s’agit d’un recueil de chants populaires, qui contient 2675 chants populaires slovaques collectés par Jan Kollar dans les dix comitats de ce qui était alors la Haute Hongrie, donc sur le territoire de la Slovaquie actuelle. Je cite : « Que chez les slovaques, la Koleda est devenue une coutume de quête ecclésiastique, selon laquelle, prêtre, recteur, sacristain, certains chanteurs du chœur et des fidèles, les hottes sur le dos, circulaient à la Nouvelle année dans les rues du village et de la ville, de porte en porte des maisons en chantant des chants religieux et en collectant de l’argent et des provisions ».

Les spectacles bibliques

Une forme ancienne des coutumes de Noël du 18e siècle d’un genre de spectacle biblique popularisé dans le milieu rural de l’ancien comitat de Zvolen (en Slovaquie centrale) est enregistrée. Selon les sources ethnographiques publiées récemment, les acteurs de ce spectacle biblique, en forme de jeu populaire, étaient la jeunesse du village qui se rassemblait en cortège des Trois Rois.
Les jeunes gens déguisés avaient en rôles principaux : un Ange, habillé d’un vêtement long blanc ceinturé et ayant sur le dos deux ailes d’oie. Il tenait un bâton sur le bout duquel se trouvait une étoile en papier et une chandelle de cire allumée qui faisait comme un lampion. Deux autres personnages, des bergers, appelés Kubo et Lauro, portaient des vêtements de bergers de la région. Un personnage biblique, Joseph, vêtu d’une pelisse de fourrure de mouton ceinturé par un cordon de paille tressée, portait sur la tête un bonnet de fourrure de mouton, et il maintenait sur l’épaule, une grosse trousse pour les cadeaux. Le personnage biblique de Marie, vêtue d’un costume féminin, tenait dans ses bras un petit berceau avec une poupée d’enfant. Les trois rois, Gaspard, Melchior et Balthazar, étaient vêtus de costumes luxueux et ils avaient le visage noirci de suie de fumée. Ce groupe visitait les maisons, les fermes. Ils se présentaient dans la cour de la maison et jouait le spectacle. Placés autour d’une scène biblique, ils récitaient des vers traditionnels de bonheur et de prospérité, de fertilité et de fécondité pour tous, bétail compris, pour l’année qui commence.

Les cortèges avec l’Adoration des Mages, joués le jour de l’Épiphanie, et la fête des Rois clôturaient les réjouissances du cycle des douze jours qui préfiguraient le Carnaval.

Dévotion à la crèche de Bethléem en Slovaquie

Le jeu populaire de la légende de l’Annonce aux bergers trouve son origine dans l’évangile de Luc 2, 6-20, quant aux « mages » c’est dans Matthieu 2, 1-11 (5).

Les bergers se rendirent à Bethléem, et c’est ainsi qu’existe une adoration des bergers qui fait pendant à l’adoration des Rois. Toutes ces légendes étaient très populaires sur le territoire slovaque et cela a donné la Marche avec l’Étoile de Bethléem, une étoile fixée sur un long bâton

Les Jeux pastoraux de Bethléem interprétés par les bergers slovaques

Les récits populaires représentant le scénario de l’Annonce aux bergers et leur arrivée à la crèche de Bethléem trouvent leur origine dans les pièces liturgiques médiévales, cependant, elles étaient enrichies par une humeur apportée par des éléments particuliers de la culture populaire slovaque même s’il est évident que le scénario, quoique réduit à une synthèse de quelques gestes répétitifs, était profondément symbolique.

Lors du déroulement de la fête dans les régions montagneuses slovaques, le cortège des bergers faisait du porte à porte dans le village en récitant des poèmes de Noël, en chantant et en dansant dans la « chambre » (6) de la maison, devant la toute famille. À la fin de la représentation, on leur offrait des friandises ou de l’argent.

Dans la région de Turiec, habitée à majorité par les protestants, c’était le cortège des jeunes bergers de la région d’Orava, pourtant catholiques, portant la Crèche de Bethléem (7). Ils visitaient les maisons des villages ou ils étaient aussi invités par des familles évangéliques protestantes. Les bergers d’Orava porteurs de la Crèche étaient vêtus d’un pantalon de drap blanc et tenaient en main un bâton. Ils chantaient en dansant en tournant comme dans une ronde et ils marquaient le rythme en frappant avec le bâton sur le sol. Ce spectacle était scandé par la récitation de souhaits de bonheur, de prospérité et de la bénédiction divine pour la santé de leurs hôtes.

Les personnages principaux du jeu de l’Annonce aux bergers, étaient l’Ange représenté par un garçon déguisé, vêtu d’une longue chemise blanche avec des ailes sur le dos et portant un modèle de Crèche de Bethléem en papier peint ou en bois sculpté. Les autres personnages étaient vêtus du costume populaire traditionnel des bergers, avec dans le rôle de Chef-berger, Bača, et trois personnages dans le rôle des Bergers valaques sous les noms de Stacho, Fedor et Kubo, ce dernier représentant un « pauvre » gars du village (8).
La structure du jeu des bergers était la même partout. Le jeu était interprété par cinq acteurs, souvent des paysans du village. L’événement du jeu se déroule depuis le moment où l’Ange leur annonce qu’un enfant merveilleux est né. Les acteurs du jeu de bergers chantent un refrain très populaire au temps de Noël dont voici pour exemple un chant de la région de Liptov :

Pásli ovce valasi
pri Betlemskom salaši,
hajdom, hajdom, tidlidom.
Anjel sa im ukázal
do Betlema ísť kázal,
hajdom, hajdom, tidlidom.
Vstante hore a iďte,
Pána Krista nájdete.
Nájdete ho v jasličkách,
ovitého v plienočkách,
hajdom, hajdom, tidlidom!

Que l’on peut traduire par :

Les bergers gardent les moutons près de la bergerie de Bethléem, hajdom, hajdom, tidlidom ;
L’Ange leur est apparu et leur disant d’aller à Bethléem, hajdom, hajdom, tidlidom ;
Il dit : Réveillez-vous, allez hajdom, hajdom, tidlidom ;
Le Seigneur Jésus-Christ vous le trouverez, hajdom, hajdom, tidlidom ;
Vous le trouverez dans la crèche, emmailloté dans un petit maillot, hajdom, hajdom, tidlidom !

Les superstitions

Voici quelques superstitions en rapport avec le jour de l’Épiphanie

L’eau bénie ce jour était ajoutée à la nourriture pour le bétail par les paysans,

La chandelle bénie, appelée la chandelle des Trois Rois, était allumée près du lit d’un mourant ou en temps d’orage,

Le cercle qui était dessiné par la craie bénie devenait un endroit sécurisant qui empêchait l’entrée des puissances obscures néfastes. Avec cette craie bénie était dessinée une ligne de contour autour de la porte et des fenêtres des étables pour empêcher aux sorcières l’entrée dans l’étable du bétail,

L’ail béni étaient porté par les gens qui étaient obligé de se déplacer sur l’eau, de traverser un gué. Cet ail était un moyen efficace contre les esprits néfastes de l’eau – Vodník – esprit des eaux, Maître des eaux douces dans les contes populaires.

Tous moyens bénis le jour de la Fête des Trois Rois étaient utilisés par les gens soit contre les mauvaises et néfastes puissances comme les enchanteresses, les sorcières, les démons, les esprits de l’eau…, soit contre une catastrophe naturelle comme tempête, sécheresse, inondation, grêle… et les incendies.

Autrefois, dans la vallée du Hornád, les habitants ruraux très superstitieux apportaient à l’église pour la bénédiction du jour de l’Épiphanie, une petite cruche contenant de l’eau et un panier contenant divers éléments comme du sel, de la craie, de l’ail, de l’oignon, de la pomme de terre, des graines de blé. Ces éléments étaient une partie des plats exposés sur la table de Noël, éléments auxquels on ajoutait un morceau de pain de Noël duquel on avait prélevé la mie remplacée alors par des miettes des gâteaux de Noël et des coquilles de noix. Au printemps, ils plaçaient le contenu de ce panier béni dans le premier sillon labouré du champ, ainsi le blé était semé et la pomme de terre était enterrée.

La coutume de la bénédiction de l’eau, du sel et de la craie à l’Épiphanie est encore pratiquée de nos jours dans les églises slovaques.

En Slovaquie, l’Église gréco-catholique fêtera le 6 janvier l’Apparition de Jésus-Christ aux Rois mages, c’est une grande fête de la religion uniate.
L’Église orthodoxe slovaque, célébrera ce 6 janvier la Nativité de Jésus-Christ, la Fête de Noël, selon l’ancien calendrier julien.
Pour l’Église catholique slovaque, le 6 janvier, et selon les anciennes coutumes, on procèdera à la bénédiction divine de la Fête des Rois mages des objets apportés par les fidèles. C’est ainsi que dans les églises sera béni l’eau, l’ail, une chandelle de cire, une craie blanche et parfois aussi le sel.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Notes

1 En Europe centrale et dans les Balkans, les termes « masques, masqués » ne désignent pas seulement ce qui déguise le visage mais tout un ensemble.

