L’église Saint-Martin à Martinček

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Le village de Martinček, Petit Martin en français, est situé à 5 km au nord-est de la ville de Ružomberok. Là, dans ce petit village paisible, se trouve une petite église de campagne, construite en 1260, remarquable par ses peintures murales datées de 1300.

Saint Martin est fêté le 11 novembre. Dans l’ancien calendrier, la croyance veut qu’il symbolise l’arrivée de l’hiver, tel saint Martin sur son cheval blanc. En Slovaquie, pays de montagnes, à cette date correspond normalement, la chute de la première neige et les derniers bergers rentrent au village.

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1 Histoire du village de Martinček

La petite agglomération de Martinček et son ancienne église ornent les premiers contreforts du massif de Choč dans la région de Liptov en Slovaquie septentrionale. Ancienne église seigneuriale du château-fort de Likava, déjà connue en 1332 sous le nom de Sanctus Martinus de Liptovia. Située au point culminant du versant est de la montagne chauve Mních (Moine en français) laquelle est occupée depuis l’âge du Bronze.

Au XVe siècle, il n’y avait pas de maisons paysannes connues. A la fin du XVIe siècle, le terrain où se trouve l’église appartenait alors à un cadastre parcellaire (aménagement du territoire) du village de Likavka, situé sous le château de Likava et un prêtre servait pour les habitants de ce village.

Le village de Martinček fut fondé après 1600. Dans le cadastre du domaine de Likava en 1625, le village de Sväty Martin – Saint-Martin y est mentionné. Les habitants étaient surtout des agriculteurs et étaient dépendants du château de Likava. Ils étaient obligés de ramener au château 6 chars de la récolte d’oignons.

Plus tard, le village s’est élargi sur les pentes de la colline Mních – Moine, sur les hauteurs du village et sur le versant est que domine l’église catholique romaine de Saint-Martin évêque.

Aujourd’hui, le village de Martinček, situé à l’altitude de 580 m, compte 390 habitants.

On aperçoit l’église sur la route principale reliant les villes de Ružomberok à Liptovský Mikuláš (anciennement Liptovský Sväty Mikuláš – Saint-Nicolas de Liptov).

Le village de Martinček, fondé après 1600 sur le domaine royal d’un terrain du village de Likavka, entoure l’église de Saint Martin qui donne son nom à ce petit village dans sa forme de diminutif : Martinček – Petit Martin.

2 L’église Saint-Martin

La fondation de cette église est datée vers 1260 sous le règne du roi Béla IV (1206 – † 1270 et, selon la légende, est attribuée à l’ordre des Templiers dits les Chevaliers rouges surnommés ainsi selon la croix pattée rouge sur le manteau qui les couvrait.

Les dernières découvertes de 1999, lors de travaux de restauration, permettent d’affirmer que les peintures murales à l’intérieur de cette église, parfaitement conservées en majorité, peuvent être datées au plus tard de 1300/1320. Lors de la Réforme au XVIIe siècle, ces peintures murales ont été couvertes sous des couches d’enduit de chaux lorsque l’église a été aux mains de l’Église évangélique luthérienne (probablement en 1610 ou en1669, selon des dates signées sur le mur oriental du sanctuaire).
À l’époque, les puissants seigneurs protestants Illésházy gouvernent la région du comitat de Liptov et de Trenčín.
Légende ou réalité ?

La colline Mnich doit l’appellation de ce lieu à une ancienne légende qui raconte qu’au début du XIIIe siècle, un ermitage ou une commanderie templière y était construite. Cette légende a donné l’appellation topographique Mnich, qui signifie Moine en français, à cette colline.

A ce jour, en l’absence d’écrits l’attestant, nous ne pouvons affirmer cette présence mais, sans écarter complètement cette hypothèse, nous pensons qu’il est plus que possible que l’église était la propriété du château de Likava.

Extérieur de l’église

Le bâtiment est composé d’une nef rectangulaire couverte par un plafond plat, d’un chœur à chevet plat, d’une sacristie et d’une tour-clocher à l’ouest accessible par l’intérieur de l’église.
Le toit est couvert de bardeaux.

Sur le chevet, une remarquable fresque de la Crucifixion. Détail particulier de cette Crucifixion, les anges qui se trouvent aux extrémités de la partie horizontale de la croix tiennent d’une main l’avant-bras du Christ.

Intérieur de l’église

Le sanctuaire

Le sanctuaire/chœur plus étroit que termine une abside plate, est percé d’origine de deux étroites fenêtres orientées pour une à l’est, la fenêtre d’axe et l’autre une fenêtre au sud qui sera élargie pendant la deuxième moitié du XIXe siècle.

Le sanctuaire, construit sur un plan carré, est couvert par une voûte sur croisée d’ogives avec des nervures lourdes chanfreinées reposant chacune sur un culot et qui converge au sommet sur une clef de voûte garnie d’un disque orné d’une rosette à huit pétales avec un bouton central.

Dans la seconde moitié du XIVe siècle une sacristie, accessible par le sanctuaire, est ajoutée à la façade du nord.

La fenêtre d’axe romano-gothique est entourée d’une riche polychromie d’origine avec en-dessous d’elle une des trois de croix de consécration qui se trouvent dans le sanctuaire.

Dans le mur du nord, un pastophorium d’origine gothique est encore visible. On remarquera que sur la partie horizontale supérieure, des triangles, pointes vers le bas ont été sculptés. On peut y voir aussi une croix de consécration.

Les fresques du sanctuaire

C’est surtout dans le sanctuaire que des figures peintes en bon état ont été découvertes. Les fresques s’étalent sur trois registres. Le registre inférieur est orné par un « drapé » sur tout le pourtour du sanctuaire. Cinq sur le côté Nord, huit sur l’abside et dix (dont un est coupé par un pastophorium) sur le mur Sud. Ce qui fait un total de 23 « drapés ».
Je pense que ces drapés ne sont pas des peintures de « remplissage », le peintre-artiste roman (et gothique) utilise les symboles comme on pourra le voir notamment aussi pour l’intrados de l’arc triomphal. Peut-être un 24e drapé a-t-il disparu lors de travaux ? Aurions-nous là alors la représentation « symbolique » des 24 Vieillards qui font face à Dieu dans l’Apocalypse de Jean ? (1) Apocalypse 4 : 4 « Autour du trône je vis vingt-quatre trônes, et sur ces trônes vingt-quatre vieillards assis, revêtus de vêtements blancs, et sur leurs têtes des couronnes d’or ».

Au plafond

Sur la voûte Est du plafond, le Christ bénissant et la Vierge Marie qui montre de la main droite la main gauche par laquelle on peut lire la double nature du Christ (trois doigts « libres » et deux collés l’un à l’autre).

Dans les trois autres voûtains, une suite d’anges habillés dans des habits de diacre, semblent accompagner le Christ et la Madonne.

Les fresques murales du mur Nord

Au registre inférieur, les « drapés » suivent la porte romane de la sacristie. A hauteur, le pastophorium avec la grille et la croix de consécration.

Au registre central, quatre personnages, probablement quatre apôtres. Quatre personnages se retrouvent sur l’abside et quatre sur le mur Sud. Ce qui nous fait un total de douze personnages, il s’agit donc très probablement des douze apôtres.

Quant au registre supérieur, on peut y voir le « Sein d’Abraham ». (2)

Abraham est entouré de deux autres figures de l’Ancien Testament, David et Salomon qui tiennent chacun une lyre.

Sur le mur de l’abside

Sur le mur Est, outre la fenêtre d’axe et une croix de consécration, quatre personnages, des apôtres se trouvent au registre central. Dans le registre supérieur, sous le Christ et la Madonne, deux personnages, des rois ? avec des instruments de musique.

Sur le mur sud

Au registre inférieur, le « drapé », un pastophorium et une croix de consécration sous la fenêtre.
Au registre central quatre personnages (apôtres ?) et au registre supérieur, deux personnages, des rois ?, avec des instruments de musique. Celui de gauche est en partie détruit par la baie de la fenêtre créée au XIXe siècle, quand l’église était encore sous le badigeon de chaux.

L’arc triomphal

On ne retrouve pas de peintures sur l’intrados de l’arc triomphal. Cela ne signifie pourtant pas qu’il n’y en avait pas à l’origine. Cependant, on peut remarquer la présence, de part et d’autre de l’intrados, d’une rangée de petits triangles sculptés.

Il pourrait s’agir de la représentation symbolique de la nature divine du Christ et de sa nature humaine (3), de la Mort et de la Régénération (4). Comme dit précédemment, des triangles, pointe vers le bas sculptés se trouvent sur le pastophorium du sanctuaire.

Les fresques de l’arc triomphal

A gauche, deux personnages ont été découverts. Le premier est un homme d’apparence jeune. Il s’agit certainement de saint Martin de Tours, représenté en tenue d’évêque. Il tient sa crosse de la main gauche et il bénit de la droite.

Le deuxième semble être saint Jean Baptiste. Il bénit de la main droite et tient dans la main gauche un nimbe crucifère comportant un agneau tourné vers la gauche et tenant dans sa patte repliée une oriflamme (5) symbole de la Résurrection.
Certains pensent qu’il s’agit de la représentation du Christ comme le Bon Pasteur (6).

Au dessus de ces personnages a été découvert un motif connu, l’image de saint Martin sur son cheval qui partage sa cape avec un mendiant qui s’appuie sur des béquilles près d’une porte étroite. La fresque est hélas presque effacée, on distingue à peine le cheval blanc et le mendiant.

Au centre

Dans la partie centrale de l’arc triomphal, à gauche, se trouve la représentation de la Jérusalem céleste et, à droite, un ange qui doit être rattaché à la représentation du Christ dans la mandorle qui se trouve à droite.

A droite

Sur le mur de droite, Le Christ dans une mandorle entourée par des anges qui volent. A gauche, un ange avec un livre et un ange avec une croix, à droite, un duo d’anges avec une torche flamboyante.

C’est le Christ de l’Apocalypse, (Apocalypse de jean I 16). Il est assis sur un arc représentant les cieux, les pieds posant sur un autre arc, plus petit, représentant la terre. Avec les deux épées qui sortent de sa bouche. C’est le jugement dernier. On peut d’ailleurs voir, en dessous de la mandorle, deux groupes de personnes. A droite ces personnes sont enchaînées, ce sont les damnés et à gauche un groupe d’élus.

La nef

Dans la nef de l’église, 9 croix de consécration d’origine ont été découvertes mais peu de fresques ont été retrouvées.

Le plafond plat est en bois et rénové récemment.

Sur le mur Sud, une peinture à l’huile, de la fin du XVIIIe siècle, élément de l’autel baroque, représentant saint Martin coupant son manteau pour l’offrir à un pauvre.

Sur ce mur Sud, deux fenêtres sont percées au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle (la fenêtre du côté sud du sanctuaire sera élargie en même temps) et un carrelage est posé au sol qui a pour effet de remonter le niveau du sol.

Sur le mur nord des peintures ont été découvertes sous deux couches de crépi. Mais ces peintures ne semblent pas avoir été créées en même temps.
Dans un cadre peint se trouve le visage jeune d’une personne qui est accompagnée de deux anges. Comme les autres parties du personnage ne sont plus visibles, on suppose qu’il s’agit de l’archange Michel qui pèse des âmes. (7)

Dans le cadre accolé à gauche, un personnage de profil se penche vers la représentation de droite, mais excepté l’architecture d’un baldaquin, il est impossible d’avoir plus de détails.

A côté de cette fresque, se trouve un fragment de peinture murale réalisé sur une couche plus jeune. Le fragment est partiel et difficilement indentifiable.

Le style de peinture révèle un artiste du XIVe siècle proche des peintures murales de l’église de Liptovské Sliače.

Il est possible qu’il s’agisse du groupe des femmes saintes. La figure d’une femme à droite avec un foulard sur la tête ressemble à une composition de figure de sainte Hélène dans l’église de Liptovské Sliače.

La paire de silhouettes à gauche peut représenter deux des quatre saintes connues, la première pourrait être sainte Barbe (son attribut est une tour) et l’autre pourrait être sainte Marguerite ?

Il reste encore un fragment de fresque.

Sur le pourtour de la nef, se trouvent des peintures représentant le chemin de croix et 9 croix de consécration.

Enfin, sur la partie Ouest de la nef se trouve la porte qui mène vers l’escalier de la tour-clocher et à la tribune d’orgue.

La tribune d’orgue

Sur la balustrade de la tribune, on peut voir des représentations, récentes, des évangélistes entre lesquels est intercalé un ange (Jean et Luc à droite ; Marc et Matthieu à gauche ainsi qu’une représentation de l’Agnus Dei).

Au mur Ouest de la tribune, une inscription datée du 16e siècle.

La tour-clocher

La tour-clocher à l’ouest est seulement accessible par l’intérieur de l’église et comporte une remarquable fenêtre gothique sur son côté ouest. Le meneau d’origine est disparu et est remplacé par une pierre. Au-dessus de cette fenêtre, une fenêtre plus étroite et plus haut, dans le clocher proprement dit, deux autres fenêtres étroites sur les quatre côtés de la tour.

Trois cloches se trouvent dans la tour : la première date de 1594, une autre de 1763 et la troisième de 1842.

La cloche de 1594 comporte l’inscription latine « VERBUM DOMINI MANET IN ETERNUM A : D : 1594 ».

Celle de 1763 coulée par Ján Juraj Knobloch à Banská Bystrica comporte l’inscription latine « GEORG KNOBLOCH NEOSOLII 1763 ».

Et la troisième cloche de 1842, coulée par Vojtech Littman de Banská Bystrica et qui comporte l’inscription latine « MARIAE IN HONORE SANCTAE » et « REFUSA PER ADALBERTUM LITTMAN NEOSOLII 1842. »

Sur la colline

Sur le côté Sud de la colline on peut remarquer de petites constructions en bois en forme de toit apportant un caractère mystérieux à l’environnement de l’église Saint-Martin.
Les habitants les appellent « Daskal » (de l’allemand dach qui signifie toit). Il s’agit en fait de petites couvertures de puits profonds d’environ 3 à 5 m et qui servent de stockage pour les pommes de terre et les légumes pour l’hiver.

Notes

1 Je n’ai pas trouvé de renseignements pouvant m’orienter ou me renseigner sur la signification de ces « drapés ». Je me permets donc d’émettre une hypothèse concernant cette représentation. On retrouve aussi ce type de « drapé » (mais plus nombreux) au registre inférieur du sanctuaire de l’église Saint François d’Assise dans le village de Poniky près de Banská Bystrica.

2 Le thème du Sein d’Abraham était souvent représenté au milieu du Moyen Age pour connaître son déclin au cours du XVe siècle. Disparition probablement due à l’apparition du Purgatoire. Le Sein d’Abraham représente le Patriarche accueillant les élus entre ses bras (représentation courante au XIe siècle), soit dans un pan de son vêtement.

3 Dictionnaire des symboles. J Chevalier et A Gheerbrant. Ed. Robert Laffont. 2002

4 Selon Marija Gimbutas, « pareilles rangées de triangles sont l’ornement typique des crochets ainsi que des plaques de pierre à l’image de la déesse de la Mort et de la Régénération déposées dans des tombes mégalithiques du Portugal. »
Le langage de la déesse. Marija Gimbutas. Col. Des femmes Antoinette Fouque. Dumas-Titoulet Imprimeurs 2005
A Catal Hüyük (Turquie aujourd’hui), dans le sanctuaire du niveau VII, on a découvert des triangles peints en rouge et noir, avec plus bas, un relief en plâtre d’une déesse enceinte.

5 « Voici l’agneau de Dieu » dit Jean Baptiste (évangile de Jean I, 29). Au vu de son attitude (bénissant) et du symbole que le personnage tient dans la main gauche, je pense qu’il s’agit bien de saint Jean-Baptiste.

6 Mária Novotná et Juraj Maták Ranogotický Kostol sv. Martina v Martinčeku

Comment y aller ?

Le village de Martinček – Petit Martin est situé à 5 km au nord-est de la ville de Ružomberok.

A partir de la ville de Ružomberok, prendre la direction de Dolný Kubin. Après 1 km environ, prendre à droite vers le village de Martinček.

A voir aussi : http://www.apsida.sk/c/326/martincek

PS: pour visiter l’intérieur de cette belle église, un panneau d’information se trouve au-dessus du sentier qui conduit du village vers l’église. Ce panneau renseigne la personne de contact où l’on peut s’adresser (attention, étant donné qu’il s’agit souvent d’un(e) bénévole, la visite de l’intérieur de l’église dépend de la disponibilité). Le site et l’entrée de l’église est gratuit.
Nous vous conseillons de garer votre voiture sur le parking, gratuit, qui se trouve devant la mairie, Obecný úrad en slovaque.

