Alice Hura – Charles Bugan
Saint Christophe est reparu sur le chevet de l’église de Tous les Saints à Ludrová.
Cette fresque qui était presque effacée a été restaurée durant la deuxième moitié de l’année 2018 par Monsieur Juraj Maták et est maintenant visible, comme elle devait l’être à l’origine, de loin.
La fresque extérieure de saint Christophe
A l’extérieur de l’église, sur le mur Est, se trouvait un reste d’une fresque représentant saint Christophe. Elle aurait été réalisée au XIVe siècle (14. storočia). (1)
Pourquoi une fresque de saint Christophe se trouvait-elle sur la façade orientale extérieure de l’église ?
Tout d’abord, il faut se rappeler qu’à cette période du moyen âge, les saints sont considérés comme des intercesseurs, qu’ils sont aussi des patrons de métiers et que lors du baptême, l’enfant recevait souvent le prénom d’un saint qui devenait son patron, son modèle, son protecteur.
Saint Christophe protégeait le chrétien de la maladie, de l’infirmité et contre la mort subite, la ″male″ mort, celle qui frappe sans que l’on soit confessé et absout de ses péchés. (2) C’était la grande crainte de l’époque car cela signifiait l’enfer. (3) Pour s’en protéger, il suffisait alors de voir l’image de saint Christophe pour être assuré de ne pas mourir dans la journée, tout au moins sans s’être confessé. (4) Saint Christophe était aussi prié lors des épidémies de peste.
Une autre raison de vénérer saint Christophe se trouve en sa qualité de ″protecteur″ des voyageurs. Ludrová se trouve a proximité d’un carrefour important situé dans la région montagneuse de Liptov et la ville de Ružomberok. Il s’agit non moins de l’axe Nord – Sud qui mène au centre de la Slovaquie par le col de Donovaly vers les villes de Nitra, Bratislava, ensuite l’Autriche et le centre de l’Europe pour le nord et en direction de la Petite Pologne par le sud (c’est la route qui conduit à Cracovie et vers la Baltique) et l’axe Est – Ouest est le lien entre la Transylvanie et la partie qui va vers la Moravie, la Bohême, l’Allemagne.
C’est la raison pour laquelle l’image du saint était grande afin d’être vue de loin. (5)
Notes
1 Národné kúlturne pamiatky na Slovenska. Okres Ružomberok. Ed Slovart 2008
2 La Male mort signifie une mort brutale, suicide, crime, accident exécution, guerre, épidémie…
3 Au XIIIe siècle (13. storočia) il n’est pas encore question du lieu ″d’attente″ du Jugement dernier que sera le Purgatoire.
4 Selon la légende, le premier qui regarde cette fresque, a l’assurance de ne pas mourir … tout au moins ce jour-là ! Ceci expliquerait le nombre important de visiteurs matinaux !
5 Légende dorée de Jacques de Voragine : ″Ces derniers mots nous expliquent le motif pour lequel saint Christophe est représenté avec des proportions gigantesques principalement aux portails des églises. On se croyait à l’abri des maladies et des infirmités dès lors qu’on avait vu la statue du saint, de là ces vers:
Christophore sancte, virtutes saut tibi tantae,
Qui te mane vident, nocturno tempore rident.
Christophore sancte, speciem qui eumque tuetur,
Ista nempe die non morte mala morietur.
Christophorum videas, postea tutus eas.″
Sources
Kostol Všetkých svätých v Ludrovej-Kúte. Svedok stáročí. Mária Anderssonová, Branislav Močáry, Peter Svrček ml, Jozef Vandák. SOVA.
Symbolyka a ikonografia v stredovekej nástennej maľbe Liptova. Štefan Valášek, Jana Brokutová, Katarina Vandáková, Jozef Vandák. Inertial Technologies. 2013
Národné kúlturne pamiatky na Slovenska. Okres Ružomberok. Ed Slovart 2008
Majster z Okoličného a gotické umenie Spiša okolo roku 1500. Dušan Buran. Slovenská Národná Galéria. Bratislava. 2017 (catalogue de l’exposition).
Le culte des saints catholiques en Europe centrale et orientale. Jean-Pierre Irali. Ed. Romaines. 2011
Reconnaître les saints. Symboles et attributs. B. Des Graviers et T. Jacomet. Ed. Massin. 2006
La légende dorée. Jacques de Voragine. Ed GF Flammarion. 1967
Saints guérisseurs de Wallonie et Ardenne. Daniel-Charles Luytens. Ed. Noir dessin production. 2003
L’art religieux du XIIIe siècle en France : Étude sur les origines de l’iconographie du Moyen Age et sur ses sources d’inspiration. Émile Mâle. Rd. Ernest Leroux. Paris 1898