2 La date de la Nativité a été, en 354, à Rome déplacée du 6 janvier au 25 décembre. Le 6 janvier deviendra alors la date de l’Épiphanie.

3 Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Zuzana Drugová.

4 C – M – B, ces initiales peuvent être interprétées comme celles des Rois mages : Caspar (ou Gaspar), Melchior et Balthasar, mais peuvent également être lues comme l’acrostiche de « Christus Mansionem Benedicat », « que Christ bénisse cette maison ».

5 Le mythe des Mages fut très prisé dans les Églises du Proche-Orient, et sans doute « prescrite » sous l’influence de l’Église perse, avec l’inspiration de textes « apocryphes » comme le Protévangile de Jacques ,l’Évangile de l’enfance, les Actes de Thomas et surtout l’Opus imperfectum in Mattheum attribué à saint Jean Chrysostome. Dans la Légende dorée de Jacques de Voragine, lire « La nativité de N.S. Jésus-Christ selon la chair » et « l’Épiphanie du Seigneur ».

6 Comme déjà dit dans un article précédent, le terme « chambre » doit être compris dans ce contexte comme « pièce de séjour ».

7 L’invitation a présenter dans cette région majoritairement protestante le spectacle de la « Crèche de Bethléem » par des jeunes bergers catholiques de la région d’Orava vient du fait que ce spectacle n’existant pas chez les protestants, c’étaient les jeunes bergers venant de la région d’Orava qui assuraient la représentation. La plupart de ces bergers étaient et seront les travailleurs saisonniers chez les riches propriétaires protestants de la région de Turiec.

8 Kubo est un personnage, un homme, pas très propre, jovial, un peu « benêt » revêtu d’une veste de mouton à l’envers, il porte sur la tête un vieux chapeau de berger en mouton, son visage est noirci de suie de fumée. C’est un personnage mi-homme mi-animal (le chien du berger ?). Kubo symbolise le sans-souci, la simplicité, il fait des « bêtises ». Mais à un moment de leur danse, Bača, Stacho et Fedor vont former un triangle, tenant leur bâton à bout de bras vers le haut et Kubo est couché sur le sol au centre, sous la protection des bâtons des bergers. Le nom de Kubo est dérivé du prénom Jakub.

Voir la remarquable vidéo Vianoce v Karpatoch  par le Ballet folklorique national slovaque Lúčnica sur youtube (lien ci-dessous).

www.youtube.com/watch?v=NjYRU8pWYDo

Sources

Ľudová kultúra. Zuzana Beňušková. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009.

Les Fêtes de Dieu. La foi, l’histoire, les mythes. Guy Deleury. Ed. du Félin. 1994

Dictionnaire d’iconographie romane. Marc Thoumieu. Ed. Zodiaque

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976

1er janvier, nouvelle année

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Le Nouvel an en Slovaquie

Le 1er janvier est considéré comme le début de l’année, mais ce n’était pas le cas autrefois. Ce n’est qu’à partir de 1582 que la date du Premier janvier a été officiellement introduite par le pape Grégoire XIII pour être abandonnée puis réintroduite par le pape Innocent XII en 1691.

C’est en 1587, que la date du calendrier grégorien est officiellement adoptée dans le Royaume de Hongrie et, bien entendu, sera en vigueur sur le territoire de la Slovaquie actuelle, l’ancienne Haute Hongrie.

Ce changement a eu un effet rapide dans les coutumes traditionnelles de la culture populaire slovaque. En effet, la conséquence de ce changement de calendrier annuel, fut que les coutumes et les rituels auraient lieu dorénavant pendant la période du nouvel an, entre le 25 décembre et le 6 janvier, alors qu’ils commençaient auparavant à la fin du mois de Novembre. Selon les ethnographes, à cause de ce changement de date, les coutumes et rites liés au Premier janvier se sont déplacés à cette nouvelle période tout en respectant les traditions précédentes dont ils ne sont, en principe, que leur répétition.

Les rites fixés au début de la matinée au Nouvel an

Le rituel du lavement et du nouveau feu dans le foyer

Sur tout le territoire slovaque cette coutume du lavement était pratiquée de bon matin du premier jour de la nouvelle année.

Selon la coutume de ce jour-là, l’homme – le maître de maison – en sa qualité de « premier de famille » se levait tôt le matin pour apporte l’eau fraiche à la maison. Selon les localités slovaques, c’est le fils cadet de la famille, qui allait, tout de suite après minuit, chercher l’eau du puits ou du ruisseau dans un seau en bois.

Le maître de maison souhaitait alors le « Bonjour » en récitant la formule magique : « Prv je voda než oheň, daj, Bože dobrý deň » que l’on peut-être traduire par : « L’eau était la première avant le feu, donne, Bon Dieu le Bon jour ». Le maître de maison va alors tremper un rameau dans cette eau et asperger la maison en commençant par le toit et l’étable en récitant cette formule magique de façon à assurer la protection contre les incendies, fréquents auparavant dans les maisons en bois du village. Puis, tous les membres de la famille se lavaient rituellement, chacun à leur tour, avec l’eau apportée dans le seau dans lequel on avait précédemment jeté, selon la localité, une pièce de monnaie pour la richesse et une pomme pour la santé ou au lieu de la pomme, on ajoutait du raifort pour la force (1).
Le rituel du « lavement » de la famille avait pour but d’assurer l’unité familiale.

Une variante de ce rite voulait qu’avant d’asperger la maison et l’étable, le maître de la maison aspergeait les membres de la famille et la chambre (2).

La puissance magique de cette matinée se retrouvait aussi avec le miel. Dans ce rituel, la mère de famille, marquait le front de chaque membre de la famille avec du miel, ainsi que la porte de la maison. On croyait que le miel était une fortune, un cadeau de joie.

Après le lavement rituel de la famille, le maître de maison allumait le feu dans le foyer et allumait la lumière de la maison.

Dans la région de Hont, de bon matin, le maître de maison, entrait dans l’étable des vaches et constatait selon la position des vaches si elles avaient été visitées pendant la nuit magique par les sorcières : si elles étaient couchées, tout était en ordre, mais si elles étaient débout, le maître de maison raisonnaient qu’elles avaient été inquiétées la nuit par les sorcières.

Les superstitions

Dans la région ethnographique de Horehronie, on croyait que le rêve du sommeil de la nuit de la Saint-Sylvestre à la Nouvelle année deviendrait réalité puisque cette nuit avait une puissance magique.

Les gens croyaient que le premier jour de l’année marquait toute l’année « tant au Nouvel-An, et tant tout l’an ». Donc, les gens faisaient attention à la manifestation d’émotions négatives ce jour-là : ils se ne querellaient pas, ils ne pleuraient pas… La fille à marier croyait que si elle tombait trois fois, ce qui n’était pas rare par ce temps en plein hiver sur le verglas, que dès lors, son nom « tomberait » trois fois à l’annonce du mariage de la chaire à l’église et qu’elle allait alors se marier dans l’année (3).

Au Nouvel an, il faut bien faire attention que la maison soit propre, sans saleté et tout rangé en ordre, chez les gens comme pour le bétail.
Comme pour d’autres moments de la période de l’avent, nous l’avons vu dans les articles précédents, il y avait l’interdiction de certains travaux féminins : pas laver la lessive et pas suspendre du linge sur un séchoir. Les femmes ne cousaient pas, car c’était une interdiction superstitieuse de prévention afin que les poules pondent bien (4) de plus, si par malheur une femme pratiquait un tel travail, ses doigts allaient devenir purulents.

La visite d’une femme tôt le matin du nouvel an était mal perçue, de même que la visite d’un malade ou d’un vieux. C’est pour cette raison que dans certaines localités autour de la ville de Bardejov, tout de suite après minuit, des musiciens tsiganes jouaient sous les fenêtres des maisons du village afin d’apporter de bons signes pour la nouvelle année.

De même, tôt le matin, la visite à la maison par une personne étrangère était aussi mal perçue. Si la visite était nécessaire, le visiteur devait apporter à la maison un gâteau ou de l’argent, de cette façon, il proclamait qu’il apportait non un dommage mais un avantage pour la maison visitée

La météo prémonitoire

Les prévisions météorologiques étaient fréquentes au jour de Nouvel-An, en voici deux :
– si au début de la matinée l’aurore est bien rouge, l’année nouvelle sera marquée par des tempêtes et par de mauvaises récoltes.
– une pluie fine mais intensive annonce de bonne récolte dans les champs et il y aura de gros épis de blé.

Les quêtes matinales du Nouvel-An par les jeunes hommes

De bon matin, un cortège de garçons faisait la tournée traditionnelle du village et ils présentaient leurs vœux en récitant en vers des vœux de bonheur et de bonne santé…
Dans certaines localités, les garçons après leurs arrivées à la maison, jetaient des graines de blé sur le seuil de maison, pratiquant ainsi un rite visant à assurer la prospérité de la maison visitée.
Dans la Slovaquie centrale, les récits de vers amusant de bonheur et de bonne santé de la nouvelle année était très répandu. Voici par exemple un vœu teinté d’humour : « Vinšujem vám šťastlivý nový rok, aby vám odpadol z pece bok a z povaly hrada, aby sa vydala vaša dievka mladá » qui peut être traduit par : « je vous souhaite une heureuse nouvelle année, afin que tombe votre coin de feu – du four – et une poutre du plafond afin que votre jeune fille se marie ».