Si vous avez un peu de temps, une petite promenade vous fera apercevoir, au Nord-Est, les ruines du château de Likava et au sud, près de la nouvelle chapelle et au bord de la colline vous avez une très belle vue panoramique avec au loin (sur le côté gauche d‘une cheminée) l’église romane de Tous les Saints de Ludrova-Kút. Sur la route menant de Ružomberok vers Banská Bystrica, le village de Vlkolinec (musée ethnographique en plein air habité, classé au Patrimoine de l’UESCO) est à découvrir. Ces visites sont payantes

Références

Národné kúlturne pamiatky na Slovenska. Okres Ružomberok. Ed Slovart 2008

Gotické kostoly vidiek. Štefan Podolinský. Zostavil : Daniel Kollár. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama

55 Najkrajších Gotických pamiatok Slovenska. Stano Bellan, Alexander Vojček. Ed. Vydavateľstvo Priroda. 2009

Ranogotický kostol sv.Martina v Martinčeku. Mária Novotná, Juraj Maták

Dictionnaire d’iconographie romane. Marc Thoumieu. Ed. Zodiaque.

La fresque romane. Paul-Henri Michel. Ed. Gallimard. 1961

Art roman. Norbert Wolf. Ed. Taschen. 2007

L’art roman, architecture, sculpture, peinture. Sous la direction de Rolf Toman. Ed. H.F ? Ullmann. 2004/2007

Le culte des saints catholiques en Europe centrale et orientale. Jean-Pierre Irali. Ed. Romaines. 2011

Dictionnaire d’Architecture. Mathilde Lavenu, Victorine Mataouchek. Ed. Jean-Paul Gisserot. Gisserot patrimoine. 1999

Dictionnaire des symboles. J Chevalier et A Gheerbrant. Ed. Robert Laffont. 2002

La Sainte Bible. Par Louis Segond. La Société Biblique Canadienne. 1910

Apocalypse de Jean (texte du cours). Jean Hadot. Octobre 1994

Autoatlas Slovenská Republika Supertouring. Freytag et berndt. 12/2011

L’église de Tous les Saints à Ludrova – Kút

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

La vieille église romano – gothique, catholique romaine, de Tous les Saints de Ludrova – Kút (550 m) dans la région de Liptov, est proche de la ville de Ružomberok (env. 1 km). Cette église est située sur la route entre le village de Ludrová et Ružomberok, à un endroit appelé Kút.

L’église de Tous les Saints est un monument historique classé et fait partie du patrimoine culturel slovaque.

Cette église romano – gothique présente un type d’église de village de la période féodale, qui est typique dans la région de Liptov.

L’église de Ludrová, dans le hameau de Kút a environ 700 ans et, selon une hypothèse, elle fut fondée au XIIIe siècle (13.storočia). Il se peut qu’elle ait été construite à l’endroit d’un bâtiment sacré beaucoup plus ancien, selon des fragments de céramiques découvertes datant du Xe – XIe siècle (10 – 11.storočia)

Le terme Kút, signifie, en slovaque Coin, mais je pense que le terme slovaque n’est pas le bon pour cet endroit, car auparavant, la langue officielle, et parlée par la noblesse, était le hongrois, or en hongrois Kút signifie Puits. Il est donc bien probable que cette église fut construite sur un ancien lieu sacré où l’eau avait son importance et que les chrétiens ont donné une nouvelle réaffectation à ces lieux, comme à de nombreux endroits.

Sur le territoire de Ludrová, se trouve la colline Borovnisko comprenant la côte de Strana (630 m) et la côte de Pancova (686 m), où, selon une recherche archéologique réalisée dans le plan du cadastre d’habitations de Ludrová, on y a découvert un lieu fortifié daté de l’âge du bronze et un lieu celte daté du IIIe siècle av JC, période de La Tène.

Un élément surprenant est que cette église se trouve hors du village de Ludrová et était essentiellement fréquentée par la noblesse des environs.

Nous savons aussi qu’au Moyen Âge, à proximité de l’église, se trouvait un chemin utilisé par les marchands. Chemin qui allait de la Hongrie vers la mer Baltique.

Des composants architecturaux particuliers, comme la fenêtre axiale de style roman qui se trouve dans le choeur, peuvent nous faire croire, en effet, que l’église existe depuis le XIIIe siècle (13.storočia).

L’intérieur du sanctuaire est d’une rare beauté avec ses fresques peintes par un artiste inconnu, vers l’an 1420. Les fresques représentent un cycle christologique en 34 épisodes et constituent le plus vaste cycle de la vie de Jésus de Nazareth en Slovaquie.

La construction de l’église est, à l’origine, simple. Elle comporte une nef centrale, un chœur carré comportant une voûte costale et est orientée Est – Ouest.

Au XVe siècle (15.Storočia), on va y adosser une sacristie au Nord ; une nef latérale, avec deux fenêtres de style gothique tardif et la porte d’entrée que nous connaissons aujourd’hui, dans la partie Sud ainsi qu’une tour à l’Ouest. La nef latérale comportera aussi un étage en bois tout comme celui de la nef principale, mais il sera démonté dans les années 1960 au vu de son état de délabrement.
L’église aura son aspect définitif au 17e siècle par la transformation de la tour d’église et la décoration de graffiti en style renaissance.

Le terrain qui entoure l’église est clôturé, pour sa défense, par une muraille de pierre couverte de bardeaux, et comportait comme seules ouvertures des regards dans les murs pour les archers (aujourd’hui rebouchées) et une entrée avec une porte en style classique comportant les monogrammes des nobles Pierre et Morris de la famille Rakovsky.

La famille Rakovsky de Rakovo avait le patronage de cette église et était la propriétaire du village de Štiavnica à Liptov. Un membre éminent de la famille Rakovsky est inhumé dans le sous-sol de l’église. Sur le mur Ouest, on peut voir des stèles épitaphes.

Quelques détails d’architecture de l’église

La nef et l’étage en bois, datant du XVIIe siècle (17.storočia).
Les peintures dans le sanctuaire et sur l’arc de triomphe datent elles du XVe siècle (15.storočia) et sont de style gothique de l’âge d’or.
Dans les années 40 du XIXe siècle (19.storočia), l’église et les fresques ont été restaurées.
Au tournant des XIXe et XXe siècles, les peintures de l’église sont restaurées par le peintre Josef Hanula, puis dans les années 1960 à 1970, par Mikulas Štalmach, restaurateur d’art, qui découvre sur le mur nord de la nef, la plus vieille peinture, un triptyque datant des années 1400-1420.
En 2015 une nouvelle restauration des peintures est effectuée par l’Atelier de restauration de Levoča.

Le plus vaste cycle christologique de Slovaquie datant de 1420

Sur le mur du sanctuaire, un peintre inconnu a, vers l’an 1420, créé un Cycle christologique. En tout, 34 épisodes de la vie de Jésus Christ sont représentés..

Sur la voûte du sanctuaire, nous avons comme décoration dominante : une composition du Jugement dernier à l’Est, le Couronnement de la Vierge Marie à l’Ouest et côté Nord, six apôtres tout comme le côté Sud. On peut aussi remarquer que le Couronnement de la Vierge Marie est surmonté d’un aigle, symbole de saint Jean.

Le mur de l’arc de triomphe est décoré par les figures de quatre saintes – Catherine, Marguerite, Barbe et Dorothée, sur les angles du chœur. Nous y voyons aussi la parabole de l’évangile des vierges folles et des vierges sages (1). Les « vierges sages », par opposition aux « vierges folles » sont celles qui gardent leur lampe allumée dans l’attente de l’époux, c’est-à-dire le Christ. Ici, les « vierges sages » sont reconnaissables car elles portent leur lampe droite alors que les « vierges folles » en sont dépourvues (Mt 25,1-13).

Sur le mur Nord, nous voyons La Cène, en deux versions. L’artiste a subtilement travaillé pour nous les représenter, il utilise la table du repas pour séparer les deux scènes. La première, au-dessus de la table, selon les évangiles de Mathias (Matthieu), Marc et Lucas (Luc), le Christ est à table avec les apôtres. La deuxième, en-dessous de la table, selon l’évangile de Jean, où le Christ lave les pieds des apôtres.

Autre fresque extraordinaire, et représentation rare, sur le mur Sud du chœur, l’épisode de la Pendaison de Jude (Judas).

Sur l’autel, de style gothique postérieure, se trouve la sculpture du Couronnement de la Vierge Marie, datant des années 1510 – 1520. Cependant, aujourd’hui, cet autel se trouve au Musée Liptovske de Ružomberok – Musée de la Région de Liptov, car il fait partie des collections de ce musée depuis 1969.

Dans la nef, sur le mur Nord, nous pouvons découvrir une autre représentation rare et ce qui est probablement les fresques les plus anciennes : le triptyque de la Madone Protectrice, le Christ de Douleur et saint Jean Baptiste, datant des années 1400 – 1420, ainsi que quatre croix de consécration. L’on peut encore apercevoir un reste de deux croix sous la peinture plus jeune sur l’intérieur du mur de l’arc de triomphe.

Quant à l’orgue, daté de 1694, suite à des actes de vandalisme, il fut retiré de l’église. Il se trouve aujourd’hui, en dépôt, au Musée Lipovske de Ružomberok, attendant une restauration.

Les offices se terminèrent en 1953, l’église désacralisée et placée dans le patrimoine du Musée de Liptov de Ružomberok.

A l’extérieur, outre le reste de la fresque représentant saint Christophe sur le mur Est, se trouve un très vieux tilleul, âgé de 400 ans qui, s’il pouvait parler, nous révèlerait beaucoup d’histoires de ce lieu. On trouve aussi quelques vieilles tombes autour de ce vénérable tilleul.

Autour de la fenêtre de la nef latérale, côté Sud, on peut apercevoir quelques fragments de peinture ornementale qui pourrait laisser croire que la façade, ou tout au moins le tour de cette fenêtre, était peint.

Notes

1 Il n’y a ici que trois vierges sages et trois vierges folles alors que dans Mt 25,1-13 il est question de deux groupes de cinq.

Liptovske Museum à Ružomberok : http://www.liptovskemuzeum.sk

Sources

Kostol Všetkých svätých v Ludrovej-Kúte. Svedok stáročí. Mária Anderssonová, Branislav Močáry, Peter Svrček ml, Jozef Vandák. Ed. Branislav Močáry SOVA

Národné kúlturne pamiatky na Slovenska. Okres Ružomberok. Ed Slovart 2008

NB : Les prix indiqués sur la photo sont indicatifs et susceptibles d’être changés.

La Medovina slovaque

Mgr Alice Hura

La Medovina slovaque, une boisson à découvrir ? Certainement. D’une belle couleur jaune ambré, la Medovina est une boisson traditionnelle commune aux pays slaves ʺla boisson des roisʺ.

La Medovina est le résultat d’une fermentation d’une solution composée d’eau, de miel, de plantes aromatiques et d’épices.

C’est ainsi qu’en Slovaquie, suivant les régions, il existe plusieurs – une centaine – recettes traditionnelles de Medovina. Par exemple, dans la région d’Orava vous trouvez la Medovina aux myrtilles.

La meilleure Medovina est obtenue par une fermentation à froid à une température de 15 à 17 °c.
Cependant, ce processus est lent et compliqué, c’est pourquoi la plupart du temps on trouve une Medovina obtenue après avoir été amenée à ébullition. On peut évaluer la durée de maturation d’une bonne Medovina entre trois à quatre mois pour la qualité classique alors que la qualité supérieure peut prendre cinq années. La durée de la maturation va influencer les qualités aromatiques, la couleur d’ambre dorée ainsi que le goût de miel légèrement épicé et aromatisé. Suivant le processus de fermentation, la teneur en alcool va varier de 11,5 à 15 %.

La région d’origine de la Medovina serait la région de la chaîne de montagnes d’origine calcaire qui s’étend en Moravie, en Slovaquie et en Pologne.

Jusqu’au 19e siècle, la Medovina était la boisson la plus populaire en Slovaquie. La plus appréciée était déjà fabriquée au 18e siècle dans la ville de Levoča.

De nos temps, cette boisson est toujours aussi appréciée et nous la trouvons, déclinée sous différents goûts, dans la plupart des fêtes populaires, marchés traditionnels…

La Medovina, un élixir de jeunesse et médicament ?

La Medovina va apporter toutes les substances bénéfiques du miel, source d’énergie.

Les anciens disent que la Medovina retarde le vieillissement, assure la longévité, contribue à la conservation de la beauté et apporte la force.

Ils disent aussi que la Medovina soulage l’estomac irrité et empêche la formation d’ulcères.

Quand boire la Medovina ?

Cette boisson au goût agréable de miel légèrement épicé peut être consommée en apéritif ou en digestif. Voici quelques recommandations.

En apéritif, elle peut être servie fraîche avec un zeste de citron.

En hiver, on peut la consommer chaude, mais sans la faire bouillir, ce qui aurait pour effet d’annuler toutes les substances bénéfiques contenues dans le miel et/ou les aromates et épices.

On peut aussi déguster la Medovina à température ambiante et avec du pain d’épice.

A côté de la Medovina classique (nature), on trouve maintenant la Medovina au goût d’amandes, d’herbes des montagnes, de griottes, de cassis…

La société Apimed située à Dolná Krupá, un village près de Trnava, produit et commercialise différentes qualités de Medovina ainsi que d’autres produits venant d’apiculture que l’on peut trouver sur presque tout le territoire slovaque. A découvrir sur : www.apimed.sk

Voici une recette traditionnelle de Medovina

Mélangez 10 kg de miel et 50 litres de l’eau et laisser cuire 3 heures à feu doux tout en mélangeant en permanence et en écumant la mousse,
Après les 3 heures, laissez refroidir,
Après refroidissement, transvasez dans un tonnelet et ajoutez 2 noix de muscade et 10 g de cannelle,
Laissez fermenter, sans mouvement, pendant 12 mois, jusqu’à ce que la Medovina obtienne sa qualité,
Transvasez-la dans des bouteilles.

NB : A utiliser comme médicament populaire pour les maladies des parties supérieures des voies respiratoires comme les maux de gorge…

Skanzen, musée en plein air en Slovaquie

Charles Bugan

Le mot skanzen est un terme qui peut être traduit par musée en plein air et qui nous vient de Suède. C’est dans ce pays, près de Stockholm, qu’est né le premier skanzen, en 1891, dont le concept était de présenter la Suède d’autrefois.

En Slovaquie, plusieurs musées en plein air ont vu le jour au cours du 20e siècle. Ils sont « l’image » ethnographique d’une période passée, pas si lointaine. Ces institutions scientifiques spécialisées ont pour but de préserver la culture populaire sous la forme d’un musée reprenant les bâtiments dans lesquels les habitants du village vivaient leur vie familiale mais aussi la partie professionnelle, sociale, cultuelle et culturelle qui rythmait leur vie.

Ces bâtiments sont issus de l’architecture populaire, cette architecture qui ne connaissait pas d’architecte et encore moins d’urbaniste mais qui était pleine de bon sens, réalisée par de simples gens, ouvriers habiles, ayant une bonne connaissance du matériau disponible dans leur région : le bois. C’est avec ce matériau noble que les menuisiers charpentiers de ces régions ont conçus des bâtisses orientées vers leur usage quotidien pour l’homme mais pour aussi son environnement naturel qui devait lui permettre de subsister dans une nature pas toujours clémente. (1)

Chaque skanzen slovaque à ses particularités, notamment au point de vue ethnique, on peut, dans tel skanzen, découvrir la culture ruthène, dans tel autre la culture de la région d’Orava… de même que l’on peut y découvrir, durant la saison d’ouverture, des activités folkloriques et artisanales le plus souvent avec des personnes en tenues traditionnelles qui pratiquent devant vous les métiers ou travaux d’antan.

Quelques musées en plein air en Slovaquie

Le skanzen de Zuberec

L’architecture populaire est bien représentée dans les musées en plein air. Les visites de ces musées s’accompagnent souvent d’animations organisées durant la saison touristique. Le musée de plein air de Zuberec n’échappe pas à cette règle.
On peut y admirer un ensemble d’une cinquantaine de bâtiments de l’architecture rurale répartis en des zones caractéristiques pour les collections d’habitat ancien de la région d’Orava.