Dans le village de Rača, aujourd’hui un quartier de la capitale slovaque Bratislava, le fossoyeur de la commune accompagné de sa famille faisait la tournée de quête. Ils prononçaient des vœux de bonne année et obtenaient des victuailles – farine, vin, pommes de terre, saindoux, œufs…

Dans la région du nord d’Orava, de Spiš et de Horehronie, on cuisait une pâtisserie spéciale pour les quêteurs de Nouvel an, appelée novelátka ou novoročátka dans la région d’Orava.

Après le lever du soleil les voisins se rendaient visite en prononçant des vœux de bonne année et se tendaient la main. Alors, commençait le temps de paix, il arrivait même que des voisins en courroux l’un envers l’autre buvait le verre d’amitié en cette matinée du Nouvel An.

Le jeu d’Adam et Eva chassés du Paradis

Avant ce jeu était connu comme le cortège avec le serpent. Il s’agit d’un jeu selon un épisode biblique popularisé en Slovaquie depuis le Moyen Âge mais tombé en désuétude au milieu du 20e siècle.
La pièce était inspirée de l’Ancien Testament, chapitres 2 et 3 de la Genèse, consacré à la Création. La base du drame est le chant populaire au motif liturgique illustrant la création d’Adam et Éve au Paradis. Les vœux du cortège étaient prononcés par de petits garçons, de 10 à 12 ans, portant un accessoire théâtral qui était appelé le serpent. Ce « serpent » avait une tête de serpent en bois, le corps plié en accordéon. Il était porté par deux garçons qui le tenaient tel un accordéon pendant leur chant. Ce serpent portant une petite couronne avec une bougie allumée sur la tête et sur sa langue la pomme, symbole du fruit de la Tentation du jardin d’Éden. Le jeu était joué au temps de Noël et surtout au Nouvel An de porte en porte dans les villes de Krupina, de Banská Bystrica, de Banská Štiavnica et de Ružomberok, où les petits acteurs étaient récompensés.

Superstitions culinaires

Le repas du Nouvel-An était et est soigneusement préparé, sur la table ne manquent pas la viande de porc symbolisant la prospérité, MAIS la viande de volaille et de lapins était interdite car selon la croyance populaire, la fortune allait s’envoler ou courir loin de la maison après la consumation de ces viandes.

Par ailleurs on préparait, prépare encore, le potage de lentilles car selon la croyance populaire toujours, la lentille est un symbole de l’argent. Pour la même symbolique, dans d’autres endroits, on cuit des gâteaux au pavot. La cuisson des pirohy, pâtes farcies traditionnelles assurait le gros bétail de la ferme, ou la cuisson de longues nouilles assurait de grands épis de blé sur les champs.

Notes

1 La pomme ou le raifort trouve ici la même valeur symbolique : santé et force.

2 La chambre est ici prise dans le contexte de l’habitation on pourrait parler de « pièce de séjour » (voir photo).

3 Anciennement, les fiançailles étaient annoncées trois fois par le prêtre à l’église, puis le mariage pouvait avoir lieu.

4 Coudre signifiait, symboliquement, le fait de « fermer » le cloaque, l’orifice par lequel passe les œufs.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

PS : les photos  du « serpent » d’Adam et Eve proviennent de Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003 et de « Serpent » d’Adam et Eve – région de Hont en 1910 (photo NB de : archive de l’institut ethnologie SAV Slovaquie)

Sources

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009

Ľudová kultúra. Par Zuzana Beňušková. Kultúrne Krásy Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Z ľudovej kultúry Turca. Eva Pančuhová, Zora Mintalová a kolektiv. Matica slovenská. 2004

Saint-Sylvestre, le réveillon

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Réveillon de la veille de la nouvelle année

Le jour de la Saint-Sylvestre est appelé Journée de Silvestre dans la culture populaire slovaque.
Les coutumes traditionnelles pratiquées le jour de la Saint-Sylvestre en Slovaquie ressemblent en majorité avec les coutumes de la Veille de Noël cependant, elles n’atteignent pas la même intensité ni la même ritualisation.

Les prophéties agraires et les superstitions

Dans la croyance populaire slovaque les prophéties agricoles étaient pratiquées le dernier jour de l’année, à la Saint-Sylvestre, pour assurer la bonne prospérité économique dans la ferme, la fertilité des champs et la fécondité du bétail. Par exemple un rite concernant l’étable bien peuplée de vaches et de brebis, était pratiqué dans le village de Ždiar dans les Tatras. Là, la maitresse de maison ficelait en faisceau des cuillères en bois afin d’assurer la subsistance du troupeau de bétail domestique.

Comme pendant les fêtes de Noël, on respectait de nombreuses superstitions fixées à ce jour : rien n’était prêté de la maison, le non-respect de cette interdiction allait signifier une diminution des volailles.
De même que la visite d’une femme, tôt le matin, était mal perçue donc, si c’était possible les femmes restaient le matin de ce jour à la maison. Pour rompre cette malédiction il était pratiqué tôt le matin un cortège des vœux de polazníci composé de jeunes hommes qui circulaient de porte en porte aux maisons du village en souhaitant tout le bonheur. Leurs vœux protégeaient la maison.

D’autres coutumes :

Le maître de la maison essayait depuis le matin de casser la coquille d’une noix avec son majeur. S’il réussissait, cela devait apporter la paix et l’amour à la famille.

La maîtresse de maison, frottait avec de l’ail les portes de la maison et de l’étable pour empêcher l’entrée des puissances néfastes. Quant au maître de maison, il frottait la robe des chevaux avec la plus belle pomme pour qu’ils deviennent plus beaux.

Parfois, jadis, après le repas du réveillon, des noisettes et un morceau de pomme étaient jetés dans le puits pour assurer une eau de bonne qualité et la bonne santé.

Les vœux

Dans la région ethnographique de Zamagurie (nord de la région de Spiš) le cortège des garçons circulaient tôt le matin dans le village et ils offraient des bâtons de noisetier à chaque maison visitée.

Dans les régions de Liptov, de Spiš, de Horehronie et d’Orava, autrefois la jeunesse attendait l’arrivée du Nouvel An dans une maison du village où se rassemblaient les fileuses pour travailler ensemble ou dans l’auberge du village.

Dans la région de Hont, les jeunes hommes chantaient les chants traditionnels sous les fenêtres des maisons du village.
Dans les environs de la ville de Rožňava, les garçons allaient chanter à minuit sur la tour de l’église.
Dans la région ethnographique de Kysuce, le cortège des polazníci circulaient de maison en maison dans le village.
Dans la région de la Haute Nitra, les filles jetaient sur les portes de maisons où habitaient les garçons des marmites en argile remplies de pommes et de noix. Cette marmite les filles les appelaient « nouvelle année ».

Les jeux déguisés et masqués Babinovanie et Kurinovanie

Babinovanie est un spectacle joué par un groupe déguisé et/ou masqué à la Saint-Silvestre dans les environs de la ville de Považská Bystrica (région de la vallée du Váh). Ce spectacle est enrichi par des éléments constitutifs d’un métier traditionnel de la région, pratiqué par un artisan le drotár qui pratique un artisanat particulier avec du fil de fer.

Dans la microrégion d’Uhrovská dolina (dans quelques localités autour du château-fort d’Uhrovec, dans le district de Bánovce nad Bebravou), on appelait le dernier jour de l’année « babí deň – jour de baba » et il y avait un cortège des vœux appelé babinovanie qui était une quête collective avec la proclamation de souhaits de bonne année par les garçons du village. A la tête du cortège des dix ou vingt garçons, un accordéoniste avec un bailli des garçons, un autre portait un sac pour collecter les récompenses et selon la tradition, ils circulaient dans les rues du village et s’arrêtaient devant les maisons où ils chantaient d’abord un chant religieux. Après avoir été invité par le maître de maison ils entraient et continuaient en récitant des vers de souhaits de bonheur, de bonne santé, de fortune pour la nouvelle année. Ils obtenaient une récompense sous la forme de noix, de graines de blé, de pommes, de petits pois, de haricots secs, de prunes sèches et un peu d’argent.

Le « Kurinovanie » un rituel agraire ancestral

Le rituel de Kurinovanie est effectué par la tournée des kurine baby ou kuriny babiny – appellation suivant la localité – qui constituent un groupe de garçons costumés et masqués en femmes et mené par un couple vêtu en paille, appelés kurine baby et accompagné parfois d’une vingtaine de participants qui sortent à la Saint-Sylvestre, et passaient de maison en maison dans le village. Leurs vœux étaient des gages de prospérité et étaient censés rendre féconde la volaille pour la prochaine année qui va commencer. Aujourd’hui, ces cortèges composés uniquement d’hommes sont considérés comme un simple aspect de la joie populaire, mais leur fondement le fait remonter à des croyances ancestrales.

Dans le milieu rural de la Slovaquie orientale, la tradition de kurinovanie était effectuée par le cortège des garçons déguisés en femmes Kurine baby. Ils prononçaient leurs vœux en quêtant et formulaient les souhaits selon la tradition. Le cortège était mené par deux garçons vêtus de costume féminin, l’un avait sur la tête un chapeau formant une couronne tressée de paille avec une sonnette, l’autre vêtu d’un manteau en fourrure ceinturé d’une corde de paille tressée et d’une jupe grossièrement façonnée en paille de blé. Quand le cortège de Kurine baby sortait dans les rues du village, il était déjà attendu par les maitresses de maisons car selon la coutume, chacune des maitresses de maisons attrapait le poignet de paille du déguisement porté par les Kurine baby du cortège, et tout de suite elles donnaient la paille à la couvée de poules, pour s’assurer que les poules pondent bien leurs œufs.

En Slovaquie septentrionale, la coutume d’un cortège similaire était enregistrée au début du 20e siècle, dans le village de Štiavnik près de Bytča (région de Žilina). Là, la coutume de cortège de garçons déguisés en femmes vêtus en paille était appelé Kuriny bariny. Ils portaient des vêtements de paille de blé et allaient de maison en maison où ils exprimaient ensuite leurs vœux de fertilité et de fécondité pour l’année qui commence en récitant une formule drôle avec des jeux de mots populaires archaïques comme par exemple cette bienvenue à la nouvelle année : « Kuriny, bariny, babiny kury, dedove fúzy, baba mala fúzy, dedo mrňúsy. Odíde nám starý rok, a príde nám nový, vitajte ho, vitajte » formule difficilement car utilisant de vieux mots de dialecte (1).

Dans la ville de Bytča, à la Saint-Sylvestre, dernier jour de l’année, se perpétue la tradition des Kuriny bariny. La jeunesse se rassemble le 31 décembre pour aller en mascarade, avec à la tête du cortège un couple déguisé : un garçon déguisé en femme avec son visage caché sous une dentelle, tenant une poupée emmaillotée, est accompagné d’une fille déguisée en homme. Ce couple est entouré de personnages déguisés porteurs d’instruments de musique ou des imitations d’instruments de musique.

L’appellation dialectale kurina baba est dérivé des mots kura et baba au singulier : la poule – kura, la vieille – baba, et au pluriel les kurine baby ou kuriny babiny ce qui signifie les poules et les vieilles. Cette appellation représente une variante d’un calembour de mots populaires et est un élément souvent personnifié.

Le caractère magique du cortège déguisé apparait dans le but d’assurer non seulement que les poules pondent bien des œufs ou que la volaille se porte bien – la fécondité de la volaille – mais aussi de toute la prospérité agricole. Cette sorte de mascarade se déroule aussi avec d’autres masques anthropomorphes par exemple Dedo – le Papy, Baba – la Vieille ou Starý – le Vieux, appartenant à la représentation des masques plus anciens et des masques anthropomorphes authentiques des coutumes populaires slovaques. Ils trouvent leur origine dans l’ancien culte slave des ancêtres qui n’est pas le culte des morts, c’est le culte de la continuité de la vie et pour cela, ces masques réapparaîtront dans le rite des noces dans les traditions slovaques.

Le réveillon du jour de l’An

Le repas pour le dîner de la soirée de la Saint-Sylvestre était presque le même que celui de la veille de Noël mais sans restrictions religieuses sur la viande qui étaient donc servie. La soupe traditionnelle de choucroute kapustnica avec saucisses ou viande de porc fumée et champignons des bois, était servie d’abord, puis suivait le repas de pâtes traditionnelles avec le pavot. Ce repas s’appelle les opekance en Slovaquie centrale et septentrionale, les bobalky en dialectes de la Slovaquie orientale et les pupáky en Slovaquie occidentale. Ce repas est accompagné de Medovina, une boisson ressemblant à l’hydromel.

De nos jours, la tradition culinaire du repas du Réveillons du jour de l’An, est enrichie d’un menu type buffet froid où ne manquent pas la salade de pommes de terre classique, les cornets de jambon farcis de mousse au raifort, les sandwiches et canapés, les pâtisseries (cakes au chocolat, tartelettes, biscuits, petits gâteaux de pain d’épice, etc.), la petite pâtisserie salée et les boissons de toute sorte.

Autrefois, l’atmosphère de la soirée du dernier jour de l’année était illustrée par le bruit des claquements de fouets de bergers et par le tir d’accompagnement de fusils par les garçons.
Dans les villages de la région de Hont, ce-soir-là, les hommes enflammaient des torches improvisées faites de fourches en fer et de chiffons et circulaient dans le village en entonnant des chants pour l’arrivée du Nouvel An.

En milieu urbain, la tradition du Bal de la Saint-Sylvestre se perpétue de même que le feu d’artifice annonçant l’arrivée de la Nouvel Année.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Note

1 Voici quand même un essai de traduction : « Kuriny ?, bariny ?, babiny kury ?, la moustache du vieux, la vieille à la moustache, dedo mrňúsy. La vieille année s’en va et arrive la nouvelle année, bienvenue, bienvenue ». Peut-être faut-il chercher dans d’autres traditions, nous pensons au carnaval. L’utilisation et l’origine de ces mots demeurent obscures.

Sitologie

https://www.drotaria.sk : pour l’artisanat de drotár (objet en fil de fer)

Sources

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009

Ľudová kultúra. Par Zuzana Beňušková. Kultúrne Krásy Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Z ľudovej kultúry Turca. Eva Pančuhová, Zora Mintalová a kolektiv. Matica slovenská. 2004

Les Innocents, le 28 décembre

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Mláďatká en slovaque signifie les bébés, c’est ainsi qu’est nommé le jour de la commémoration du massacre des Innocents, un épisode sanglant cité seulement dans l’Évangile de Matthieu (2, 16-18). Beaucoup d’historiens doutent de la véracité des faits et Flavius Josèphe, l’historien juif rallié aux Romains, n’en fait pas mention (alors qu’il mentionnera l’existence du Christ vers 93).
Néanmoins, le souvenir de ce massacre est célébré le 28 décembre pour les catholiques et le 29 décembre pour les orthodoxes.

La fête religieuse des Innocents, fait référence aux nourrissons (1) qui ont été massacrés par le roi Hérode l’Ascalonite, car il voulait faire périr le « nouveau roi » annoncé par les Mages (2).

Dans le milieu populaire slovaque, l’ancienne coutume du « fouettage des filles » par des garçons à cette période rappelle ce drame biblique et le martyre des enfants innocents (3).

La coutume du « fouettage des filles » après la Noël

Autrefois, la vie populaire en Slovaquie était organisée en fonction des travaux saisonniers et rythmée par les fêtes liturgiques. Les sources ecclésiastiques du 16e siècle mentionne que la coutume du « fouettage », à l’occasion de la Fête des Innocents, était acceptable par l’Église et c’est ainsi qu’elle bénit les branches de saule qui servent à tresser le fouet qui sera utilisé le 28 décembre pour le « fouettage des filles ».

En Slovaquie, la coutume de fouettage des filles après la Noël, le 28 décembre, était pratiquée par un groupe de garçons munis d’un fouet qui rendaient visite aux jeunes filles du village. Deux garçons, portaient un gros fouet symbolique, d’autres garçons portaient de plus petits fouets dans les pochettes de leur vêtement. Dès qu’ils arrivaient dans la maison, un des garçons donnait quelques coups de fouet sur les jambes de la fille à marier visitée.

La coutume de fouettage des filles de Noël était liée à l’hospitalité dans la maison ou à la soirée de réjouissance pour la jeunesse du village. La coutume du fouettage de Noël, appelé mládenkovanie était répandue dans les régions slovaques de Spiš, Horehronie et de Novohrad ainsi que dans certaines parties de la Slovaquie occidentale, mais elle est tombée en désuétude dès la moitié du 20e siècle.

Dans la région de Hont, il était aussi de coutume le 28 décembre, d’organiser un cortège des garçons avec le raifort. Il s’agissait d’une quête accompagnée de souhaits de bonne santé, forte comme le raifort. Les garçons, munis d’un raifort accroché à la cime d’une baguette flexible de bouleau, allaient rendre visite aux jeunes filles du village. Ils présentaient leurs vœux en récitant : « Doniesli sme vám chren aby ste boli celý rok zdraví – nous vous apportons un raifort pour que vous ayez une bonne santé toute l’année » (4). On leur donnait une petite récompense, des gâteaux traditionnels appelés koláče, des gâteaux en pâte levée, ou un peu d’argent. Les petits garçons recevaient des noisettes, noix, pommes, gâteaux, ou un peu de pièces de monnaie quant aux adolescents, ils obtenaient « l’hospitalité », c’est-à-dire une boisson alcoolisée, une tranche de pain et un saucisson, un jambon ou éventuellement de l’argent.