Múzeum oravskej dediny, Zuberec – Brestová

Le skanzen de Stará Ľubovňa

Musée de l’architecture populaire traditionnelle en plein air de Stará Ľubovňa, situé sous le château de Stará Ľubovňa « Ľubovniansky hrad » élevé sur un piton rocheux haut de 711 m, permet de se plonger quelques instants dans les habitations de la région du siècle dernier et par là de se laisser aller à imaginer la vie de ses habitants et c’est toujours avec une certaine émotion que l’on pénètre ainsi dans l’intimité de la vie passée.
De la remarquable église uniate dédiée à saint Michel archange jusqu’au moulin, en passant par la naissance d’un enfant, le mariage, la fête de Noël et… la mort, ce skanzen nous fait revivre les moments forts qui rythmaient la vie des habitants de la région de Spiš, au nord de la Slovaquie.

http://www.hradlubovna.sk/sk/home

Le skanzen – Šarišské múzeum à Bardejovské kúpele

Dans la station thermale de Bardejovské kúpele, 5 km près de la ville de Bardejov, se situe le Musée de l’architecture de la culture populaire de la région de Šariš, cette exposition représente la culture et l’architecture populaire des deux groupes ethniques slaves habités les Carpates orientales en Slovaquie du nord-est : les Ruthènes et les Slovaques.
On peut y voir deux très belles églises en bois de rite gréco-catholique (uniate).

http://www.muzeumbardejov.sk/expozic/skanzen.htm

Le skanzen de Martin

Outre l’intéressant musée ethnographique, la ville de Martin propose un musée en plein air qui offre un regard sur le type d’habitat du siècle dernier dans les régions d’Orava, Turiec, Liptov, Kysuce – Podjavorinské
143 bâtiments, dont 22 sont accessibles, se retrouvent sur une aire de 15,5 ha.
On peut aussi y découvrir l’ancienne église catholique romaine en bois du village de Rudno avec son autel et sa chaire à prêcher.

http://www.skanzenmartin.sk

Le skanzen de Pribylina

Situé sur la route qui mène aux Hautes Tatras – Vysoké Tatry, outre les bâtiments habituels d’architecture populaire, ce skanzen propose la visite d’un manoir du 14e – 16e siècle ; l’église gothique Notre-Dame avec ses fragments de peintures murales originales des 14e et 15e siècles, dont on peut toujours voir aujourd’hui la tour d’origine de cette église près du skanzen archéologique d’Havránok – Liptovská Mara ; une école et dans la partie supérieure une exposition concernant l’exploitation forestière et leur chemin de fer.

http://www.liptovskemuzeum.sk/expozicie/muzeum-liptovskej-dediny-pribylina/

Le skanzen archéologique d’Havránok (Liptovská Mara)

Situé près du lac de barrage de Liptovská Mara, l’archéoskanzen d’Havránok est situé sur un important site de la culture de Puchov. Il propose la reconstruction d’habitats et d’une ancienne fortification de même qu’un sanctuaire avec des traces de rituels religieux celtiques.

http://www.liptovskemuzeum.sk/expozicie/archeologicke-muzeum-v-prirode-liptovska-mara-havranok/

Le skanzen de Svidnik

Situé à l’entrée de la ville de Svidnik, le skanzen est dédié à la culture des Ruthènes et Ukrainiens de Slovaquie.
On peut y voir la très belle église en bois qui se trouvait dans le village de Nová Polianka et construite en 1766.

http://www.svidnik.sk/navstevnik/skanzen

Sites web d’autres skanzens

http://www.kysuckemuzeum.sk/muzeum-kysuckej-dediny

http://www.muzeumhumenne.sk/skanzen.html

http://spmnitra.sk/expozicie-a-skanzen/skanzen

http://www.staratura.sk/gazdovsky-dvor-myjava-tura-luka

http://www.banskyskanzen.sk

http://www.lesy.sk/showdoc.do?docid=6432

Notes

1 Lire notre article sur les constructions en bois de Slovaquie : http://vaheurope.eu/?p=563

Sources

Skanzeny. Iveta Zuskinová. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama. 2008

Le héros slovaque Jozef Gabčík

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Jozef Gabčík, né le 8 avril 1912 à Poluvsie près de Rajecké Teplice en Slovaquie – mort le 18 juin 1942 à Prague en Tchéquie.

Le Slovaque Jozef Gabčík était un parachutiste tchécoslovaque intégré à l’Opération Anthropoïd, préparée par l’armée britannique. L’objectif de l’opération Anthrpoïd : un attentat sur la personne de Reinhard Heydrich, Reichsprotektor – Gouverneur du Protectorat de Bohême-Moravie, chef de la Gestapo, organisateur de la Solution finale et membre éminent du 3e Reich allemand.

Cet attentat contre Reinhard Heydrich s’est déroulé le mercredi 27 mai 1942 à Prague, il y a 75 ans.

Jozef Gabčík, est né le 8 avril 1912 à Poluvsie un hameau près de Rajecké Teplice non loin de la ville de Žilina, en Slovaquie septentrionale. Son père, František, est un ouvrier et sa mère, Mária, est une femme au foyer.

Jozef est le plus jeune des quatre enfants de la famille Gabčík. Il a deux frères, Alexandre et Michel, et une sœur Františka (Françoise).

De 1927 à 1932, il étudie à l’école professionnelle de České Kunovice le métier de ferronnier-serrurier. Dès octobre 1932, il commence son service militaire dans le 14e régiment d’infanterie à Košice et pendant ce service il termine l’école militaire de sous-officiers à Prešov.

Jozef Gabčík et son engagement patriotique

En 1934, il devient caporal et continue sa carrière militaire en contestation avec son père qui n’est pas d’accord pour la carrière militaire de son fils. Jozef Gabčík reste au service militaire à Košice, jusqu’au 1er avril 1937, quand, après la mort précoce de son frère et la demande instante de sa mère, il abandonne sa carrière militaire et commence à travailler dans l’usine d’armement produisant du gaz de combat de Žilina.

C’est là que lors d’un accident de travail, une fuite de ce gaz, Jozef Gabčík est blessé et qu’une menace pèse sur lui : la perte de la vue. Après les soins et son rétablissement, il est nommé en qualité de magasinier dans l’usine de gaz de combat de la ville de Trenčín.

Entre-temps, depuis le 14 mars 1939 et suite aux accords de Munich, en septembre 1938, et le démantèlement de la Tchécoslovaquie, il existe un État slovaque – Slovenský Štát inféodé à l’Allemagne nazie dirigé par un prêtre catholique, Monseigneur Jozef Tiso.

Craignant que les magasins de gaz de combat tombent dans les mains des nazis, Jozef Gabčík sabote un magasin de gaz. Il sait qu’il va être poursuivi au tribunal pénal et le 4 juin 1939, Jozef Gabčík émigre illégalement avec un camarade en Pologne, à Bronowice près de Cracovie, où il s’engage dans l’armée tchécoslovaque clandestine. C’est là qu’il va rencontrer Jan Kubiš et qu’ils vont se lier d’amitié.
Mais la situation en Pologne s’envenime, elle est envahie par l’Allemagne le 1er septembre 1939. Fuyant à nouveau, Jozef Gabčík et Jan Kubiš s’embarquent à Gdansk en Pologne dans le bateau Chrobry (qui peut être traduit comme « le Brave ») : direction : la France où ils vont débarquer à Boulogne-sur-Mer. Jozef Gabčík avec d’autres volontaires sont installés dans les casernes à Lille. Là, le 2 août 1939, Jozef Gabčík et Jan Kubiš s’engagent pour cinq ans dans le Légion étrangère.
Le 9 août 1939 Jozef Gabčík et Jan Kubiš embarquent au port de Marseille vers le port algérien Oran. Ils entrent dans le 1er régiment de la Légion étrangère à Sidi-Bel-Abbes en Algérie, et 18 septembre 1939 ils sont attachés au 1er régiment infanterie de la Légion étrangère à El-Arich. Mais leur contrat au service de la Légion étrangère en Algérie sera de courte durée car la Seconde guerre mondiale éclate.

Jozef Gabčík, soldat dans l’Armée tchécoslovaque en Exil

Gabčik et Kubiš reviennent en France, le 24 septembre 1939 à Marseille, puis le 26 septembre 1939 ils sont dans la ville d’Agde. C’est là que se trouvent les volontaires slovaques et tchèques qui participent aux combats français contre l’armée allemande nazie en juin 1940 avant d’être démobilisés pendant l’armistice de la France avec l’Allemagne nazie du 22 juin 1940.

C’est donc dans le Midi, à Agde que Jozef Gabčík et Jan Kubiš s’engagent dans le 1er régiment de l’infanterie tchécoslovaque en France, il s’agit de l’armée clandestine, crée par le général Rudolf Wiest, futur commandant de l’Armée tchécoslovaque pendant le Soulèvement nationale slovaque en août 1944.

Jozef Gabčík occupe la fonction d’adjoint du sergent du peloton dans la 12e compagnie. À la fin de 1939, le 29 décembre 1939, il est élevé au rang de sergent. En 1940, Jozef Gabčík participe aux combats défensifs du front français, mais au milieu du mois de juillet 1940 après la défaite de la France, il va être évacué. En effet, le 1er régiment de marche des volontaires tchécoslovaques sous le commandement de Jan Kratochvíl est arrivé à Coulommiers les 11 et 12 juin 1940. Jozef Gabčík y est en fonction en qualité de chef du groupe de la 12ème compagnie mitrailleur, mais après arrivée d’un ordre pour le déplacement du groupe sur les rives de la Seine et passer de l’autre côté de cette rivière, l’amirauté britannique envoie des bateaux dans les ports de Bézier et de Sète afin de sauver les volontaires tchécoslovaques qui sont sous la menace d’être livrés aux nazis et internés dans les camps de concentration.

C’est donc le 12 juillet 1940 qu’il part vers la Grande Bretagne par le bateau Rod el Farag pour un service militaire dans la 3e compagnie du 1er bataillon d’infanterie de la Grande Bretagne basé dans le village de Cholmondeley (en Cheshire, Angleterre), où le 7 mars 1941, Gabčík est élevé au rang d’adjudant d’infanterie. Du 2 au 22 février 1941 il fréquente le cours militaire pour les officiers.

Mais Jozef Gabčík s’intéresse aux missions militaires spéciales dans les arrières ennemis. Avec l’aide du lieutenant-colonel Barovsky, l’adjudant Jozef Gabčík est intégré dans l’entraînement militaire spéciale du SOE britannique et dès le mois de juillet 1941, jusqu’en octobre 1941, Gabčík se forme en Grande-Bretagne aux nombreux entraînements militaires de cette fonction. Jozef Gabčík devient l’un des huit premiers du groupe sélectionné à l’entraînement de parachutistes dans des cours spéciaux en Écosse et devient le commandant en chef d’un groupe de parachutistes. Un autre membre de ce groupe, le sergent Karel Svoboda (1), se blesse au cours des entraînements et est remplacé par Jan Kubiš à la demande personnelle de Jozef Gabčík.

Le 3 octobre 1941, le chef du service des renseignements tchécoslovaque Frantisek Moravec convoque les membres du groupe Anthropoïd et leur annonce que la décision d’éliminer Reinhard Heydrich a été prise.

Jozef Gabčík, le slovaque, est choisi, avec l’adjudant Jan Kubiš, le morave (tchèque), pour exécuter la mission. (2)

La mission Anthropoïd

L’avion bombardier Halifax décolle le 28 décembre 1941 vers 22 heures de l’aéroport militaire de Tangmere au sud de l’Angleterre. Avec Gabčík et Kubiš à bord se trouvent aussi les membres du groupe Silver A et Silver B. Le lendemain, vers 2h15, Gabčík et Kubiš sont parachuté à près de 2 km du village de Nehvizdy et 22 km à l’est de Prague.

Leur mission recèle deux objectifs : la collecte de renseignements, dévolue au groupe « Silver A » (Alfred Bartos, Josef Valcik et Jiři Potucek) et surtout l’élimination de Heydrich. Celle-ci est le fait du groupe « Antropoïd », avec Jan Kubis et Josef Gabcik.

Après avoir atterri, les soldats Jozef Gabčík et Jan Kubiš chargés de réaliser l’opération Anthropoïd, réussissent à nouer des contacts avec le mouvement de résistance tchèque dont les membres les cachent et les aident à mener à bien leur projet.

Les deux hommes vont se rendre à Prague et procéder au repérage de l’endroit idéal pour l’attentat.

Il était prévu, dans le projet d’attaque d’origine, que Gabčík et Kubiš attaquent Heydrich près de son siège à Panenské Březany à Prague. Mais à cause de la grande surveillance de ce lieu, ils renoncent et choisissent un autre lieu d’attentat à Prague.

C’est le carrefour de l’Avenue Kirchmayer (aujourd’hui rue Zenklova – rue du quartier Kobylisy à travers le quartier Stara Libeň) avec la rue V Holešovičkách qui est choisi. Cette rue en pente a un virage serré à droite au bas qui obligera la voiture de Heydrich de ralentir. C’est à ce moment que l’action doit être menée. Autre avantage du lieu, cette rue mène vers le pont Trojsky qui surplombe la rivière Vltava, et par là, vers le quartier Troja où les auteurs de l’attentat pourront se dissiper dans la foule. De plus, l’endroit est assez éloigné de tous les postes de police, des casernes ou des postes de la Gestapo. Il y a cependant un gros inconvénient : un arrêt de tram se trouve à proximité du lieu, et à l’heure prévue de l’attentat, onze heure, qui est l’heure du passage habituel de Heydrich, beaucoup de civils attendent leur tram.

Le jour de l’attentat

L’opération baptisée Antropoïd se déroule le mercredi 27 mai 1942. Jozef Gabčík et Jan Kubiš se trouvent dans le virage, Gabčík d’abord puis Kubiš, Lorsque la Mercedes décapotable de Reinhard Heydrich arrive, Josef Valčik, le signaleur posté plus haut dans l’avenue, envoie le signal avec son miroir. Comme prévu, la voiture d’ Heydrich ralentit au bas dans le virage, Jozef Gabčík bondit au milieu de la rue et vise Heydrich avec sa mitraillette Sten, mais l’arme s’enraye. La voiture d’Heydrich s’arrête et celui-ci se lève et veux abattre Gabčík avec son pistolet. Jan Kubiš lance alors une grenade qui explose contre la voiture. Voyant Heydrich atteint, les deux hommes s’enfuient comme convenu vers le centre de Prague. Le dos labouré par des éclats, Heydrich est transporté à l’hôpital, où il mourra d’une septicémie une semaine plus tard.

Le chauffeur de la Mercedes, le SS Johannes Klein, part d’abord à la poursuite de Kubiš mais celui-ci parvient à s’échapper à bicyclette. Revenu auprès d’Heydrich, celui-ci lui ordonne de se lancer à la poursuite de Jozef Gabčík. Il le retrouve dans une boucherie mais Gabčík, utilisant son pistolet Colt, tire à deux reprises sur Klein le blessant sérieusement à la cuisse. Gabčik parvient alors à s’échapper.

Les représailles

Quand Heydrich succombe à ses blessures le 4 juin 1942, Hitler exige des représailles en Bohême. La loi martiale est imposée jusqu’au 3 juillet 1942. Les nazis vont exécuter 1585 habitants et en arrêter 3188 en Bohème – Moravie. Les habitants des villages de Lidice (3), dans la nuit du 9 au 10 juin 1942, à 20 km à l’ouest de Prague et de Ležáky, le 24 juin 1942, sont massacrés par un commando composé de SS et de membres de la Gestapo. Quatre ecclésiastiques orthodoxes tchèques, qui avaient fourni l’asile aux parachutistes dans l’église des Saints-Cyrile-et-Méthode à Prague, seront exécutés le 4 et 5 septembre 1942 à Kobylisy.
Le village de Poluvsie, d’où est originaire Jozef Gabčík, situé dans ce qui était la « première république slovaque », inféodée à l’Allemagne nazie ne subira pas de représailles.

La fin tragique

Après l’attentat contre le protecteur du Reich, les parachutistes se cachent dans la crypte de l’église orthodoxe des Saints-Cyrile-et-Méthode à Prague (4), Resslova ulice (rue).

Gabčík et Kubiš cachés dans l’église orthodoxe des Saints-Cyrile-et-Méthode vont alors être trahis par un autre parachutiste Karel Čurda (5). Selon une version, Čurda capturé par la Gestapo, ne supportera pas les tortures et en échange de sa vie et d’une récompense de 500 000 marks allemands, il va désigner l’endroit de la cachette des parachutistes recherchés. Une autre version affirme qu’il se serait rendu à la Gestapo de son plein gré.

Dès lors, l’église des Saints-Cyrile-et-Méthode à Prague est encerclée le 18 juin 1942 par les SS. Pour les parachutistes commence un combat pour la vie. Hélas, la fin est tragique pour les auteurs de l’attentat. Le combat se termine, quand la majorité des parachutistes sont tués. Jozef Gabčík réfugié avec trois autres compagnons dans la crypte de l’église ne trouvant pas une issue favorable face à cette situation difficile et sous la suprématie des SS qui ont essayé de les enfumer et de les noyer, se suicide lui et ses compagnons. Pas un seul parachutiste ne sera pris vivant. (6) Les assaillants dénombreront 14 tués et 21 blessés.