L’interdiction de travaux de couture

Il existait une autre coutume, attesté notamment dans la région de Trenčín, où était appliqué une interdiction de certains travaux, comme la couture, pendant le jour des saints Innocents, le 28 décembre. Le non-respect de cette interdiction pouvait provoquer la mort des enfants.

Dans la région de Turiec, dans le village de Belá, se conservait une interdiction : les femmes du village ne cousaient pas le jour des Saints-Innocents, c’était une interdiction superstitieuse de prévention afin que les poules pondent bien.

L’interdiction de travaux de couture était très répandue pour les femmes du village. Si une femme pratiquait un tel travail, ses doigts allaient devenir purulents. Mais si une femme préparait les plumes pour les édredons, elle devait attendre que la volaille ponde beaucoup d’œufs, sinon les oies ne prospéreraient pas bien.

Dans la région de Gemer, à la fin du 19e siècle, le jour des Innocents, le 28 décembre, il y avait le rituel de l’interdiction de passer le balai dans les coins de la chambre de la maison, pour empêcher de se débarrasser des petits esprits domestiques – les aïeuls de la famille – qui selon la croyance populaire, séjournaient pendant les fêtes de Noël dans les maisons de leur clan.

Prophéties agraires et météorologiques

Les pronostics agraires pour la bonne prospérité sont liés avec le jour des Innocents, par exemple : « Ak je na nebi veľa hviezd, bude veľa sliepok – si le ciel est étoilé, il y aura beaucoup de volaille ».

Le pronostic météorologique du jour des Innocents : « Ak prší celý deň, bude suchý rok – si la pluie tombe pendant toute la journée, l’année sera sèche » – ce sera la sécheresse pour l’année nouvelle.

La prophétie de la mort du jour des Innocents : « Ak prší dopoludnia, budú zomierať deti, ak popoludní, dospelí – si la pluie tombe avant midi, les enfants vont mourir, si c’est après midi, ce seront les adultes ».

Le jeu d’Hérode

C’est le jeu populaire de Noël, inspiré de l’évangile de Matthieu (2, 1-16). Il s’agit de l’épisode biblique concernant le roi Hérode l’Ascalonite. La pièce était jouée sous la forme du théâtre de marionnettes ou sous la forme du théâtre joué par des acteurs vers la fête des Saints-Innocents, moment de la commémoration du massacre des petits enfants par le roi juif Hérode l’Ascalonite à Bethléem. La forme théâtrale représente un motif moral : « la culpabilité et la punition ». Certaines formes théâtrales du jeu d’Hérode sont connues dans la région ethnographique de Zamagurie (nord de la région de Spiš) habité par les Gorals. Dans le spectacle aux versions théâtralisées, joué avec des marionnettes, on pouvait voir les poupées de l’Ange, des bergers Fedor, Stacho, Junák (younak) et Kubo, les Trois rois mages, le roi Hérode et la Mort. Le spectacle se termine par les scènes comiques jouées avec des poupées appelées : Gazdina – la Maitresse de maison, le Rabbin et la poupée du berger Valaque ou encore avec d’autres poupées comme un homme du nom de Jacek, un Tsigane et un Chien. La version du théâtre amateur avait des acteurs dans les rôles d’Hérode, du Rabbin, de Soldats. Dans la version de Zamagurie avec les acteurs réels, l’histoire se concentre sur le personnage du roi Hérode.
Dans le village de Topoľovka (district de Humenné), le drame d’Hérode est toujours joué sous la forme de théâtre d’amateur avec une interpolation de marionnettes, les acteurs amateurs tiennent les rôles du roi Hérode, du Juif, deux dans le rôle de Marschalek (5) et une dans le rôle d’une jeune Fille.

PS: On peut voir la représentation de cet épisode du Massacre des Innocents sur la fresque du mur Nord dans le chœur de l’église gothique Saint-Egide dans la ville de Poprad.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Notes

1 Hérode « envoya tuer tous les enfants de 2 ans et au-dessous qui étaient à Bethléem et dans tous son territoire… » Matthieu 2,16
Dans l’église gothique Saint-Egide de la ville de Poprad, on peut voir dans le chœur, sur le mur sud, la scène exceptionnellement naturaliste du massacre des Innocents (voir notre photo).

2 Lire la Légende dorée sur cet épisode et l’évangile de Mathieu 2

3 Ils sont appelés « Innocents » car « n’ayant jamais nui, ni à Dieu par désobéissance, ni au prochain par injustice, ni à eux-mêmes par malice en péchant » sic La légende dorée et encore, « dans leur martyre, ils méritèrent l’innocence baptismale, c-à-d que le péché originel fut effacé en eux ».

4 Le raifort (la racine forte) était très utilisé dès l’antiquité pour ses propriétés médicinales. Toujours utilisé de nos jours dans la préparation culinaire de la salade de betterave au raifort.

5 Voir la photo avec les 2 personnages « Marschalek » en uniforme sur www.topolovka.estranky.sk/fotoalbum/caro-vianoc-obohatili-kolednici_/kolednici.jpg.html

Sources

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009

Ľudová kultúra. Par Zuzana Beňušková. Kultúrne Krásy Slovenska. Dajama

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U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Z ľudovej kultúry Turca. Eva Pančuhová, Zora Mintalová a kolektiv. Matica slovenská. 2004

La légende dorée. Jacques de Voragine. Ed GF Flammarion. 1967

2000 ans de chrétientés. Guide historique. Gérard Chaliand et Sophie Mousset. Ed Odile Jacob. 2000

Icônes et saints d’Orient. Alfredo Tradigo. Guide des Arts. Ed. Hazan. 2005

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976

Saint Etienne, le 26 décembre

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

En slovaquie svätý Štefan – saint Etienne, est fêté le 26 décembre

Saint Etienne, premier martyr et premier diacre chrétien (1), vivait à Jérusalem. Il fut condamné à la lapidation par les autorités juives en l’année 36.
Ses attributs : des cailloux ou des pierres rappelant son martyr que porte saint Etienne dans son vêtement ou autour de sa tête, il porte l’habit de diacre composé de la tunique blanche de diacre ainsi que de l’étole qui descend de l’épaule gauche et parfois il tient un encensoir de la main droite et, de la gauche recouverte d’un voile rouge en signe de respect, un coffret contenant les Saints Dons. Il peut avoir aussi un livre ou une palme de martyr. Il est représenté avec un visage imberbe. Il est le patron des tireurs de fronde, des diacres. Saint Etienne est également un saint guérisseur et, en Europe centrale, on l’invoque contre la maladie de la pierre (2) ou de la moelle épinière.

En Slovaquie, le jour de la Saint-Etienne est le jour idéal pour les visites entre amis, copains et les « connaissances ». Par contre, le jour de la Nativité de Jésus, le 25 décembre, est le jour de visites entre les membres de la famille proche seulement.

La coutume agraire de Saint-Etienne : le bain symbolique des chevaux dans l’eau froide

Autrefois, en Slovaquie, tôt le matin du jour de la Saint-Etienne, vers 3 ou 4h, les garçons ou les jeunes hommes conduisaient les chevaux au ruisseau du village pour y pratiquer le « bain symbolique » dans l’eau, c’est-à-dire qu’ils le faisaient marcher dans la rivière. Si la surface du ruisseau était trop gelée, ils promenaient les chevaux dans la neige.

Dans la mythologie slave, le cheval blanc était consacré à Sventovit, dieu slave ayant une tête à quatre faces. Le peuple slave croyait que Sventovit montait ce cheval pour aller se battre la nuit car, au petit matin, on retrouvait le cheval en sueur, couvert de boue, comme s’il revenait d’un long voyage.

Dans la région d’Orava, le jour de la Saint-Etienne, la coutume était de promener les chevaux dans la neige ou dans l’eau, pour leur bonne santé. Ce-jour-là, après le retour des chevaux du bain d’eau froide dans l’écurie, le maître de maison jetait des grains d’avoine sur les chevaux en prononçant des souhaits de bonheur et de bonne santé. L’Église justifiait cette coutume comme étant la célébration commémorative de la lapidation de saint Etienne.

Dans la région de Horehronie, les chevaux, après le bain symbolique dans l’eau froide, étaient attelés à une luge par les garçons et se baladaient avec les filles du village. Selon des ethnographes, le sens de cette coutume se rapportait à la magie agraire qui devait assurer de longues pousses des tiges des plantes textiles comme le lin et le chanvre lors de la prochaine récolte.

En surcroit, dans certaines communes de Slovaquie, les hommes âgés se lavaient rituellement au ruisseau ou se lavaient avec de l’eau froide. Quant aux femmes et aux jeunes filles, elles plongeaient leurs pieds dans l’eau froide. Cette coutume est encore en usage de nos jours mais elle est rarement observable.

Vœux et souhaits le jour de la Saint-Etienne « štefanské vinšovačky »

En Slovaquie, de nos jours, une coutume encore bien vivante et très connue appelée « štefanské vinšovačky » se déroule le jour de la Saint-Etienne. Il s’agit de vœux de bonnes fêtes récités en vers par les gens. Les personnes qui prononcent les vœux sont invitées et bien traitées dans chaque maison visitée du village.

Les traditions de visites, des vœux de bonheur et de bonne santé du jour de la Saint Etienne continuent encore de nos jours, mais essentiellement dans la famille apparentée. Et surtout dans la Slovaquie centrale, où on continue le chant traditionnel de cantiques de Noël par la jeunesse du village, la koleda, sous les fenêtres des concitoyens tout comme la tradition des jeux populaires de Noël, mais en forme raccourcie, inspirés par les légendes de la naissance de Jésus (Adoration des Rois Mages, Annonce aux Bergers).

Cadeaux des parrains dans le Hont

Dans la région de Hont, le matin du jour de la Saint-Etienne, les parrains apportaient, apportent encore, chez leurs filleules et filleuls, les gâteaux traditionnels faits de pâte levée, appelés en dialecte local les kačky, qui sont une forme de brioche tressée. Le gâteau était orné d’argent (jadis de 10 ou 20 pièces de monnaie), de ruban, de bonbons, d’un petit foulard coloré. Dans le passé, c’était aussi l’occasion pour offrir un cadeau comme une chemise, un chandail en laine ou du tissu.

Toujours dans la région de Hont, il existait la coutume que chaque enfant avait une marraine et un parrain de familles différentes (pas des époux). C’est ainsi que l’enfant obtenait deux gâteaux traditionnels avec des cadeaux.

Cortège des garçons – les quêtes de la Saint-Etienne

En Slovaquie occidentale, la coutume de quête de Štefan appelée štefanovanie était pratiquée lors d’un cortège de petits garçons qui prononçaient des vœux de bonnes fêtes en récitant des vers joyeux le jour de la Saint-Etienne : « Štefane, Štefane, čo nosíš v tom džbáne ? Koledu, koledu, spadol som na ledu. Psi sa na mňa zbehli, koledu mi zjedli, etc. – Stéphane, Stéphane, que portes-tu dans la cruche ? C’est la koleda, c’est la koleda, je suis tombé sur la glace. Les chiens viennent sur moi, ils mangent ma koleda… ».

La tradition du cortège des garçons et des jeunes hommes se déplaçant en prononçant des vœux et en chantant des souhaits de bonheur se déroulaient aussi dans les régions de Horehronie, de Spiš et de Liptov. Dans ces régions, selon une ancienne coutume, la famille et les amis se rencontraient chez leur ami ou leur parent qui s’appelle Etienne et devant la porte où habitait une personne prénommée Etienne, les filles jetaient de vieilles poteries.

Parfois il arrivait qu’un jeune homme du cortège s’appelle Etienne, il était alors symboliquement ligoté par ses compagnons jusqu’au moment où il obtenait l’hospitalité – une boisson alcoolisée, un saucisson, un fromage – dans une maison.

Dans le village de Černová près de Ružomberok (région de Liptov) le soir de la veille de la fête de Saint-Etienne, des musiciens jouaient sous les fenêtres des maisons où habitaient les hommes portant le prénom d’Etienne – Stephan – Štefan.

Dans la région ethnographique de Myjava (Slovaquie occidentale), les garçons allaient rendre visite aux filles et jetaient de l’eau sur les demoiselles. Cela devait apporter la bonne santé et la beauté.

Dans certaines régions slovaques, et notamment dans les communes des environs de la ville de Krupina (région de Hont) et des environs de Stará Turá (région de Trenčín), le matin du jour de Saint-Etienne, les garçons, munis de branches de bouleau bourgeonnés de feuilles ou de fleurs (coupés avant la Noël et laissés dans l’eau), allaient rendre visite aux filles et donnaient, symboliquement, quelques coups de fouet sur les jambes des jeunes filles pour leur apporter la bonne santé et la beauté.

Le déguisement et le cortège avec la musique

La quête du jour de la Saint-Etienne, devait être, à l’origine, une quête de bénédiction, destinée à chasser les mauvaises influences et à apporter du bonheur, la preuve avec l’ancienne forme du cortège de mascarade en compagnie du Turon que l’on trouvait dans la région d’Orava.

Dans la région de Hont, il y avait un cortège dit « avec des noix ou du raifort » composé de garçons accompagnés de musiciens et dans la région de Spiš, ce cortège était appelé bursik. Le but de ces quêtes était d’obtenir une récompense pour organiser des réjouissances.
Les garçons organisaient un bal dansant, la première réjouissance depuis l’interdiction de la musique pendant l’avent. Selon la coutume, c’était le bailli des garçons, qui organisait le bal dansant le soir de la Saint-Etienne. Parfois c’était les filles qui invitaient les garçons dans la maison où elles se réunissaient habituellement pour filer ensemble. Les filles préparaient un repas de pâtes traditionnelles, des nouilles avec du pavot, et les garçons venaient avec la musique. Les garçons collectaient l’argent entre eux et le donnaient en remerciement aux filles.

Dans les régions de Spiš et de Horehronie, un cortège de garçons avec la musique appelé la marche de bursik était organisée le jour de la Saint-Etienne. Ils circulaient dans le village et s’arrêtaient devant chaque maison où habitait une fille. Là, ils chantaient et attendaient. La fille leur apportait alors des gâteaux traditionnels, un saucisson et une boisson (eau-de-vie) ou un peu d’argent. Si la fille n’offrait rien, elle n’était pas invitée à la soirée dansante de la Saint-Etienne organisée par les garçons du village.

La coutume d’organiser la soirée dansante de Saint-Etienne par des garçons, est toujours bien vivante en Slovaquie.

La quête des noix dans la région de Hont

Dans la région de Hont, une coutume rare, active jusqu’en 1940 et probablement encore active de nos jours (3)…, regroupait les garçons en un cortège avec à sa tête un musicien-accordéoniste et un bailli élu parmi les garçons. Ce bailli tenait à la main une tige de roseau, symbole de son pouvoir, il portait sur son dos une grande trousse de toile en brins, appelée visak, dans laquelle il y déposait les récompenses reçues : des noix. Le cortège des garçons accompagné avec la musique s’arrêtait devant chaque maison où habitait une jeune fille et ils chantaient : « Otvor milá bránu maľovanú, etc. – Ma bien-aimée, ouvres la porte peinte,… ». La jeune fille sortait devant la maison et elle dansait avec chaque garçon du cortège, puis elle les invitait à entrer dans la maison où la table était préparée pour la réception. Il y avait toujours un grand plat rond et profond rempli de noix destinées aux garçons du cortège. Après la « quête des noix », les garçons se réunissaient chez le bailli pour élire le nouveau bailli. Habituellement, le bailli était élu parmi les garçons de famille « aisée » surtout pour accomplir son devoir : obtenir l’argent pour organiser la réjouissance dansante le soir de la Saint-Etienne.

L’élection du bailli des garçons le jour de la Saint-Etienne

Dans certaines communes des régions slovaques de Záhorie, de Kysuce, de Hont, autrefois les garçons élisaient le bailli entre eux et organisaient un rite d’entrée dans le groupe des hommes pour les nouveaux membres – adolescents du village.
Dans le village de Štubňa (dans la région de Turiec), les garçons élisaient leur bailli et leur maître de danse.
De nos jours, l’élection du bailli est rare, mais dans le village de Sebechleby, les garçons continuent de pratiquer cette ancienne tradition le jour de la Saint-Etienne.

Le devoir du bailli des garçons du village était de garder l’ordre moral entre la jeunesse du village et les lieux publics comme dans l’église, dans une taverne, et d’autres lieux de la commune.

L’ancienne coutume du don du gâteau, un rite de rémunération

Autrefois, dans la Slovaquie occidentale, l’année du service saisonnier terminée, les ouvriers agricoles obtenaient une rétribution et un grand gâteau traditionnel appelé mrváň qui représentait, symboliquement, le remerciement du patron de la ferme agricole. Ce gâteau était orné d’une pomme et de romarin. Il était la récompense du travail accompli et la possibilité d’obtenir un nouveau contrat de travail. Le saisonnier s’en retournait chez lui en portant démonstrativement ce mrváň fixé sur un bâton.
Dans la région ethnographique de Záhorie, sous l’influence de cette tradition agraire, il y avait un cortège avec le gâteau, en slovaque koláč qui était une couronne tressée de paille et ornée de rubans symbolisant le gâteau traditionnel de rémunération.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Notes

1 Cité dans la Bible (Actes 6, 5) et dans la Légende dorée, saint Etienne protomartyr est évoqué comme « homme plein de foi et d’Esprit-Saint ». Il fut lapidé en présence de Saül, le futur saint Paul, l’année que Jésus-Christ monta au ciel, au commencement du mois d’août, le troisième jour hors des murs de Jérusalem, au nord de la porte de Damas. Il est couronné comme chef du martyre. Il est vénéré par les Églises catholique, orthodoxes, luthérienne, copte.

2 La maladie de la pierre parfois aussi appelée gravelle est due à la formation de calculs dans une partie de l’organisme, souvent les reins ou les voies urinaires (lithiase).