Les parachutistes tchécoslovaques qui se retrouveront cernés dans la crypte de l’église Saints-Cyrille-et-Méthode sont : Adolf Opálka, chef du groupe Out Distance ; Jan Hrubý et Josef Bublík du groupe de sabotage Bioscope ; Josef Valčík ; membre du groupe Silver A il aidera dans l’attentat contre Heydrich en qualité de guetteur ; Jaroslav Švarc du groupe Tin dont la mission était d’assassiner le ministre de l’Éducation Emanuel Moravec.

Les corps retrouvés ?

Des chercheurs ont identifié les tombes de Ján Kubiš et de Jozef Gabčík dans le cimetière de Dablice, Prague 8.

In memoriam

Après la Seconde guerre mondiale, Jozef Gabčík a été élevé in memoriam au rang de lieutenant et honoré aux décorations posthume des deux croix militaires tchécoslovaques ; le 24 juin 2002 il a été honoré lieutenant-colonel in memoriam, (ses décoration militaires : trois croix tchécoslovaques de guerre en 1939, une médaille commémorative tchécoslovaque de guerre et des décorations militaires tchécoslovaques – l’Etoile d’or – pour la Liberté, et le Lion blanc de 1er rang – pour la Victoire.

En Slovaquie, en son honneur, un village porte son nom, Gabčíkovo, à 49 km de la capitale slovaque, dans le district de Dunajská Streda, au bord du Danube et de même que la grande œuvre hydraulique slovaque construite de 1977 à 1992, le barrage de Gabčíkovo.

L’élite militaire du 5e Régiment des Forces spéciales de l’Armée de la République Slovaque, le PŠU – pluk špeciálneho určenia – caserné dans la base de Žilina, créé en 1995, est nommé le Régiment Jozef Gabčík de Žilina – Žilinský pluk Jozefa Gabčíka.

Un monument commémoratif se trouve depuis le 11 octobre 2014 face à la maison natale de Jozef Gabčík dans le village de Poluvsie (Rajecké Teplice). Ce monument rend hommage à Jozef Gabčík bien entendu mais aussi à tous les membres de l’opération Anthrpoïd. Un panneau explicatif se trouve à proximité.

Notes

1 Karel Svoboda devait être l’équipier de Jozef Gabčik pour l’opération Anthropoïd. Suite à sa blessure, il sera remplacé par Jan Kubiš.

2 Durant leur entraînement, le général Frantisek Moravec, chef du service du service des renseignements tchécoslovaque, a prévenu Jozef Gabčík et Jan Kubis qu’il y avait de grande possibilité qu’ils soient pris et exécutés.

3 A Lidice, tous les hommes âgés de plus de 15 ans – 173 en tout – sont fusillés dans la cour de la ferme Horák. Les 235 femmes sont déportées vers les camps de concentration (Ravensbrück). Sur les 105 enfants du village, 89 seront gazés au camp de Chelmno. Quant aux mineurs qui travaillaient la nuit, ils ont été arrêtés dès leur remontée du puits de mine et exécutés à Prague. Les nazis font creuser des fosses communes et le 10 juin 1942, le village est brûlé et rasé.
Bien que le sort du village de Ležáky ressemble à celui de Lidice, commune rasée quinze 15 jours auparavant, il y a quand même une différence. Alors que les habitants de Lidice n’ont nullement été engagés dans le mouvement de la résistance, à Ležáky, la Gestapo a localisé l’existence d’un émetteur qui permettait aux auteurs de l’attentat contre Heydrich d’entretenir le contact avec l’étranger. Bien que quelques personnes seulement aient été au courant de cette activité subversive et que la majorité des habitants de Ležáky ait ignoré l’existence de l’émetteur, les nazis ont décidé de répéter leur opération monstrueuse de Lidice et d’anéantir toute la commune.
Le 24 juin le bourg de Ležáky qui compte 9 maisons, est encerclé et tous les édifices sont pillés et incendiés. Les 47 habitants arrêtés sur place sont transportés dans la ville de Pardubice où tous les adultes sont immédiatement fusillés. 11 enfants des familles de Ležáky sont déportés dans le camp d’extermination de Chelmno où ils mourront dans des chambres à gaz. 254 membres des familles de parachutistes chargés de l’attentat contre Reinhard Heydrich ainsi que leurs collaborateurs seront exécutés le 24 octobre 1942 dans le camp de Mauthausen. D’autres hommes et femmes des environs considérés comme collaborateurs des parachutistes seront déportés dans les camps d’Auschwitz, de Buchenwald et de Ravensbrück.

« Ležáky, village témoin des atrocités commises par les nazis allemands » Václav Richter, 25-06-2012. Radio Praha

4 Cette église est située à l’angle des rues Resslova et Na Zderaze, dans le quartier historique de Nové Město, sur l’autre rive de la Vltava (Moldau), à faible distance du Château Hradčany.

5 Karel Čurda, devenu alcoolique sera, en 1947, condamné par un tribunal militaire tchécoslovaque et exécuté par pendaison pour haute trahison le 29 avril 1947. Selon l’historien tchèque Vojtech Sustek, le nom de Karel Čurda figure aussi sur un document de la Gestapo, découvert en 2003. Čurda est ensuite devenu l’un des meilleurs agents de la Gestapo et il a fait envoyer à la mort des dizaines de résistants. Selon la feuille d’émargement, la Gestapo lui a payé 5 millions de couronnes…
Parmi les dénonciateurs qui figurent aussi sur la feuille, on trouve le prieur de l’ordre des chevaliers de Malte, Franz Werner Bobe, qui dénonçait même les Allemands qui venaient se confesser à lui.

6 Mária Moravcova, qui approvisionnait en nourriture les parachutistes cachés dans la crypte de l’église Saint-Cyrille-et-Méthode se suicidera avant d’être arrêtée par la Gestapo le 17 juin 1942. Son mari et un de ses fils seront exécutés dans le camp de concentration de Mauthausen le 24 Octobre 1942. Son second fils, Miroslav, membre de la RAF, est mort en 1944.

Sources

Attentát na Heydricha. František Emmert. Ed. B4UPublishing s.r.o. 2016

Osobnosti slovenska. I diel. Jozef Leikert. Ed Priroda 2009-2010

Pamätník a rodný dom Jozefa Gabčíka

Jozef Gabčík. Život a smrt velitele paraskupiny Anthropoïd. Jaroslav Čvančara

Radio.cz. Jaroslava Gissübelová. 17-10-2007

www.radio.cz/fr/rubrique/histoire/les-tombes-anonymes-de-parachutistes-retrouvees-au-cimetiere-de-dablice

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Morena, la fin de l’hiver

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Les fêtes de printemps qui vont s’étaler de la mise à mort de Morena jusqu’au dimanche de Pentecôte en passant par la semaine de Pâques, l’arbre de mai… sont des réminiscences des fêtes païennes slaves mélangées au christianisme dont le but est de chasser l’hiver et d’accueillir le renouveau de la nature et le retour de la « lumière ».

Vynášanie Moreny que l’on peut traduire en français par « À bas Morena ! Dehors Morena ! » Il s’agit de déloger Morena du village, comme les chasseurs le font avec le gibier, bref de l’éliminer. Cette coutume de printemps et le rituel qui l’accompagne ont pour but de chasser, de faire fuir l’hiver.

Le rite slave le plus archaïque est probablement celui de l’élimination de l’Hiver, anciennement synonyme de la Mort. Selon la croyance des anciens Slaves, le printemps arrive plus vite si l’on brûle et noie dans la rivière une figurine féminine de paille, représentant la déesse Morena, symbole du mal, de l’hiver, de la mort et des maladies.

Dans les villages slovaques, depuis le Moyen Âge, ce rituel est représenté surtout par un mannequin féminin en paille – Morena, rarement par un mannequin masculin en paille – Dedko, lequel sera finalement jeté dans l’eau ou brûlé.

L’authenticité de cette coutume commence à disparaître dans la première moitié du 20e siècle et aujourd’hui elle est représentée sous une forme scénique par les groupes folkloriques locaux.

Morena est représentée par une figurine féminine de paille tressée, habillée du vêtement traditionnel de fête ou parfois de mariage et décorée de rubans colorés. Ce mannequin symbolisant l’hiver et le tout mauvais, et est connu dans toutes les régions slovaques et porte plusieurs surnoms en patois slovaque : Morena/Muriena, Marmuriena, Marmariena, Marmoriena, Ma-Murienda, Mariena, Mara, Morana, Marzana, Marena, Smrť/Smrtka, Baba, Hejhana, Kyseľ, Kyselica et il en est de même dans les langues slaves des pays voisins :

En tchèque : Morena, Mařena, Mořana (Morzannie), Mařák, Smrt, Smrtka, Smrťák.

En polonais : Marzanna, Marzana, Marzena, Morzana, Morana, Morena, rituel Topienie Marzanny – Noyade de Marzanna, Smierc, Smiercicha.

En bulgare : Mora, Morena, Mara, Morana.

En croate : Morana, Morena, Marana, Marena, Mora, Mara (en Dalmatie et en Slavonie).

En ukrainien : Mara, Marena.

Les peuples slaves avaient fait du rituel archaïque de Morena qu’après les longs mois d’hiver, il fallait l’éliminer. L’hiver, représenté par la déesse Morena, devait s’achever et terminer sa domination et laisser au plus vite la place à l’arrivée de la divinité du soleil de printemps, et à la chaleur, – divinité qui portait le nom slave de Yar ou Yaro, Yarilo, Yarovit – et à la déesse slave du printemps, Vesna.

Selon une hypothèse, les anciens slaves pratiquaient un sacrifice vivant lors du rituel de passage de saison. Plus tard, ils auraient remplacé le sacrifice vivant par une figurine de paille portant le nom de Morena ou Smrtka – la Mort.

Les premiers rituels écrits de Morena sont connus dès le 16e siècle sur le territoire slovaque. Cependant, déjà au 14e siècle, des cérémonies étaient célébrées mais furent interdites par le roi tchèque Karol IV – Charles IV, pour cause de rituel païen. Ce rituel, en provenance de pays voisins slaves, était pratiqué par les adultes. Plus tard, il reprendra et sera pratiqué par la jeunesse, surtout par les filles.

Une description du 19e siècle de l’ethnographe slovaque Jan Čaplovič (1780 – 1847) évoquant une cérémonie de l’élimination de Morena par une forme active est développée. Mais, selon lui, sa structure ne permet pas de déployer des fonctions de divertissement et la vision de la superstition est disparue.

Nous savons aujourd’hui que les exécuteurs « testamentaires », dans de nombreuses zones régionales, seront les enfants ou les adolescents et que, même si aujourd’hui, plusieurs traditions se sont perdues ou sont devenues relativement rare, Morena, par son innovation en forme de spectacle, implique en particulier les groupes folkloriques locaux qui perpétuent encore cette tradition païenne, même si avec le temps, ce rituel a perdu de son sens magique.

Chaque Dimanche Noire avant Pâques (5e dimanche du carême ou le Dimanche de la Passion) en Slovaquie, les groupes folkloriques locaux présentent ce rituel comme un spectacle traditionnel.

La représentation du rituel de l’élimination de Morena en Slovaquie – Vynášanie Moreny

Le scénario prévoit de promener Morena – le mannequin de paille – en chantant, dans le village, puis de la brûler et enfin de la jeter dans la rivière.

Le mannequin de paille qui représente la déesse Morena – l’hiver est fabriqué à partir d’une ossature en bois en forme de croix sur laquelle sont empalées des gerbes de paille. Morena est habillée de vêtements traditionnels féminins de fête ou de mariage : jupe, chemisier ou corsage pailleté et foulard. La tête de Morena est aussi crée avec de la paille et emballée dans de la toile blanche sur laquelle est dessiné un visage.

Lors du dimanche noir, ce sont uniquement des jeunes filles, symbole de la virginité, qui portent la figurine féminine de Morena mais parfois, pour des raisons de poids, c’est un garçon qui porte le mannequin, et qui accompagnent le déplacement dans le village en chantant des chansons comportant des paroles à caractères magiques « Morena, Morena kde si prebývala ? – Morena, Morena où étais-tu pendant ce long temps ».

Le cortège se déplace autour et dans le village en se dirigeant vers la rivière, le ruisseau ou le lac. Là, la figurine est déshabillée, enflammée et jetée en flammes dans l’eau. Morena, symbole de l’hiver, est brûlée et noyée pour faire place à la joie d’accueillir le retour du printemps et donc de l’éveil de la nature avec toutes ses promesses d’abondantes récoltes futures.
Parfois, Morena quitte le village par une extrémité pour son funeste destin pendant qu’à l’autre extrémité entre le Mai (Maik, Letečko, letetchko, Lesola) symbole de la nature verte ou de la verdure du printemps, représenté par un petit arbre vert orné de rubans colorés et de coquilles d’œufs entiers et vides suspendus aux branches.

Le couple formé par la Morena et par Dedko

Dans la même idée de « chasser l’hiver », on retrouve dans les régions montagneuses de Liptov et d’Orava, un rituel, aujourd’hui présenté par les groupes folkloriques locaux, de Morena accompagnée, avec un rituel similaire, d’une figurine d’homme en paille appelé Dedo ou Dedko, Dido, Ďondo, Chlap, Majmurien. Le mannequin de paille représente un vieillard, Dedo – Pépé, qui symbolise la cause de la faim (ou de rester sur sa faim) en hiver. Dedo est un personnage égoïste et goinfre, qui n’a jamais assez, c’est pourquoi, il fait partie de la marche de Morena autour du village.

Dedko est aussi fabriqué à partir d’une ossature en forme de croix de bois, emballé de paille tressée et habillé de vêtement traditionnel d’homme : pantalon de toile brut, chemise, casaque ou camisole et chapeau fourré. Sa tête est crée avec de la paille et emballée dans de la toile sur laquelle est dessiné un visage d’homme.

Dedko est porté par des garçons adolescents ou des jeunes recrues militaires (dans le village de Liptovska Kokava).

Les chants de Morena et de Dedko

Des chants « magiques » les accompagnent tout au long de leur passage dans le village. Le chant a plusieurs variantes selon les régions, mais les paroles stigmatisent le fait de se débarrasser de ce qui est mauvais : la maladie, la mort, la faim, le froid dans le village. Voici quelques textes.

Vynesieme, vynesieme Morenu zo vsi,
prinesieme, prinesieme nový máj do vsi…

Morena, Morena kde si prebývala ?
V tom krajnom dome, v tej starej komore…

Variante : Vynesieme Morenu z dediny,
prinesieme novu jar do dediny…

Débusquerons-nous, débusquerons-nous la Morena du village,
Apporterons-nous, apporterons-nous le nouveau mai au village…

Morena, Morena où habites-tu ?
Dans la maison du bout du village, dans de vieux débarras…

Débusquerons-nous, débusquerons-nous la Morena du village,
Apporterons-nous, apporterons-nous le nouveau printemps au village…

Une variante du chant lors de la marche des filles dans le village dans la région de Liptov

Vynesieme, vynesieme Marmurienu zo vsi, Marmurienu zo vsi ;
Prinesieme prinesieme Máj nový do vsi, Máj nový do vsi ;
Muriena naša, kdes prebývala ?
V dedinskom dome, v novej stodole.

Au moment du rituel où Morena est brûlée et jetée dans l’eau et où les jeunes filles ornent le petit arbre nommé Mai ou Maik, Letečko, Lesola, symbolisant la nature verte ou la verdure du printemps, les jeunes entament le chant suivant:

Vyniesli sme, vyniesli sme Murienu zo vsi, Murienu zo vsi.
Nous avons débuché, nous avons débuché la Muriena du village,
Priniesli sme, priniesli sme, Máj nový do vsi, Máj nový do vsi.
Nous avons apporté, nous avons apporté, le nouveau mai au village, le nouveau mai au village
Posejeme, posejeme suržicu s ovsy, suržicu s ovsy.
Nous sèmerons, nous sèmerons le grain d’orge avec l’avoine
Navarime, navarime čierneho piva, čierneho piva.
Nous cuisinerons, nous cuisinerons la bière noire, la bière noire
Opojime, opojime, kmeťovho syna, kmeťovho syna.
Nous enivrerons, nous enivrerons, le fils du vieillard, le fils du vieillard (1)
Ak nebude piti, budeme ho biti, budeme ho biti;
S’il ne veut pas boire, nous le battrons
S troma kyjmi kyjovati, za vlasy ho ruvati;
Avec les trois massues, nous le masserons, nous le tirerons par les cheveux
Dáme mu, dáme mu šidlo i kopyto, jeho žene sito i koryto.
Nous lui donnerons, nous lui donnerons un pied de fer et un poinçon, pour sa femme un tamis et une mangeoire.

Autre chant de Morena en patois de Slovaquie occidentale :

Morena, Morena ! Za kohos umrela ?
Né za ny, né za ny !
Než za ty kresťany !

Morena, Morena ! Pour qui tu es morte ?
Pas pour eux, pas pour eux !
Mais pour les chrétiens !

Et pour Dedo, dans la chanson « magique », Vynášanie Dedka ou Dedo, les paroles disent qu’il faut se débarrasser de la cause de la faim, de l’hiver :

Dedko náš Dedko, požral si nam všetko, nič si nam nenechal, tak si sa dobre mal !

Pépé, notre Pépé, tu nous a tout mangé, tu ne nous a rien laissé, tu étais bien ainsi !

Le rituel aujourd’hui

Dans la région de Liptov, dans la ville de Ružomberok, la coutume du printemps et le rituel slave de faire fuir ou bouter hors l’hiver et l’élimination de Morena – Vynášanie Murieny est représenté, chaque année, selon la tradition populaire par, notamment, l’ensemble folklorique Liptov.

Dans le cortège du groupe Liptov de Ružomberok, Morena précède le cortège et on pouvait voir, à l’arrière-plan, une jeune fille surélevée qui représentait la déesse Vesna, annonçant l’arrivée du printemps.

Note :

1 le vieillard est Dedko

Sources :

Malý lexikon ľudovej kultúry Slovenska. Kliment ONDREJKA. Edition Mapa Slovakia Bratislava, 2003 (www.mapa.sk)

Encyklopédia ľudovej kultúry Slovenska 1. Edition SAV Bratislava, 1995

Rok vo zvykoch nášho ľudu. Emilia HORVATOVA. Edition TATRAN, 1986

Slovenský rok. Rastislava STOLIČNÁ. Edition MS, 2004

Zborník Slovenského Národného Múzea, Ethnographia à Martin année 34, éditeur SNM Bratislava, 1993

Z ľudovej kultúry Turca. Eva PANČUHOVÁ et Zora MINTALOVÁ. Edition MS Martin, 2004

U nás taká obyčaj – Slovenské ľudové tradície. Vojtech MAJLING. Edition Computer Press Brno, 2007 (http://knihy.cpress.cz)

Slovenský rok. V ľudových zvykoch, obradoch a sviatkoch. Katarina Nádaská. Edition Fortuna Libri, 2012

Gerulata, le site romain

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Nous voici plongé dans le monde de la Rome antique. Le castel militaire romain de Gerulata, qui était situé sur le bord nord de la province de Pannonie, à l’extrémité septentrionale de l’Empire romain était intégré dans le système de fortification du limes romain danubien.

Ce site de Gerulata était composé d’un important camp militaire auxiliaire et d’un village civil où se trouvaient artisans et commerçants.

A proximité du camp militaire de Gerulata se trouvait probablement un gué du Danube et un quai de débarquement, mais les parties du port sur la rivière n’ont pas encore été découvertes.

L’archéosite de Gerulata abrite aussi le Musée de l’antiquité romaine et est sous la gestion du Musée de la ville de Bratislava. Situé à 12 km du centre de Bratislava, dans la rue Gerulatska, dans l’ancienne commune de Rusovce qui, en 1972, est devenue une partie urbaine de la capitale Bratislava.

Depuis 1963, le site archéologique – castel (castellum) militaire romain de Gerulata – est classé Monument culturel national slovaque.

En 2012, le site antique de Gerulata est nominé, avec le vestige du camp militaire romain Kelemantia ou Celamantia d’Iža, près de la ville de Komárno en Slovaquie, dans le projet européen Limes Danubien les frontières de l’Empire Romain (avec la participation de 8 pays européens) pour le titre de patrimoine mondial culturel de l’UNESCO.

Introduction

Pendant près de quatre siècles, les Romains vont ériger, à leurs frontières, des moyens de défense afin de protéger leur vaste empire contre les attaques de leurs adversaires. Le mur d’Hadrien et le mur d’Antonin en Grande-Bretagne. En Europe continentale, la frontière entre l’Empire et les Barbares coïncidait avec le Rhin et le Danube.

Situé précisément sur le moyen Danube, dans la plaine danubienne, sur le bord nord de la province de Pannonie, à l’extrémité septentrionale de l’Empire romain, a moins de 30 km du site important de Carnuntum en Autriche. Le Castellum Gerulata était un de ces moyens de défense construit sur le limes danubien.

A proximité du camp militaire de Gerulata se trouvait probablement un gué du Danube et un quai de débarquement, mais les parties du port sur la rivière n’ont pas encore été découvertes.
Le nom de Gerulata a probablement été pris par les romains aux Celtes y habitant (mentionné aussi comme Gerolota, Gerolate, Gerularis, Gerulara, Gerulatorum).

Ce site d’architecture romaine est le mieux conservé de la Slovaquie. Presque toute l’agglomération antique de Gerulata se trouve sous la zone urbaine médiévale et moderne de la commune actuelle de Rusovce.

Gerulata dans le limes Romain du Danube moyen

Le territoire slovaque actuel, a été peuplé depuis le 1er siècle jusqu’au 4ème siècle par des tribus germaniques et celtiques. Les régions du nord du Danube, en Slovaquie occidentale aujourd’hui, situées dans le voisinage immédiat de l’Empire romain, étaient habitées par les Marcomans et les Quades, tribus germaniques. Sous le règne de Marc-Aurèle et de Valentinien Ier, les légionnaires romains pénétraient profondément jusqu’au Nord, dans la vallée du Váh centrale et dans la vallée du Hron. En 179-180, pendant les Guerres contre les Marcomans, les légionnaires romains hivernaient dans le camp de Laugaricio – aujourd’hui Trenčín. Un texte gravé dans la pierre sous le château de Trenčin le rappelle.

La frontière du Nord de l’Empire romain – de la province de Pannonie – a été formée par le Danube – comme une barrière naturelle fluviale. Le long du parcours du fleuve du Danube, les Romains ont progressivement construit un vaste système de fortifications, les Limes Romanus danubiens, une série de places fortes reliées par une voie de rocade suivant le cours du Danube, jusqu’à son embouchure.

L’incorporation du territoire slovaque à l’empire romain faisait partie du bassin du Danube et dans la commune actuelle de Rusovce, se trouvait l’un des points forts de la frontière romaine danubienne – le site de Gerulata, un important camp militaire auxiliaire ainsi qu’une partie civile avec un arrière-plan économique regroupant artisans et commerçants.

Le castellum de Gerulata est connu par les sources antiques romaines : ltinerarium Antonini Augusti (un guide de voyage, qui recense les villes de l’Empire romain) et Notitia dignitatum imperii romanum (un document administratif romain de l’extrême fin du 4e siècle et début du 5e siècle, où sous le chapitre XXXIV. Dux Pannoniae primae, est mentionné Equites sagittarii, Gerolate (Gerulata). Ce site est aussi mentionné dans la Tabula Peutingeriana, la carte de l’humaniste Conrad Peutinger (1465 – 1547), où l’on retrouve nommée Gerulata, ou Gerulatorum, comme la ville de la Basse Pannonie du 4e siècle après J-C.

L’établissement du camp romain de Gerulata a été mis sur pied pendant le gouvernement de la dynastie d’empereurs romains des Flaviens (de 69 à 96 apr. J-C) et faisait partie du système de défense romain des Limes Romanus du Danube.

La ligne du limes Romain du Danube moyen partait des camps de légionnaires de Carnuntum (Bad Deutch Altenburg et Petronell en Autriche), et se terminait à Ad Flexum (Moson-magyaróvár en Hongrie). Le castel militaire romain Gerulata se situe à environ 28 km de Carnuntum, capitale de la province de Pannonie Superior.

Quatre étapes de la construction du camp militaire romain de Gerulata, du 1e au 4e siècle, ont été identifiées

Première étape

Sous l’ère de la dynastie romaine des Flaviens, de 69 à 96, (surtout pendant un long règne de l’empereur Domitien, de 81 à 96 apr. J-C) jusqu’aux années 70 du 2e siècle.

C’est sous Domitien – Domitianus (81 – 96) que les troupes légionnaires de Carnuntum (légions X, XIV et XV) ont construits le castel militaire Gerulata. Vers la fin du 1er siècle, le site de Gerulata eu une garnison permanente. De cette époque, les restes des bâtiments, peut-être de caractère militaire, ont été préservés. On y a trouvé en effet des briques rouges et des tuiles de construction estampillées du nom des légions romaines qui ont occupés, quelque temps, la localité du camp romain de Gerulata. En 1964, une fortification composée de doubles fossés et de remparts réalisés en terre et en bois a été partiellement identifiée pendant les premières fouilles archéologiques à l’endroit appelé Bergl à Rusovce. Un autre fossé, long de 27 mètres et le coin du camp militaire exposé au sud, sont situés actuellement dans la rue Madarská, derrière l’église évangélique de Rusovce.

Deuxième étape

Vers 170, sous le gouvernement de la dynastie des Antonins et jusqu’à l’empereur Aurélien dans les années 90 du 3e siècle.

Au début du 2e siècle apr. J-C, dans le camp de légionnaires à Gerulata, s’installa la troupe d’élite de cavalerie, l’aile – A la Prima Cananefatum qui comptait environ 500 hommes et était dirigée par un préfet d’ordre équestre. Elle était constituée par les Cananefates, hommes de la tribu germanique vivant dans le delta du Rhin. Ces hommes formaient plusieurs unités auxiliaires dans l’armée romaine. Cette aide permettait d’acquérir, en fin de service, le prestigieux titre de citoyen romain.

L’aile militaire de cavalerie des Cananefates fut établie dans la province de Pannonie après son temps au campement romain de Lopodunum, aujourd’hui Ladenburg en Allemagne.

On trouve aussi la présence d’autres unités comme la IIe légion, la cohorte XVIIIe des volontaires, la Ve cohorte Lucensium Callaecorum, et la Première cohorte d’archers Aelia Sigittariorum.

La deuxième étape de la construction du camp en pierre n’est pas bien connue actuellement, mais sa surface de 150 à 170 mètres dépassait le premier camp romain qui a été construit en terre et en bois. La maçonnerie en pierre de la construction intérieure du camp créait un bâtiment à la fondation carrée avec l’épaisseur d’un mur de 45 à 60 cm. L’un des murs, avec une longueur allant jusque 25 mètres est exposé à l’extérieur du musée d’antiquité de Gerulata.
Plus tard, la partie nord-est du castel et du camp a été détruite par les crues du Danube, mais une partie du mur périphérique est visible au musée. Près du grenier paroissial, la partie de la ligne sud-ouest du mur défensif périphérique, construite en pierre, est large de 2,4 m et profonde de 3,2 m.

Le camp militaire, avec ses quatre portes et quatre tours d’angle, était entouré par les fossés défensifs et les remparts avec des palissades en bois, par les murs avec un système défensif dit « les fosses abattis ».

La porte principale – Porta praetoria était orientée vers l’est (vers l’ennemi), le réseau des voies inférieurs avec le système de canalisation se trouvait sous l’angle droit. La route principale – Via principalis se croisait avec la route – Via praetoria au centre du camp avant le quartier général.

Troisième étape

Elle commence à la fin du 3e siècle (les 30 dernières années du 3e siècle) et jusqu’au 375 ou 380, c’est une période pendant laquelle la reconstruction du camp romain de Gerulata était très fréquente, elle est représentée par le Castel militaire à la fondation presque carrée entouré par un mur d’enceinte en pierre. Le camp militaire était d’une surface de 200 m². Selon une supposition, le mur n° 11 (en direction du nord-ouest) qui est exposé dans l’aire du musée, bordait le port fluvial. Une preuve appréciable archéologique, exposée au musée, est un vestige d’une porte au commencement de la Via Carnuntiana – alors la voie romane reliant le camp de Gerulata avec le camp de Carnuntum (en Autriche).
Dans les 30 dernières années du 4e siècle, sous l’empereur Valentinien, les travaux de fortifications du limes danubien sont conduits par l’officier romain Tempsonius Ursicinus, son nom a été découvert aussi sur les débris de briques estampillées à Gerulata.

Quatrième étape

Après 375 – 380, c’est la période de la construction d’un fort auxiliaire, le castellum, avec des tours (turris) de guet, pendant l’antiquité tardive. L’activité principale des travaux de reconstruction, a été de bâtir un castel au coin nord du camp militaire de Gerulata. La surface totale du castel militaire a été nettement réduite.

Les vestiges de l’architecture romaine sont présentés au Musée d’antiquité de Gerulata, grâce aux résultats des fouilles. Un bâtiment de coin de 29 à 30 mètres a été identifié, situé au nord du fort militaire romain du 4e siècle, et à l’intérieur 12 colonnes en pierre entourent l’atrium avec un puits en pierre ou un bassin situé asymétriquement en son centre. Les colonnes avaient un soubassement maçonné de 3 à 4 mètres, de même que les murs périphériques avec leur épaisseur de 240 cm composant le fort auxiliaire de Gerulata. Cela fait penser qu’il s’agissait d’une structure à trois étages.
Pour la construction de cette fortification, des pierres sculptées (pierres tombales, stèles, etc. aujourd’hui exposées dans le lapidaire du musée) ont été utilisées secondairement.

La zone civile – le vicus

Il semble que sur le site de Gerulata, l’agglomération civile, le vicus, avait dans son épanouissement, une population que l’on peut estimer à environ 3000 habitants.

Le vicus entourait le camp militaire de trois côtés. Le quatrième côté « decumate » était situé vers la rivière.

Fin du site antique de Gerulata

Il semble, que le site de Gerulata, l’ancien camp militaire (castellum) et la partie civile (vicus) ont été abandonnés par ses habitants après la chute de la puissance romaine et à la suite d’invasion barbares. Les fédérâtes romains Goths se sont installés dans l’aire de Gerulata (le cimetière lombardien découvert a livré plus de 166 tombes datant du 5e au 6e siècle), puis le site sera occupé par les Slaves au 7e siècle. Ils vont s’y installer et repeupler ce site et lui donner un nouveau nom : Rusovce.

Les Fouilles

L’ancien site de Gerulata comprenait, selon les découvertes :

– le Castel militaire romain et le camp militaire ;
– les tours de guet et de signalisation ;
– le quai sur le Danube ;
– les hameaux romains civils (Vicus) ;
– les nécropoles romaines situées extra pommerium – aux bords des routes en limite des agglomérations ;
– les fermes agricoles ;
– les maisons de campagne luxueuses du type la Villa Rustica, les vestiges étaient situés à Čuňovo, ils furent découverts pendant la construction de l’autoroute D2 (autoroute qui va de la frontière tchèque à Bratislava vers la Hongrie) au sud près de Rusovce ;
– le site de campagne antique et la villa rustiqua de l’époque des Sévères de 193 à 235 – qui font partie de l’ancien environnement agricole de Gerulata.

Les fouilles dans le temps

Les premiers sondages archéologiques à Rusovce commencèrent à la fin du 19e siècle, en 1888, sous Agost Sötter, archéologue hongrois. Quelques trouvailles sont exposées au musée hongrois à Mosonmagyaróvár.

Après 1947, les archéologues slovaques commencent fouiller à Rusovce.

Quand en 1961, sur le lieu dit Bergl, une petite colline derrière l’église de Sainte Magdalena à Rusovce, pendant des travaux de construction, on découvre, par hasard, les vestiges de l’aire du bourg avec un double fossé défensif romain. Ce site a été assuré par des fouilles préventives. Mais la trouvaille exceptionnelle d’une pierre épigraphique avec le nom en latin Gervlata (Gerulata), confirmait l’existence d’un camp militaire romain et donnait une impulsion pour la fondation d’un musée archéologique in situ. Ces vestiges d’antiquité reviennent alors sous le patrimoine archéologique slovaque.

Depuis 1964, des fouilles sont programmées à Rusovce sous Jan Dekan (de 1965 au 1972) et de 1976 au 1987 sous Ladislav Snopko.

En 1998 et en 2000, les fouilles permettent la découverte du coin du camp romain à l’orientation sud-est et la ligne du double fossé défensif dans un périmètre de 27 m de long sur la rue Maďarská à Rusovce. A l’intérieur de ce camp romain, les casernes et les baraques des hommes ont aussi été fouillées.