3 A ce jour, nous n’avons pas de renseignements permettant de confirmer ou d’infirmer cette information.

Sources

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009

Ľudová kultúra. Par Zuzana Beňušková. Kultúrne Krásy Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Z ľudovej kultúry Turca. Eva Pančuhová, Zora Mintalová a kolektiv. Matica slovenská. 2004

La légende dorée. Jacques de Voragine. Ed GF Flammarion. 1967

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

Le culte des saints catholiques en Europe centrale et orientale. Jean-Pierre Irali. Ed. Romaines. 2011

Reconnaître les saints. Symboles et attributs. B. Des Graviers et T. Jacomet. Ed. Massin. 2006

Icônes et saints d’Orient. Alfredo Tradigo. Guide des Arts. Ed. Hazan. 2005

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976

Saint Thomas, le 21 décembre, le solstice d’hiver

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

La fête de la Saint-Thomas était célébrée liturgiquement le 21 décembre, mais depuis 1969, l’Église catholique romaine a transféré cette fête à la date du 3 juillet. Mais rien ne change pas dans les anciennes traditions slovaques de ce-jour-là, cette ancienne fête de Saint-Thomas est restée fixé sur le solstice d’hiver, le jour le plus court jour de l’année.

En Slovaquie, selon les anciennes coutumes, le jour le plus court était lié avec des interprétations de la magie de la naissance (création) de l’univers dans les anciens mythes slaves. Ces interprétations rendues à la nature et aux forces élémentaires constituent l’aspect majeur du paganisme slave qui remonte à une époque bien antérieure. Parmi ceux-ci, il y avait notamment le culte du renouveau solaire, sous le nom du dieu du feu céleste représenté par le soleil personnifié sous la figure de Dažbog/Dazhbog/Dabog un fils de Svarog, dieu suprême, éternel, inactif, antérieure aux dieux slaves, au-dessus de tous dieux slaves.

À la suite de la conversion au christianisme, le peuple ne mit pas longtemps avant d’abandonner leurs divinités anciennes, mais la croyance ancienne continua à coexister avec la nouvelle dans les traditions sacrées pré-chrétiennes notamment dans les régions rurales slovaques. On avait recours, pour que des vœux soient exaucés, tout à la fois aux prières chrétiennes et aux incantations païennes. Les gens voyant briller la justice de la divinité pure du Christ dans leurs diverses superstitions, allaient oublier les actes devenus sacrilèges du passé et cesser de les pratiquer à l’avenir. Mais on sait que les superstitions vont persister et former une forme de syncrétisme avec la religion chrétienne et les cultes païens dans certaines couches de la population.

C’est ainsi qu’autrefois en Slovaquie des superstitions vont persister comme sur le premier visiteur à la maison le jour de la Saint-Thomas (1), le 21 décembre, la prophétie de l’avenir, l’interdiction des visites des femmes et de certains travaux domestiques qui étaient rigoureusement interdits. Mais, pendant le jour du 21 décembre, les cortèges des vœux des petits garçons appelés polaznici étaient bienvenus.

Tandis que le jour de Sainte-Lucie, au regard des coutumes populaires slovaques, signifie le couronnement de la période avant la Noël, le jour de Saint-Thomas, le 21 décembre, avait moins d’importance.

Thomas se dit Tomáš (prononcer tomach) en slovaque. Il est le saint patron des métiers : rouliers – marchands, des maçons et des forêts.

Sur la majorité du territoire montagneux de la Slovaquie, l’ancienne fête de la Saint-Thomas, le 21 décembre, était connue comme la fête de la forêt. On disait : « Na Tomáša seď doma – à la fête de Saint-Thomas tu restes assis à la maison », cela signifie qu’en ce jour il faut éviter d’aller dans les montagnes. Ou, encore, dans la région de Kysuce : « Na Tomáša hora nie je naša – à la fête de Saint-Thomas, la forêt n’est pas pour nous », cela veut peut-être dire que la forêt, ce-jour-là, est sous la puissance impure du démon de la forêt.

Le 21 décembre on pratiquait le rituel de la magie du Premier jour, puisque le jour de la Saint-Thomas est le précurseur du solstice d’hiver. On respectait de nombreuses superstitions fixées à ce jour : rien n’était prêté de la maison, par exemple un objet quelconque, un œuf, du sel, une casserole… Le non-respect de cette interdiction allait signifier une diminution des provisions, une diminution du bétail, etc.
Les gens craignaient la visite d’une femme étrangère, mais aussi l’arrivée d’un mendiant à la maison. Si un mendiant venait quand même par arriver à la maison, les habitants, pour interrompre la sorcellerie éventuelle, jetaient devant les jambes du mendiant un balai composé de branches de sapin.

Les croyances agricoles et les travaux interdits

En Slovaquie, traditionnellement, obtenir les meilleures récoltes était très important pour la vie des paysans à l’époque et les rites païens d’origine étaient donc toujours pratiqués à l’occasion des fêtes religieuses et notamment le jour de la Saint-Thomas.

Parmi les coutumes et superstitions du jour on retrouve, au point de vue santé, que le beurre battu le jour de la Saint-Thomas était conservé comme un remède. Que, pour rester, en bonne santé, il était bon de nettoyer et blanchir la chambre pour le jour de la Saint-Thomas.

Au niveau interdictions, comme pour d’autres jours (2), les femmes du village ne pouvaient pas filer le jour de la Saint-Thomas. Cette superstition pouvait être suspendue mais seulement pour une fille à marier qui allait alors réaliser la prophétie d’avoir un mari en filant. La jeune fille pouvait filer du lin sous une condition : pendant le filage, elle devait inspirer profondément puis tout en expirant lentement, elle devait amener rapidement le fil de la filasse de lin – un fil le plus long possible – et ce fil va servir le soir de Noël. De retour de la messe de minuit, la jeune fille va s’attacher symboliquement à la table préparée pour la fête de Noël avec ce fil de Saint-Thomas. C’est alors que son futur mari va venir la détacher.

Les vœux des quêtes du cortège des petits garçons

Les petits garçons du village vont ensemble en cortège de porte en porte aux maisons du village, là, ils récitent de petites formules magiques bienfaisantes à l’approche des fêtes de Noël et ils tiennent en mains un fusil à aiguiser en métal. Ils souhaitent tout le bien et la bonne santé pour les maîtres de la maison, l’abondance d’animaux domestiques et pour la prochaine récolte et, bien entendu, la bonne fortune et la protection sous les ailes des anges.

En Slovaquie, les gens attentent avec impatience et espoir le cortège des polazníci – les petits garçons.

Dans les régions de Kysuce, Orava, Hont, très tôt le matin, les petits garçons venaient quêter tout en assurant le bonheur de la maison en récitant « Nesieme vám polazniky, Krista Pána radostníky – Nous vous apportons des polazniky, les joies de Notre Seigneur Jésus-Christ » et offraient un polazník, un rameau de sapin tressé avec des épis d’avoine et noué avec un ruban. Ces épis d’avoine faisaient auparavant partie de la couronne de la Fête de la moisson de blé.

Les vœux des Polazníci

On connaissait dans d’autres régions un cortège similaire mais composé de jeunes hommes. Ce cortège masculin était appelé « polazníci » (3). Ce groupe de jeunes hommes sélectionnés représentaient la force virile. C’était la manifestation physique d’un acte magique qui assurait la prospérité pour les habitants des maisons visitées. Les membres du cortège qui visitaient une maison étaient obligés de venir toujours par le bas côté du village ou de la maison. Cela signifiait un acte magique bienfaisant pour l’essor de chaque exploitation agricole visitée par le cortège de polazníci.
Un acte rituel de magie se déroulait alors dans la chambre de la maison et était réalisé avec l’aide d’animaux domestiques, souvent une brebis. Le maître de maison amenait la brebis dans la chambre, préparée pour ce jour (4), au moment où arrivait le cortège des polaznici. Cet acte magique était réalisé afin d’obtenir les meilleurs récoltes possibles lors de la saison prochaine. Il arrivait parfois que c’était un cheval, si sa taille le permettait, que le maître de maison amenait dans la chambre.

La valeur et le mérite des membres sélectionnés pour ce cortège de polazníci sera vérifié selon la qualité de la récolte de l’année suivante.

Dans le village de Terchová, le jour de la Saint-Thomas le jour de polaznik se nommait polazňa en dialecte local.

Dans la région de Kysuce, l’arbre de Noël était appelé polaznička, dans la région d’Orava, la partie le plus au nord de la Slovaquie, l’arbre de Noël était appelé podlaz en dialecte local.

En Slovaquie, la coutume de venir quêter avec l’acier était très répandue uniformément. Les cortèges des vœux des quêtes non seulement des petits garçons mais aussi des bergers étaient effectués, surtout dans les régions montagneuses. Les bergers, selon le rituel, restaient derrière la porte de la maison et prononçaient leurs vœux avec la formule : « Nesieme vám podlaz, panny Marie odkaz – Nous vous apportons un Podlaz – un message de la Vierge Marie ».