En 1965, à Rusovce, 3 cimetières de l’époque romaine ont été découverts ainsi que des tombeaux d’inhumation, et d’incarnation. Les tombes les plus anciennes datent de la seconde moitié du 1er siècle, la plus jeune de la fin du 4ème siècle.
Selon les résultats des fouilles archéologiques réalisées dans les années 1990 – 2002 à Rusovce, les vestiges du camp militaire romain de Gerulata et le noyau d’une agglomération résidentielle civile de l’époque romaine, se trouvaient pratiquement sur tout le territoire de l’actuelle commune de Rusovce.

Dans la partie du vicus, l’agglomération civil romaine, près de la voie romaine, allant vers Carnuntum, capitale de la province Pannonie Supérieure. Selon les dernières fouilles, là ont été trouvées des bâtiments en briques crues mais aussi des vestiges d’architectures en pierres avec les fragments de riches peintures murales intérieures, des canalisations et des pièces particulièrement bien conservées ayant été chauffées par hypocauste.

Pour l’instant 5 cimetières antiques situés extra pommerium – derrière les remparts, ont été retrouvés. On y trouve des tombeaux de type d’incinération, d’inhumation, et combinés. Les tombes les plus anciennes ont été retrouvées sur le cimetière n° II. Les tombeaux sont en forme de fosse simple, de cryptes en briques, de sarcophages, de cryptes en pierres. La combinaison d’inhumation et d’incinération des morts sur les nécropoles de Gerulata, est typique pour l’époque du Haut Empire Romain.

Une coexistence de la population romanisée et des Germains est documentée dans la nécropole n° III, actuellement sur la rue Kovacsova, en direction du sud du cimetière actuel de Rusovce.

En 2003, une nécropole de l’époque de l’invasion barbare a été fouillée dans le cadastre territorial, dans la localité de Pieskový hon, de Rusovce. Parmi les 166 tombeaux, probablement Lombards ou germains, on découvrit aussi des tombes de chiens et de chevaux.

Des noms latins

Quelques noms de citoyens romains et de militaires ont été découverts à Gerulata (34 noms sont publiés). Ils appartenaient à l’unité auxiliaire – Ala Prima Cannanefatium – constituée de la cavalerie et de l’archerie romaine :

Marius Firmus – praefectus alae – préfet d’aile
P.Gavius Balbus – préfet
L.Crepius Paulus – préfet
Aelius Tutor – stator de l’Ala Prima Cannanefatium
Marcus Antonius Iulianus – stator de l’Ala Prima Cannanefatium de Gordiannus
Maximus – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium
Titus Flavius Surillo – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium
Titus Magnis – praefectum statorum de l’Ala Prima Cannanefatium de Sévère
Flavius Attius – buccinatore (trompettiste) musicien
Adiutor – nom sur la stèle d’un cavalier, tombé à l’âge de 42 ans. Il était au service des troupes auxiliaires pannoniennes participantes à la guerre contre les Maures dans la province romaine de la Maurétanie Césarienne sous Antonin le Pieux (règne de 138 à 161).

Le musée de l’antiquité romaine

Le musée de l’antiquité romaine Gerulata de Bratislava-Rusovce, présente les pièces les plus spectaculaires découvertes in situ lors des prospections et des fouilles systématiques qui y sont conduites depuis 1964.
Ces découvertes révèlent le passé romain de Gerulata. De l’imposante architecture antique, en passant par des objets de la vie quotidienne et des objets de la religion romaine et des cultes orientaux. Les fragments de statues et de reliefs romains, les chapiteaux et les fragments de colonnes, les fragments épigraphiques en pierre, les pierres tombales, les stèles, les autels votifs, les amphores, les lampes, les armes, les pièces de monnaies sont exposées dans le musée. On y retrouve, par exemple, un denier d’argent à la mémoire de la XIXe légion massacrée par les germains pendant la bataille de la forêt de Teutoburg en l’an 9 apr. J.-C.

Les artefacts archéologiques romains du 1er au 3e siècle apr. J-C, découverts à Gerulata

Le fragment du récipient aux serpents est considéré comme une preuve de l’existence d’un culte d’Orient du dieu perse de la lumière et du soleil, le dieu Mithra, dans le camp militaire romain Gerulata.

Les fragments des autels de la religion romaine : les autels de dédicace en latin de Jupiter Dolichenus, des fragments d’autel avec inscription votive.

Les autels dédiés au culte impérial de Salus Augusta – Salut d’Auguste, introduit après la mort d’Auguste en 14 apr. J-C. Le Sénat lui accorda l’apothéose et le plaça au rang des dieux. Les habitants dans les provinces rendaient un culte à la déesse Roma, désormais ils offrirent des sacrifices à Rome et à Auguste.

L’autel consacré à la triade divine de Jupiter, Junon et Minerve.

Le fragment d’autel de dédicace en latin de Silvanus, le dieu Silvain. Dans la mythologie romaine, il est le dieu tutélaire des forêts et des arbres, gouvernant les frontières entre le monde sauvage et celui des humains : Silvano Deo Sancto Viatori – Silvanus, dieu protecteur des voies.

Les fragments d’autel du culte d’Orient consacré à la déesse Cybèle. Culte de la Grande Mère des dieux, Matri Magnae Deum. (1)

La pierre tombale comportant un relief du dieu Attis, le dieu phrygien de la végétation dont le culte était inséparable de celui de Cybèle (2).

Un fragment d’autel du culte d’Isis, déesse de la fertilité d’origine égyptienne. (3)

Le motif des personnages mythiques Dédale et Icare.

Un relief monumental polychromé d’une pierre tombale – une pierre calcaire de 103 x 90 x 22 cm – datant de la fin du 1e siècle et du début du 2e siècle, découvert dans les ruines du site antique de Gerulata, représente le symbole mors immatura, mort d’un jeune ou le symbole d’un destin tragique.

Un récipient anthropoforme. Il s’agit d’un objet cultuel de Clotho ou de la parque Nona, en latin Neuna Fata, la fileuse de la destinée humaine, l’une des trois parques dans la religion romaine.

Les motifs d’animaux, représentés sur des reliefs : cheval, lion, taureau, aigle, dauphin, hippocampe et griffons (animaux mythologiques) ainsi que d’autres motifs végétaux comme l’acanthe, le lierre, la vigne, la pomme de pin, la grenade…

Notes

1 La déesse anatolienne Cybèle arrive à Rome vers 204 avant J-C.

2 le culte d’Attis était répandu à Rome au 3e siècle.

3 Les mystères d’Isis exercèrent une grande influence dans la Rome antique (l’empereur Caligula s’intéresse au culte d’Isis au 1ère siècle) : Isidi Magnae Matri Deum Sarapidi, Isis, la grande déesse des dieux et Sarapis.

Références

Rímske kamenné pamiatky Gerulata. Metské muzeum v Bratislave. Archeologický ústav SAV. Jaroslava Schmidtová, Jitka Jezná, Anita Kozubová, Venované pamiatke prof. PhDr. Radislava Hošeka, Csc. Bratislava – Nitra 2005

Rímsky Vojensý Tábor Gerulata, Bratilava Rusovce

Frontières de l’Empire Romain. David J Breeze, Sonja Jilek, Andreas Thiel. Published by Historic Scotland, UK and Deutsche Limes kommission, Germany Edinburgh – Esslingen – Wien 2005

Dunajský limes na Slovensu – Rímske antické pamiatky na strednom Dunaji. Rímsky vojensý kastel Gerulata v Bratislave-Rusovciach. Schmidtová J., Gáfriková O., Pinčíková Ľ. Pamiatkovy úrad Slovenskej republiky. www.pamiatky.sk

Carnuntum, c’était il y a 2000 ans. Archäologischer Park Carnuntum Betriebsges, mbH

Le Limes, les frontières de l’Empire romain. Bertrand Borie. Histoire Antique et Médiévale n° 65 janvier/février 2013. Editions FATON

PS : L’archéosite Gerulata abrite le Musée de l’antiquité et est sous la gestion du Musée de la ville de Bratislava (Bratislava City Museum) :

http://www.muzeum.bratislava.sk

http://www.muzeum.bratislava.sk/anticka-gerulata-rusovce/d-1019

Chaque année au début du mois septembre, dans le musée de l’antiquité de Gerulata, se déroule l’animation « Jeux romains » (Rímske hry) un spectacle qui, depuis 1999, est une représentation de la vie dans une ville romaine. Ce spectacle est assuré par des étudiants en arts dramatiques de Bratislava.

La chandeleur en Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

Magie des chandelles, oracles, le 2 février, jour de la Chandeleur est une ancienne coutume qui était sensée protéger les maisons, les habitants et leur apporter de bonnes récoltes et le lendemain, jour de saint Blaise, est aussi important dans l’imaginaire des gens afin d’obtenir une bonne moisson.

En Slovaquie la fête de la Chandeleur, le 2 février, est appelée Hromnice.

Un peu d’histoire

La fête de la présentation de Jésus-Christ au Temple et de la Purification de la Vierge est célébrée dans l’Église catholique et orthodoxe le 2 février en 2017.
Cette fête est honorée en mémoire de la présentation de l’Enfant Jésus au Temple raconté dans l’Évangile de Luc (1) conformément à la loi juive qui prescrivait la purification de la mère et la présentation de l’enfant au Temple de Jérusalem 40 jours après la naissance.

Cette fête a pris sa dénomination populaire de « chandeleur » en raison des chandelles et cierges bénits portés en procession ce jour pour rappeler la prophétie du vieillard Siméon qui, lors, de la présentation du Jésus, avait annoncé qu’il serait « Lumière pour toutes les nations ».
Cette fête fut instituée par le pape Vigile au 6e siècle, pour christianiser la fête païenne de Proserpine (Perséphone chez les grecs), que les païens Romains célébraient avec des torches ardentes.

Selon les ethnographes, l’évolution de la fête chrétienne de Hromnice était peu compliquée, dans la tradition des vieux Slaves c’était la fête appelée stretenie – rencontre de l’hiver avec l’été. Chez les Slaves occidentaux la fête Hromnice était probablement la célébration du dieu Pérun/Péroun, dieu de tonnerre (hrom en slovaque) et de la foudre (blesk en slovaque) et dominateur du feu. Selon d’autres, c’était le jour de Veles/Volos – fête de l’ours dans le culte païen des Slaves orientaux.

La fête dans la Rome antique appelée Lupercalia, fêtée par les Romains qui célébraient la fondation de Rome, vers le 15 février, et en l’honneur du dieu Faunus, protecteur des troupeaux contre des loups. Les luperques – prêtres de ce dieu – sacrifiaient des boucs à leur dieu à une grotte au pied du mont Palatin. La peau de bouc coupée en lanières, étaient servie aux jeunes hommes pour le « fouettage des Romains ». Les jeunes hommes couraient autour du mont Palatin en frappant les spectateurs, en fouettant surtout les femmes avec les peaux de bouc. Les processions avec des torches ardentes et le fouettage avaient un sens purificatoire magique.

A l’époque chrétienne, c’est devenu la fête de la Purification de la Vierge et le rituel de bénédiction des chandelles.

Hromnice et les chandelles

La chandelle est, pour les superstitieux, un symbole de protection contre les orages ou, plus exactement, contre la foudre qui pouvait enflammer les bâtiments. N’oublions pas que la plupart des constructions dans les villages, les montagnes slovaques étaient complètement en bois et avaient, pour certaines régions (sud-est de la Slovaquie), des toits en chaume.

Le fait de brûler une chandelle durant l’orage était – est encore pour certains – donc sensé protéger les bâtiments.

Les gens croyaient aussi, croient encore, au miracle de la bénédiction des chandelles comme thérapie contre le mal de gorge de même qu’à la possibilité de passer de vie à trépas plus facilement ou plus exactement, sans souffrir (2).

Le repas de Hromnice

Pour la chandeleur, les villageois préparaient un repas traditionnel avec des pâtes fraîches – rezance – en slovaque, ce sont des nouilles rituelles très longues, ou encore avec des pâtes appelées šúľky ou slíže – composées de pommes de terre et de farine, et roulées sous la forme de la grosseur d’un doigt.

Dans la région de Liptov, il existe un usage établi pour le rituel pour la cuisson de ces pâtes en forme de rouleau pour le repas de la Chandeleur. Hélas, de nos jours ce rituel tant à disparaître alors que depuis le début du 19e siècle, les enfants chantaient et dansaient pendant la cuisson du repas sur la formule incantatoire suivante :

Varte mamko, len šúľance, nech sú tučné ako škorce. Bryndze hodne obetujte, a škvarky tiež nešanujte. Každému nadeľte misku, nech sa rovná ľan úžitku.

Texte en patois slovaque de la région de Liptov et que l’on peut traduire en français par :

Maman cuis les pâtes roulées pour qu’elles soient grosses comme un étourneau, saupoudre-les avec beaucoup de fromage de Bryndza et de rillons et n’économise pas ! Mets-en dans chaque bol, pour que le lin croisse pour son utilisation.

Ces mets sont préparés pour un rituel de magie destiné à obtenir des pousses très longues de lin et de chanvre, de même que les pâtes sont saupoudrées de Tvaroh – un fromage blanc – pour avoir un aspect blanc, ce rituel étant accompli afin d’obtenir des toiles biens blanches plus tard.

La coutume culinaire de préparer ce jour le repas de pâtes longues saupoudrées soit de pavot, soit de fromage de lait de brebis – bryndza ou de fromage de lait de vaches – tvaroh, était très répandue partout en Slovaquie. Cette coutume disparait cependant peu après la Seconde guerre mondiale, quand disparaît la fabrication domestique des toiles du lin et du chanvre.

Les prophéties agraires et les superstitions

A cette période, en Slovaquie, la neige est bien présente et les familles vont pratiquer la luge et glisser sur la neige fêtant ainsi la nature et la Chandeleur. Jadis, ce sport était aussi sensé apporter la garantie de très longues tiges du lin et du chanvre – des plantes industrielles pour le textile qui étaient fabriqué à la maison.

Une tradition ancienne dit que le 2 février permet aussi de pronostiquer la prospérité, ou non, de l’agriculture, pour les récoltes venant de la terre – blé, orge, avoine, pommes de terre, chou, pois, haricot, lentille, pavot… – et pour la récolte de plantes industrielles ayant comme utilité le textile – lin, chanvre…

Dans le village montagnard de Podkonice, dans le district de Banská Bystrica, on disait : Na Hromnice – koniec sanice : à Hromnice (à la Chandeleur) – c’est la fin de luger.
Autrefois, pendant ce jour, les villageois de Podkonice se réconfortaient avec des boissons alcoolisées dans une taverne. On disait que cela avait une vertu préventive contre les piqûres des mauvaises mouches d’été et de taons des pluies, insectes extrêmement importuns. Et celui qui ne boit pas, les mouches le piqueront toute l’année.
Le soir, les femmes-fileuses de Podkonice se réunissaient aussi dans une taverne du village afin de fêter, en buvant une boisson, la fin des travaux domestiques du filage du lin et du chanvre.

Dictons de la Chandeleur

Na Nový rok o slepačí krok, na Hromnice je o hodinu vice – L’enjambée du poulet du Nouvel an à la Chandeleur est égale à environ une heure de plus
Na Hromnice zima zadúva ulice – Lors de la Chandeleur l’hiver souffle la neige en tas dans les rues
Na Hromnice mráz, bude ešte päťdesiat ráz – S’il gèle à la Chandeleur, il gèlera encore cinquante fois (50 jours)
Na Hromnice – zimy polovice – A la Chandeleur, l’hiver est à son milieu

Le 3 février, jour de la Saint-Blaise

Fêté depuis le Moyen Age en Slovaquie, qui était alors Royaume de Hongrie, et depuis le 18ee siècle. Il s’agit d’une marche, autour du village, de l’instituteur accompagné par les écoliers et qui vont de porte en porte souhaiter bonne vie, bonne santé, aux villageois. Ceux-ci, pour les remercier, déposent dans un panier des aliments : farine, lentilles, haricots, pavot, lardons, beurre, œufs, fromage, fruits, saucisses … et un peu d’argent de poche.

On retrouvait aussi cette tradition à la saint Grégoire le 12 mars ainsi que le jour de saint Martin le 11 décembre et de saint Havel le 16 octobre.

Dans ces régions, au 18e siècle, le poste d’instituteur de village, souvent protestant au 18e siècle, pour ceux qui en avaient la vocation, permettait d’assurer un salaire et d’obtenir aussi quelques avantages « en nature » comme du bois de chauffage, du blé, de la bière, du lard … et de petites rentrées d’argent. Il faut dire qu’à l’époque, les enfants n’allaient à l’école qu’en hiver, depuis la mi-automne, car le printemps, l’été et une partie de l’automne, les enfants étaient aux champs avec la famille.

La grande Réforme des écoles de 1774, pendant l’empire austro-hongrois, imposée par Marie-Thérèse de Habsbourg (1717 – 1780)(3), allait changer ce principe éducatif des enfants en organisant les écoles et en rendant l’enseignement obligatoire pour les garçons mais aussi pour les filles. Cela amènera la disparition de cette coutumes, que l’on ne retrouve plus que dans quelques villages où les habitants ont gardés ou remis cette « promenade » qui fait aujourd’hui partie de la mémoire collective.

PS :

Deux églises à voir. La première se trouve au sein du petit village de Smrečany, près de Liptovský Mikuláš, là on peut y voir la très jolie église gothique (vers 1349) dédiée à l’origine à l’Očisťovania Panny Márie – de la Purification de la Vierge Marie de rite catholique-romain.
La deuxième, une église en bois du rite gréco-catholique (1760), se trouve dans le petit village de Kožany, près de Bardejov, et est dédiée à Stretnutia Pána so Simeonom – Présentation du Seigneur à Siméon.
http://www.drevenechramy.sk/drevene-chramy/bardejov-a-okolie/kozany/

Notes

1 Luc 2.22 : Et, quand les jours de leur purification furent accomplis, selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem, pour le présenter au Seigneur, –

2 Voir notre article L’Epiphanie en Slovaquie : http://vaheurope.eu/?p=545

3 Marie-Thérèse était archiduchesse d’Autriche, reine de Hongrie et de Bohême

Sources

Ľudová kultúra. Zuzana Beňušková. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009.

Les Fêtes de Dieu. La foi, l’histoire, les mythes. Guy Deleury. Ed. du Félin. 1994

Dictionnaire d’iconographie romane. Marc Thoumieu. Ed. Zodiaque

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

Rome antique. Les yeux de la découverte. Texte Susan Mckeevers. Les compacts Gallimard jeunesse. 2008

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976

L’architecture populaire en bois de Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

En Europe, la Slovaquie fait partie des pays ayant une très grande couverture forestière. Plus de 40% de son territoire est occupé par les forêts et elle possédait auparavant une zone encore plus étendue. Il est donc normal de retrouver de nombreux bâtiments en bois. Nous réserverons d’ailleurs des articles aux églises en bois de Slovaquie. Parmi ces églises, huit de la zone des Carpates sont désormais inscrites sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO depuis le 10 juillet 2008.

Les forêts de bois tendres d’Europe de l’Est font partie de la zone de végétation comprenant la forêt de résineux boréale qui traverse l’hémisphère nord mais diverses forêts de feuillus poussent aussi à des altitudes plus basses.

Cette richesse en bois différents est la cause de la vieille tradition de l’architecture en bois de ces régions. La construction en rondins s’étend de la Scandinavie vers l’ouest, va jusqu’à la Baltique au nord, jusqu’en Asie vers l’est et jusque la mer noire et l’ex-Yougoslavie au sud.

En Slovaquie, le bois a toujours été un matériau prédominant dans la construction, plus particulièrement à la campagne et, surtout, dans les montagnes et ce jusqu’au 19ème siècle quand va apparaître la brique crue d’abord puis la brique cuite et que va se populariser l’usage de la pierre, surtout dans les villes minières du sud de la Slovaquie centrale et de l’argile, dans les plaines du sud.

Les maisons, les fermes, les moulins et les églises étaient essentiellement construits en bois. Ces techniques traditionnelles de construction ont été abandonnées depuis. De nombreux édifices et bâtiments ont été détruits, ou ont brûlés lors d’incendie, et d’autres, abandonnés, se sont effondrés.

Technique de construction abandonnée ? Aujourd’hui, on peut remarquer que certains remettent au goût du jour ce noble matériau dans les montagnes slovaques.

Il faut aussi noter que le bois est le matériau qui accompagne l’homme tout au long de sa vie, littéralement du berceau à la tombe. Il peut donc paraître inévitable que le bois soit aussi un matériau utilisé couramment comme matériau de construction.

Mais revenons aux constructions en bois en Slovaquie pour s’apercevoir que les espèces d’arbres utilisées pour la construction, les plus communs y compris, sont les hêtres à feuilles caduques et les conifères, épicéa, mélèze.

On retrouve les maisons en bois de conception rustique plus particulièrement au nord de la Slovaquie. Là, sont construits en bois, des églises, les chapelles, des clochers, des bergeries, des greniers à céréales, des bâtiments agricoles, des moulins, des puits, des ponts… Dans ces différentes constructions, le bois prouve, par ses qualités, qu‘il apporte la meilleure solution aux divers problèmes présents dans la réalisation de ces édifices.

C’est lors de la visite des skanzens – musées de plein air, que l’on pourra le mieux appréhender l’architecture populaire. Cependant deux villages sont incontournables. Le premier est le village de Vlkolinec connu pour son ensemble d’habitations en bois, inscrit depuis 1993 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Le deuxième est le village de Čičmany où les maisons en bois sont ornées de motifs géométriques peints en blanc.

Les techniques de construction en bois en Europe centrale et de l’Est

Nous trouvons, comme techniques de base de l’architecture en bois – en russe srub – en slovaque zrub. La technique de base de l’architecture en bois appelé en slovaque – zrubenie – les constructions en rondins empilés, dont la difficulté majeur est l’assemblage des extrémités des rondins aux angles du bâtiment.

Dans le nord de la Russie, les rondins demeuraient sans traitement, à part l’écorçage. Plus au sud, en Slovaquie, en Roumanie ou en Ukraine, le bois était travaillé en madriers de section carrée. Pour ce travail, on utilisait uniquement la hache et l’herminette, on créait sur chaque pièce des entailles et on les empilait pour construire des murs.

Les madriers étaient découpés pour créer des percements et on y insérait les encadrements de porte ou les ébrasements de fenêtre.

La difficulté de réaliser des angles solides à conduit à la réalisation d’assemblages complexes. Un système d’assemblage à tenons et mortaises s’est répandu au 18e siècle, pour sa bonne stabilité, de Croatie en Ukraine.

La construction de la cabane ne possède pas de squelette, de colonnes verticales, comme les constructions en béton. Pour le bois, des troncs d’arbres entiers sont utilisés et les seuils qui constituent le périmètre de la maison sont aussi la base de la maison en rondins et dans les angles, les rondins de bois se croisent et s’encastrent pour former l’arête de la construction, les deux parois étant reliées à leurs extrémités par un assemblage ressemblant à un système de mortaises. La stabilité des bâtiments pendant l’assemblage dépend de la qualité des différents faisceaux.

Les maisons en bois classiques

On retrouve essentiellement deux types de maisons classiques. La première est la maison à deux niveaux. La deuxième, la plus courante, la maison à un niveau, ce que nous appelons aujourd’hui la maison de plain pied. Il est bien entendu que, pour tous les types de maison, lorsqu’elle est édifiée en montagne, ce type de construction était adapté à l’inclinaison du terrain.

Si dans les villes on trouve la porte d’entrée sur la façade principale côté rue, mais aussi parfois dans des cours, on peut remarquer que, généralement, pour les maisons de village, c’est un pignon qui donne sur la rue et l’entrée de la maison se fait latéralement par la cour où se trouvent également les dépendances.

La maison à deux niveaux

La maison de type classique était constituée de deux niveaux, avec souvent, un escalier extérieur. Au niveau supérieur on y trouvait le logement, souvent situé au-dessus des granges ou des étables. Cela permettait de gérer le travail de la ferme même en cas de neige ou de mauvaises conditions météorologiques et de profiter de la chaleur venant des étables ou des bergeries.

Ces plus grands bâtiments, avec étage, possédaient de petites chambres à l’étage disposées sous les versants de la toiture, un grenier et une cave

Dans certaine région, le plus souvent en montagne, le soubassement de la maison était réalisé en pierre afin de protéger le bois de l’humidité et de récupérer la pente du terrain.

Le bois des madriers était soit laissé « brut » soit enduit d’un plafonnage composé d’argile et peint ensuite avec de la chaux blanche ou teintée d’ocre ou de bleu.

Le chaulage à pour but essentiel de protéger le bois contre les insectes, les microbes et les bactéries. Quant à l’utilisation de peinture, les tons utilisés, ocre, bleu… outre l’aspect esthétique, elle avait aussi pour objectif de chasser les insectes, rampants comme volants (1).

Composition de la maison

Les éléments clés de la maison de plain pied étaient : la cuisine, le cellier, la pièce de séjour comprenant le lit.

Plan d’une maison traditionnelle de plain pied comportant : 1 l’entrée centrale avec perron ; 2 le cellier ou débarras ; 3 antichambre ; 4 l’izba, la chambre principale (pièce de séjour) et 4a le four maçonné.

A l’intérieur d’une maison en bois slovaque

En Slovaquie, la disposition de la maison avait un caractère d’utilité et de simplicité. Voyons cela un peu plus en détail.

La simplicité tout d’abord. Pour y vivre, les habitants avaient un logement comprenant une pièce, qui servait de cuisine dans le vestibule de l’entrée (antichambre) – 1 – ; une chambre et pièce de séjour – izba en slovaque – 4 – où se trouvait un four maçonné – 4a-.
Dans la cuisine – 3 -, on trouvait le poêle et la cheminée ou plus tard, le poêle et des meubles de bureau, bureau, lit, coffre à vêtement. Les pièces d’entreposage des aliments étaient situées à proximité – 2 -.

Comme éclairage, on a d’abord utilisé les lanternes et les bougies, plus tard les lampes à pétrole – kahance et ensuite l’électricité.

L’espace de vie principal était bien entendu centré dans la maison et devait faciliter la vie et le travail de ses habitants, comme la préparation des repas, le repos, l’accueil des visiteurs, les cérémonies…

La pièce principale (2), l’izba, était pourvue d’un lit, d’une table, de bancs, de chaises, d’étagères, d’armoire d’angle, d’objets décoratifs comme des articles en bois décorés de sculptures ou de peinture sur bois ainsi que les petits ustensiles de cuisine en bois comme le casier support pour les cuillères à soupe – lyžičník ; les récipients à épices; les planchettes à découper – lopár, le fouet mélangeur – habarka que l’on fait tourner en se frottant les mains, pilon, plat…

Lorsqu’il y avait un bébé, le berceau était à proximité du lit des parents, soit accroché au plafond, soit posé au sol.

On retrouve un endroit particulier dans l’izba, le coin sacré – svätý kút en slovaque. C’est le coin d’apparat ou d’honneur. Il se trouve à l’opposé du coin où se trouve le poêle, souvent c’est à cet endroit, près de la fenêtre, au sud, que l’on place la table et l’étagère des icônes où des peintures saintes, selon le rite, sur verre, sur toile, sur papier ou d’autres objets « sacrés » pour les habitants du lieu comme la toile brodée, la gerbe de la dernière moisson…

Dans la cuisine, on retrouvait bien entendu les différents ustensiles de cuisine comme des plats en terre cuite. On y trouvait les pots à lait en argile avec une anse – mliečnik, les divers pots à eau, cruche, pichet, bassine, casserole, conçus pour la cuisine, le stockage de lait et de levure. De même que les pots de grès ou en faïence, les pots à ventre avec poignées ou les pots à col étroit. On y trouvait aussi l’évier moulé pour stocker l’eau potable dans le froid pour le travail du terrain, des bols en faïence, en grès, ou encore des pots en étain, en cuivre, en porcelaine ou d’autres contenants métalliques à corps bulbeux, utilisés pour le stockage à court terme de boissons, de liquides et d’autres récipients dont le ballon était plus étroit (pour emporter lors de déplacement, de voyage) et des bouteilles en verre pour l’alcool. S’y trouvait encore la truhlica – le coffre ou la boîte en bois, le súdok – un tonnelet en bois ou en grès pour la choucroute.

La finition intérieure comportait des tableaux, des peintures sur verre à motif religieux, Madone, saints patrons… mais aussi des motifs à caractère populaire comme les motifs de Jánošík en rappel à la légende de Janošik, des chiffres en forme de fleurs…

Sur les étagères, on plaçait des poteries peintes, mais on déposait aussi la literie – les oreillers et la couverture avec des motifs tissés ou en tissus coloré ou imprimés bleu-indigo.

Et, bien entendu, une partie de la décoration des logements était composée de sculptures populaires en bois : jouets, personnages civils ou de personnages saints de Bethléem comme Madone, Pietà, saints bienfaiteurs…

A l’intérieur encore, les troncs étaient soit laissé « brut » soit, pour récupérer les « bosses », enduit d’un plafonnage composé d’argile et peint ensuite avec de la chaux blanche ou tout simplement enduit de chaux. La chaux était utilisée pour son effet antiseptique et aussi parce qu’elle laissait « respirer » la cloison et empêchait la condensation de la vapeur d’eau.
Mais, auparavant, afin de rendre étanche aux vents les interstices entre les troncs, ces espaces étaient complétés soit de mousse végétale, soit d’une latte coupée en triangle ou soit encore, le procédé le plus courant, d’une corde de chanvre tressée chassée dans l’interstice du joint.

Le sol

Le sol de la partie habitée consistait le plus souvent en un plancher en bois sur lequel un (ou plusieurs) tapis était posé.

Mais le sol était parfois en terre battue, lissée. Parfois, un tapis posé à même la terre améliorait le confort de cet intérieur d’habitation.

Les parties « non-habitables » de la maison comme le cellier, le débarras, l’atelier… étaient, la plupart du temps, en terre battue.

Le toit

Le plus ancien type de matériau de couverture fut l’écorce d’arbre, qui une fois déposée sur le toit de la maison, était complétée par des roches plates ou, parfois, par de la mousse végétale voire du gazon séché.
Plus tard, les hommes ont utilisé un revêtement plus durable et notamment les bardeaux de bois – šindeľ en slovaque, qui sont devenu une des caractéristiques de l’architecture en bois.

Dans certaines régions, on utilisait la paille, comme pour les maisons des Habáni – Anabaptistes à Velké Leváre ou encore des roseaux, en particulier dans le sud de la Slovaquie, dans la plaine du Danube.

L’eau pluviale qui ruisselle sur les versants n’est pas toujours canalisée par une gouttière au pied du versant de la toiture. Ce pied de versants débordent largement des murs, de cette façon l’eau est rejetée à distance des murs (c’est le principe de la gargouille dans la construction des cathédrales). C’est aussi pour cette raison que le soubassement de la maison est réalisé en pierre.

L’autre partie de la maison comportaient les bâtiments agricoles, la grange, le grenier à blé et/ou à pommes de terre, la fosse à grains de blé…

Dans le village de Martinček, près de la ville de Ružomberok, on peut voir sur la colline, en-dessous de l’église gothique Saint-Martin (3), 35 petites constructions étranges. En fait, ce sont de petits toits en bois, appelés dáška (des dášky) mot dérivé de l‘allemand dach – petit toit qui couvrent une fosse de 5 mètres de profondeur environ et qui servent, pour les habitants, au stockage de pommes de terre ou de légumes.

PS : vous pouvez découvrir ces constructions de maisons dans le village classé au Patrimoine de l’UNESCO de Vlkolinec mais aussi dans le village de Podbiel… auprès des remarquables églises en bois de Sväty Križ, Kežmarok, Hervartov, Ladomirová… et, bien entendu, dans les Musées de plein air – Skanzen où là vous pouvez aussi pénétrer à l’intérieur de certains bâtiments.

Notes

1 Certains bleus comme le « bleu de Prusse » ou le « Pastel des teinturiers » sont connus pour leur qualité d’action répulsive contre les insectes.

2 L’izba, la chambre « traditionnelle » prise dans le contexte de l’habitation est la pièce de vie,  c’est pour nous, notre « living room, notre pièce de séjour ».

3 Cette église dédiée à saint Martin comporte de très jolies fresques d’origine (13e – 14e siècle).

Cet article en pdf : Slovaquie, batiments en Bois

Sources

Perly ľudovej architektúry. Miroslav Sopoliga. DINO. 1996

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Le monde mythologique russe. Lise Gruel-Apert. Ed. Imago. 2014

Une histoire symbolique du Moyen Age occidental. Michel Pastoureau. Ed. du Seuil. 2004

Histoire de l’habitation humaine. Viollet-le-Duc. Ed. Pierre Mardaga. 1978

 

 

L’Épiphanie en Slovaquie

Mgr Alice Hura – Charles Bugan

En Slovaquie, comme dans plusieurs régions d’Europe centrale et orientale, à la période de Noël est affirmé un réel éclat de traditions masquées (1). On y rencontre des coutumes qui prennent la forme de jeux rituels, de spectacles bibliques, allant du passage de chanteurs de cantiques de Noël et de porteurs de Crèches de Bethléem ou de l’Étoile de Bethléem aux tournées des Rois mages à l’Épiphanie.