Le bon polazník qui prononçait un vœu et formulait un souhait selon la tradition, était choisi pour ses qualités physiques : il devait être jeune, en bonne santé et en force physique. Il devait arriver aux maisons du village pour prononcer son vœu de quête – de koleda – par le côté aval du ruisseau, de la rivière, pour que l’économie agricole soit florissante et pour qu’il n’y ait pas de régression économique de la vie agricole. Il ne pouvait être vêtu de fourrure le 21 décembre, c’était un mauvais signe car le port de fourrure signifiait la perte du bétail.

D’autres vœux

Dans les régions de la Slovaquie centrale (de Turiec, de Gemer, de Hont et de Novohrad), le cortège des vœux au jour de Saint-Thomas – la marche avec l’acier, était pratiqué jusqu’à la moitié du 20e siècle. Ce-jour-là, les femmes et les enfants prononçaient des vœux de quêtes avec l’acier ou un morceau de fer selon la tradition populaire. Ils venaient quêter tout en assurant le bonheur de la maison, on disait qu’ils accomplissaient la « Marche avec l’acier ».

Le fer symbolise la santé, la force physique « Je vous ai apporté de l’acier – Doniesol som vám ocele »… Leurs vœux de quêtes « je vous souhaite, nous vous souhaitons… », sont toujours dirigés vers l’abondance des récoltes, la bonne santé, le bonheur, beaucoup de volailles, beaucoup d’argent, les riches futur époux pour les filles à marier, les fiancées pour les garçons-jouvenceaux…

Dans certaines communes des régions de Šariš et de Kysuce, la pratique de la coutume du cortège des vœux le jour de Saint-Thomas était la même sauf que les membres du cortège apportaient des cailloux roulés par le ruisseau et sortis du ruisseau. Ils récitaient un souhait ardent de voir accomplir par la formule magique bienfaisante et offraient le caillou pour chaque maître de maison du village. Au printemps, ce caillou était apporté par le maître de maison sur le champ au moment de pratiquer le semis du blé. Il était alors assuré d’une bonne récolte avec de grands épis de blé.

La coutume de tuer le porc

Habituellement, le jour de la Saint-Thomas, il est de coutume de tuer le porc, ce qui est toujours usuelle en Slovaquie aujourd’hui. Les gens sont persuadés que la viande du cochon tué ce jour reste bonne très longtemps. Il est un fait que la viande mise à saler par temps froid se conserve mieux et que la charcuterie est l’un des mets favoris pour les fêtes de Noël.

Dans toutes les régions slovaques, selon l’ancienne coutume, le jour de la Saint-Thomas débute de bon matin par l’abattage du cochon élevé dans presque chaque maison du village. C’était un des grands moments et une occasion de convivialité festive persistant jusqu’à la fin du 20e siècle (5).

Les hommes de la maison préparent une grande cuve d’eau bouillante et une grande table, alors que les femmes préparent les récipients, les torchons, le sel et les épices. A l’arrivée de l’abatteur qui va tuer le cochon, les hommes boivent un gobelet d’eau-de-vie en honneur de l’animal qui sera tué. Après l’abattage, le sang est précieusement recueilli dans un récipient et brassé afin d’éviter la coagulation. Puis le porc est nettoyé, découpé en portions pour les cochonnailles (boudin, saucisses, saucissons, jambons, noix, etc.). La viande de porc se prête à la préparation de nombreux mets traditionnels et surtout à la conservation par salage et au fumage pour les saucisses fumées, le lard fumé, le saindoux et les rillettes, mets qui sont largement utilisés dans la cuisine traditionnelle slovaque. Un boudin blanc localement appelé Tomáš, est un témoignage du jour de la Saint-Thomas et de l’abattage traditionnel du cochon avant la Noël.

Dans la région de Turiec, au début du 20e siècle, toute la viande de porc était fumée (lard et viande) et une bouillie préparée avec le sang du cochon était servies aux invités à cette occasion, de même que la soupe à la choucroute avec les abats blancs du cochon (poumon, cœur, morceau de foie, sang ou les morceaux de viande rouge), soupe qui était offerte aux voisins qui avaient participé aux préparations de ce jour et à la famille. L’épaule du cochon était fumée, conservée et était préparée au menu de Pâques. Les côtes de porc étaient fumées et conservées pour la consommation avec des soupes de légumineuses pour les faucheurs, les ouvriers saisonniers de l’été.

Dans les régions de Liptov et de Turiec, les boyaux du cochon, bien lavés, sont préparés à la façon de boudins blancs mais ils sont remplis d’une farce composée de pâte de pommes de terre qui ont été préalablement râpées et assaisonnées avec de l’ail, du sel, du cumin et du poivre noir moulu, parfois avec de la marjolaine selon le goût local. Ensuite, rapidement ces boudins sont cuits à l’eau bouillante salée. Cette délicieuse préparation s’appelle droby, Liptovské droby.

L’amour et le mariage

Sur ce point, les croyances existaient dans de nombreux domaines. Par exemple, le 21 décembre, la jeune fille en âge de mariage qui voulait connaître son futur époux jetait sur le sol les os du porc (reste de l’abattage), pour la prophétie d’avoir un mari.

Les filles du village se ressemblaient dans la cour de la ferme et selon une coutume divinatoire, elles choisissaient des os du porc presque identiques et les arrangeaient sur le sol et elles appelaient le chien. Celui-ci saisissait un os et s’il l’apportait à une jeune fille, la première, elle pourrait se marier en premier dans l’année. Dans le village de Horný Vadičov (région de Žilina), on y raconte, que jadis, les filles se battaient pour ces os du porc et celle qui était la plus prompte, emportait tous les os et les offrait les au chien, si tout de suite il sautait (de contentement), elle serait mariée dans l’année. Mais il paraît aussi, que la plus prompte fille qui emportait la queue du porc et le suçait, son mariage était assuré.

Dans les régions de Kysuce et d’Orava, les jeunes hommes ou les bergers distribuaient, en se dissimulant, de petits arbres de Noël devant les maisons jusqu’à la Veille de Noël. Quand il voulait se faire connaître, la veille de Noël, en pendant la koleda, il se faisait connaître en jetant une poignée de grains d’avoine sur le sol chez le maître de maison lors de sa visite, il obtenait alors une récompense sous la forme d’un peu d’argent.

La prophétie agricole

Dans le village de Skalité (région de Kysuce), le matin de la Saint-Thomas, le maître de maison allumait le feu dans le poêle avec des bûches de bois dur, puis quand le bois brûlait bien, des tisons brûlants étaient sélectionnés, autant de tisons que le nombre du bétail qui était dans l’étable du maître de maison. Les tisons brûlants étaient alors placés sur le bord du poêle et chaque tison portait le nom d’une des bêtes domestiques. Il procédait alors à la prophétie pour la santé du bétail : si le tison brûlant s’enflammait en premier, cela signifiait un bon avenir pour la santé de cet animal domestique, si par contre le tison s’éteignait tout de suite, la bête allait être malade.

Autres interdictions à la Saint-Thomas

Autres interdictions : personne ne pouvait marcher dans le village en portant un vêtement déchiré, personne ne pouvait arriver dans la maison vêtu de fourrure, rien n’était prêter de la maison pour personne. Ne pas respecter ces interdictions apportait le malheur.

Notes

1 Le saint patron du jour, saint Thomas, est décrit comme ayant un caractère réaliste et qui faisait parfois carrément preuve de scepticisme. Il est, de ce fait, l’apôtre célèbre pour avoir touché les plaies de Jésus pour croire en sa résurrection, Il aurait alors poussé un cri de foi : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jacques de Voragine). C’est dans cette scène qu’il est le plus souvent représenté. Son attribut principal est une équerre, en allusion à la légende qui raconte qu’il aurait construit un palais aux Indes. Mais au 13e siècle il possédait un autre attribut qui était l’épée de son martyre. Au 15e siècle, selon une autre tradition, il porte la pique de son martyre.

2 Voir les fêtes de la Sainte-Catherine, de la Sainte-Lucie…

3 Le polaznik en singulier, les polaznici en pluriel, Polaznik dans la mythologie slave, est un personnage des fêtes du nouvel-an en tant que symbole de fécondité et de bonheur.

4 La chambre était nettoyée et blanchie pour le jour de la Saint-Thomas.

5 et encore pratiquée par endroit de nos jours même si les villages ont évolués et sont aujourd’hui aussi habités par des citadins venus « vivre à la campagne » et qui ne pratiquent donc plus l’élevage, la tradition est toujours respectée chez les villageois.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Sources

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009

Ľudová kultúra. Par Zuzana Beňušková. Kultúrne Krásy Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Z ľudovej kultúry Turca. Eva Pančuhová, Zora Mintalová a kolektiv. Matica slovenská. 2004

Le monde mythologique russe. Lise Gruel-Apert. Ed. Imago. 2014

Les saints compagnons du Christ. Emile Mâle. Ed. Beauchesne. 1958

La légende dorée. Jacques de Voragine. Ed GF Flammarion. 1967

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

Le temps de Noël. Tradition wallonne. Ed. Traditions et Parlers populaires Wallonie-Bruxelles asbl. 1992