En Slovaquie, l’Épiphanie est appelée Traja králi ce qui signifie les Trois rois. C’est la fête du 6 janvier (2) qui tenait une grande place parmi les solennités de l’année chrétienne depuis l’époque médiévale.

Selon la tradition d’autrefois, les drames liturgiques représentant l’arrivée des Rois mages Gaspard, Melchior et Balthazar à Bethléem, guidés par l’étoile, venus d’Orient et qui apportaient à l’Enfant Jésus de riches présents, furent mis en scène tout d’abord dans les grandes églises des villes royales. Les rôles des personnages bibliques étaient joués par des instituteurs, des étudiants et des élèves.

En Slovaquie, la coutume de jouer la représentation théâtrale de la légende biblique, les mystères de Noël ou l’Adoration des Mages, en vogue depuis le milieu urbain médiéval s’est répandu au cours des siècles suivants dans le milieu rural. Là, le jeu biblique est alors devenu très populaire et s’est enrichi de nombreux chants populaires et de formes de souhaits en formules parlées. Souvent, la version était quelque peu modifiée localement, par exemple un texte était de plus courte durée, les rôles des personnages variaient, les épisodes de pièces différentes étaient combinés… Ils existent ainsi de nombreuses versions locales de jeux bibliques populaires des Trois Rois mages.

C’est probablement la légende Historia trium regum écrit en 1364 (3) par un moine de l’Ordre du Carmel Johannes Hildesheim (1310 – 1375), qui a créé le profilage de la fête des Rois mages dans les pays germaniques et donc aussi, indirectement, dans les régions slovaques habitées dans le passé par des communautés allemandes.

Selon l’ethnographe slovaque renommée Sonia Kovačevičová (1921-2009), le spectacle des Mystères de Noël a commencé à être joué dans les rues de la ville de Bratislava (anciennement Presbourg) en 1439. Auparavant, les Mystères de Noël étaient joués dans les églises de cette ville. Puis, d’autres villes vont suivre l’exemple et laisser jouer ce spectacle. A l’époque ce sont les villes royales libres de Bardejov, de Prešov, de Levoča, de Kežmarok

La coutume du cortège des Trois Rois mages dans les campagnes slovaques

Le cortège populaire des Trois Rois parfois appelé la Marche avec l’Étoile était, dans certaines régions slovaques, avec quelques différences toutefois, très répandu dans presque toute la Slovaquie mais surtout en Slovaquie centrale et orientale.

Anciennement, on fêtait l’Épiphanie par l’arrivée de trois jeunes hommes ou jeunes garçons déguisés en Rois mages. Ils allaient de maison en maison en récitant ou en chantant des poèmes qui paraphrasaient la légende du Nouveau Testament commémorant l’Adoration des mages à peine l’enfant Jésus né.
Pour ce cortège, les garçons portaient sur le corps une longue chemise blanche, sur la tête une haute couronne ornée d’une croix et ils tenaient à la main un bâton, parfois ils portaient un petit modèle en bois de la Crèche de Bethléem.

La soirée du jour des Trois Rois était l’occasion d’une fête pour la jeunesse slovaque, laquelle organisait un festin collectif.

La quête du cortège du clergé catholique

Encore aujourd’hui, pour l’Épiphanie en Slovaquie, il existe une tradition qui est « le cortège du curé avec les servants d’église ». Ils font du porte à porte auprès des demeures catholiques et vont bénir les maisons et écrire sur le dessus des portes des maisons trois lettres G – M – B. Il s’agit des initiales des rois mages Gaspard, Melchior et Balthazar. Ils ajoutent à ces trois lettres le millésime, ce qui donne pour cette année : G – M – B – 2017 (4)

En Slovaquie, le 6 janvier, le cortège des Trois rois mages visitant des maisons, les gens disaient « qu’ils contrôlaient l’inscription des initiales G – M – B sur les portes ». Là où ils ne trouvaient pas cette inscription ils apportaient, prétendument, tout bonheur à la famille !

Déjà au 16e siècle, l’Église protestante interdit les quêtes du clergé protestant à l’Épiphanie. Au premier tiers du 19e siècle, Jan Kollar (1793-1852), pasteur protestant, poète et collectionneur du folklore slovaque a publié de 1834 à 1835 une critique dans son œuvre Narodnie spievanky. Il s’agit d’un recueil de chants populaires, qui contient 2675 chants populaires slovaques collectés par Jan Kollar dans les dix comitats de ce qui était alors la Haute Hongrie, donc sur le territoire de la Slovaquie actuelle. Je cite : « Que chez les slovaques, la Koleda est devenue une coutume de quête ecclésiastique, selon laquelle, prêtre, recteur, sacristain, certains chanteurs du chœur et des fidèles, les hottes sur le dos, circulaient à la Nouvelle année dans les rues du village et de la ville, de porte en porte des maisons en chantant des chants religieux et en collectant de l’argent et des provisions ».

Les spectacles bibliques

Une forme ancienne des coutumes de Noël du 18e siècle d’un genre de spectacle biblique popularisé dans le milieu rural de l’ancien comitat de Zvolen (en Slovaquie centrale) est enregistrée. Selon les sources ethnographiques publiées récemment, les acteurs de ce spectacle biblique, en forme de jeu populaire, étaient la jeunesse du village qui se rassemblait en cortège des Trois Rois.
Les jeunes gens déguisés avaient en rôles principaux : un Ange, habillé d’un vêtement long blanc ceinturé et ayant sur le dos deux ailes d’oie. Il tenait un bâton sur le bout duquel se trouvait une étoile en papier et une chandelle de cire allumée qui faisait comme un lampion. Deux autres personnages, des bergers, appelés Kubo et Lauro, portaient des vêtements de bergers de la région. Un personnage biblique, Joseph, vêtu d’une pelisse de fourrure de mouton ceinturé par un cordon de paille tressée, portait sur la tête un bonnet de fourrure de mouton, et il maintenait sur l’épaule, une grosse trousse pour les cadeaux. Le personnage biblique de Marie, vêtue d’un costume féminin, tenait dans ses bras un petit berceau avec une poupée d’enfant. Les trois rois, Gaspard, Melchior et Balthazar, étaient vêtus de costumes luxueux et ils avaient le visage noirci de suie de fumée. Ce groupe visitait les maisons, les fermes. Ils se présentaient dans la cour de la maison et jouait le spectacle. Placés autour d’une scène biblique, ils récitaient des vers traditionnels de bonheur et de prospérité, de fertilité et de fécondité pour tous, bétail compris, pour l’année qui commence.

Les cortèges avec l’Adoration des Mages, joués le jour de l’Épiphanie, et la fête des Rois clôturaient les réjouissances du cycle des douze jours qui préfiguraient le Carnaval.

Dévotion à la crèche de Bethléem en Slovaquie

Le jeu populaire de la légende de l’Annonce aux bergers trouve son origine dans l’évangile de Luc 2, 6-20, quant aux « mages » c’est dans Matthieu 2, 1-11 (5).

Les bergers se rendirent à Bethléem, et c’est ainsi qu’existe une adoration des bergers qui fait pendant à l’adoration des Rois. Toutes ces légendes étaient très populaires sur le territoire slovaque et cela a donné la Marche avec l’Étoile de Bethléem, une étoile fixée sur un long bâton

Les Jeux pastoraux de Bethléem interprétés par les bergers slovaques

Les récits populaires représentant le scénario de l’Annonce aux bergers et leur arrivée à la crèche de Bethléem trouvent leur origine dans les pièces liturgiques médiévales, cependant, elles étaient enrichies par une humeur apportée par des éléments particuliers de la culture populaire slovaque même s’il est évident que le scénario, quoique réduit à une synthèse de quelques gestes répétitifs, était profondément symbolique.

Lors du déroulement de la fête dans les régions montagneuses slovaques, le cortège des bergers faisait du porte à porte dans le village en récitant des poèmes de Noël, en chantant et en dansant dans la « chambre » (6) de la maison, devant la toute famille. À la fin de la représentation, on leur offrait des friandises ou de l’argent.

Dans la région de Turiec, habitée à majorité par les protestants, c’était le cortège des jeunes bergers de la région d’Orava, pourtant catholiques, portant la Crèche de Bethléem (7). Ils visitaient les maisons des villages ou ils étaient aussi invités par des familles évangéliques protestantes. Les bergers d’Orava porteurs de la Crèche étaient vêtus d’un pantalon de drap blanc et tenaient en main un bâton. Ils chantaient en dansant en tournant comme dans une ronde et ils marquaient le rythme en frappant avec le bâton sur le sol. Ce spectacle était scandé par la récitation de souhaits de bonheur, de prospérité et de la bénédiction divine pour la santé de leurs hôtes.

Les personnages principaux du jeu de l’Annonce aux bergers, étaient l’Ange représenté par un garçon déguisé, vêtu d’une longue chemise blanche avec des ailes sur le dos et portant un modèle de Crèche de Bethléem en papier peint ou en bois sculpté. Les autres personnages étaient vêtus du costume populaire traditionnel des bergers, avec dans le rôle de Chef-berger, Bača, et trois personnages dans le rôle des Bergers valaques sous les noms de Stacho, Fedor et Kubo, ce dernier représentant un « pauvre » gars du village (8).
La structure du jeu des bergers était la même partout. Le jeu était interprété par cinq acteurs, souvent des paysans du village. L’événement du jeu se déroule depuis le moment où l’Ange leur annonce qu’un enfant merveilleux est né. Les acteurs du jeu de bergers chantent un refrain très populaire au temps de Noël dont voici pour exemple un chant de la région de Liptov :

Pásli ovce valasi
pri Betlemskom salaši,
hajdom, hajdom, tidlidom.
Anjel sa im ukázal
do Betlema ísť kázal,
hajdom, hajdom, tidlidom.
Vstante hore a iďte,
Pána Krista nájdete.
Nájdete ho v jasličkách,
ovitého v plienočkách,
hajdom, hajdom, tidlidom!

Que l’on peut traduire par :

Les bergers gardent les moutons près de la bergerie de Bethléem, hajdom, hajdom, tidlidom ;
L’Ange leur est apparu et leur disant d’aller à Bethléem, hajdom, hajdom, tidlidom ;
Il dit : Réveillez-vous, allez hajdom, hajdom, tidlidom ;
Le Seigneur Jésus-Christ vous le trouverez, hajdom, hajdom, tidlidom ;
Vous le trouverez dans la crèche, emmailloté dans un petit maillot, hajdom, hajdom, tidlidom !

Les superstitions

Voici quelques superstitions en rapport avec le jour de l’Épiphanie

L’eau bénie ce jour était ajoutée à la nourriture pour le bétail par les paysans,

La chandelle bénie, appelée la chandelle des Trois Rois, était allumée près du lit d’un mourant ou en temps d’orage,

Le cercle qui était dessiné par la craie bénie devenait un endroit sécurisant qui empêchait l’entrée des puissances obscures néfastes. Avec cette craie bénie était dessinée une ligne de contour autour de la porte et des fenêtres des étables pour empêcher aux sorcières l’entrée dans l’étable du bétail,

L’ail béni étaient porté par les gens qui étaient obligé de se déplacer sur l’eau, de traverser un gué. Cet ail était un moyen efficace contre les esprits néfastes de l’eau – Vodník – esprit des eaux, Maître des eaux douces dans les contes populaires.

Tous moyens bénis le jour de la Fête des Trois Rois étaient utilisés par les gens soit contre les mauvaises et néfastes puissances comme les enchanteresses, les sorcières, les démons, les esprits de l’eau…, soit contre une catastrophe naturelle comme tempête, sécheresse, inondation, grêle… et les incendies.

Autrefois, dans la vallée du Hornád, les habitants ruraux très superstitieux apportaient à l’église pour la bénédiction du jour de l’Épiphanie, une petite cruche contenant de l’eau et un panier contenant divers éléments comme du sel, de la craie, de l’ail, de l’oignon, de la pomme de terre, des graines de blé. Ces éléments étaient une partie des plats exposés sur la table de Noël, éléments auxquels on ajoutait un morceau de pain de Noël duquel on avait prélevé la mie remplacée alors par des miettes des gâteaux de Noël et des coquilles de noix. Au printemps, ils plaçaient le contenu de ce panier béni dans le premier sillon labouré du champ, ainsi le blé était semé et la pomme de terre était enterrée.

La coutume de la bénédiction de l’eau, du sel et de la craie à l’Épiphanie est encore pratiquée de nos jours dans les églises slovaques.

En Slovaquie, l’Église gréco-catholique fêtera le 6 janvier l’Apparition de Jésus-Christ aux Rois mages, c’est une grande fête de la religion uniate.
L’Église orthodoxe slovaque, célébrera ce 6 janvier la Nativité de Jésus-Christ, la Fête de Noël, selon l’ancien calendrier julien.
Pour l’Église catholique slovaque, le 6 janvier, et selon les anciennes coutumes, on procèdera à la bénédiction divine de la Fête des Rois mages des objets apportés par les fidèles. C’est ainsi que dans les églises sera béni l’eau, l’ail, une chandelle de cire, une craie blanche et parfois aussi le sel.

Texte extrait de notre conférence : Les traditions de Noël en Slovaquie

Notes

1 En Europe centrale et dans les Balkans, les termes « masques, masqués » ne désignent pas seulement ce qui déguise le visage mais tout un ensemble.

2 La date de la Nativité a été, en 354, à Rome déplacée du 6 janvier au 25 décembre. Le 6 janvier deviendra alors la date de l’Épiphanie.

3 Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Zuzana Drugová.

4 C – M – B, ces initiales peuvent être interprétées comme celles des Rois mages : Caspar (ou Gaspar), Melchior et Balthasar, mais peuvent également être lues comme l’acrostiche de « Christus Mansionem Benedicat », « que Christ bénisse cette maison ».

5 Le mythe des Mages fut très prisé dans les Églises du Proche-Orient, et sans doute « prescrite » sous l’influence de l’Église perse, avec l’inspiration de textes « apocryphes » comme le Protévangile de Jacques ,l’Évangile de l’enfance, les Actes de Thomas et surtout l’Opus imperfectum in Mattheum attribué à saint Jean Chrysostome. Dans la Légende dorée de Jacques de Voragine, lire « La nativité de N.S. Jésus-Christ selon la chair » et « l’Épiphanie du Seigneur ».

6 Comme déjà dit dans un article précédent, le terme « chambre » doit être compris dans ce contexte comme « pièce de séjour ».

7 L’invitation a présenter dans cette région majoritairement protestante le spectacle de la « Crèche de Bethléem » par des jeunes bergers catholiques de la région d’Orava vient du fait que ce spectacle n’existant pas chez les protestants, c’étaient les jeunes bergers venant de la région d’Orava qui assuraient la représentation. La plupart de ces bergers étaient et seront les travailleurs saisonniers chez les riches propriétaires protestants de la région de Turiec.

8 Kubo est un personnage, un homme, pas très propre, jovial, un peu « benêt » revêtu d’une veste de mouton à l’envers, il porte sur la tête un vieux chapeau de berger en mouton, son visage est noirci de suie de fumée. C’est un personnage mi-homme mi-animal (le chien du berger ?). Kubo symbolise le sans-souci, la simplicité, il fait des « bêtises ». Mais à un moment de leur danse, Bača, Stacho et Fedor vont former un triangle, tenant leur bâton à bout de bras vers le haut et Kubo est couché sur le sol au centre, sous la protection des bâtons des bergers. Le nom de Kubo est dérivé du prénom Jakub.

Voir la remarquable vidéo Vianoce v Karpatoch  par le Ballet folklorique national slovaque Lúčnica sur youtube (lien ci-dessous).

www.youtube.com/watch?v=NjYRU8pWYDo

Sources

Ľudová kultúra. Zuzana Beňušková. Kultúrne Krasý Slovenska. Dajama

Malý lexikón ľudovej kultúry Slovenska. Kliment Ondrejka. Mapa Slovakia Bratislava 2003

Slovenský rok. Receptár na dni sviatočné všedné i pôstne. Ratislava Stoličná-Mikolajová. Vydavateľvo Matice Slovenskej. 2004

U nás taka obyčaj. Slovenské ľudové tradicie. Vojtech Majling. Computer Press, Brno. 2007

Vianoce na Slovensku…od Ondreja do Troch kráľov. Par Zuzana Drugová, 2008. Slovak edition – OTTOVO NAKLADATELSTVI, 2009.

Les Fêtes de Dieu. La foi, l’histoire, les mythes. Guy Deleury. Ed. du Félin. 1994

Dictionnaire d’iconographie romane. Marc Thoumieu. Ed. Zodiaque

La fête au Moyen Âge. Gérard Lomenec‘h. Ed.Ouest-France. 2015

La Sainte Bible. Par Louis Segond. Ed. La Société Biblique Canadienne. 1976